Le sit-in des médecins résidents s'est déroulé hier dans le calme à l'hôpital Mustapha, à Alger. Près de 2000 résidents de toutes les spécialités venus de tout le pays ont pris part au rassemblement pour dénoncer les mauvaises conditions de leur résidanat et revendiquer notamment l'abrogation du service civil ou sa révision. Cette action de protestation était encadrée par le Collectif autonome des médecins résidents (Camra). Un dispositif policier impressionnant a été déployé par les autorités pour empêcher les médecins résidents de franchir les portails du CHU et de sortir. Les résidents se sont ainsi contentés d'une marche au niveau des allées de l'enceinte hospitalière. Des policiers et des agents de sécurité ont encadré ce mouvement en les confinant dans l'hôpital, empêchant toute tentative d'atteindre les rues voisines, elles aussi barricadées par un dispositif antimarche avec des policiers armés de matraques. Les protestataires ont scandé des slogans hostiles aux menaces de la tutelle consistant en les notes envoyées aux différents directeurs de santé publique relatives à la ponction sur salaires. Une mesure qui est loin de dissuader les résidents qui ont renouvelé leur détermination à poursuivre la grève enclenchée depuis novembre dernier. Les rencontres programmées par le ministère et les différentes commissions installées «dans le cadre du dialogue» sont loin de constituer un gage de bonne volonté. «Marre des promesses et des commissions ! Marre des revenez après !» scandent les carrés de jeunes médecins qui ont fait preuve d'une organisation sans faille. Ces jeunes médecins résidents venus des différentes structures ont exprimé leur «détresse» devant le manque de moyens «rendant la prise en charge des malades impossible». «Désolés, malades, c'est ce que veut notre gouvernement !» répètent-ils. Ces médecins ont donc dénoncé les «dysfonctionnements» dont souffre le système de santé. «Le médecin ne peut rien face à l'absence de moyens matériels ou humains. Allez au centre d'oncologie pédiatrique du CPMC (Centre Pierre et Marie Curie), le plus grand centre anticancer, vous constaterez le manque de médicaments et de produits nécessaires pour la chimiothérapie et d'équipement. Que peut faire un résident face à cette situation ? Nous voulons un changement et ce n'est pas avec les mesures de bricolage que ça va venir», soutient un résident en oncologie au CPMC ayant pris part à cette manifestation. «Il faut que le service civil soit révisé à défaut d'être abrogé. Il nous faut des mécanismes pour permettre aux médecins de procéder au regroupement familial pour les conjoints et enfants, comme c'est le cas pour tous les fonctionnaires», souligne le même résident. Les protestataires ont exprimé une nouvelle fois leur revendication relative au service militaire. «Résident mais pas insoumis», lit-on sur les affiches brandies. «Nous dénonçons la mesure discriminatoire excluant les résidents de la dispense du service militaire après l'âge de 30 ans. S'il y a un besoin de main-d'œuvre, l'institution a la possibilité de recruter», souligne le Dr Kabache, résident à hôpital Aït Idir à Alger. L'occasion également d'exprimer le rejet de l'avant-projet de loi sur la santé. Ce texte signifiera la mort de certaines spécialités, dénoncent les résidents. «Le texte dresse des conditions irréalistes pour certains spécialistes pour pouvoir exercer, comme c'est le cas pour les biologistes ou pharmaciens qui doivent réunir 5 autres monospécialistes pour pouvoir ouvrir un cabinet. C'est impossible dans les wilayas de l'intérieur du pays», souligne le Dr Ali Fodhil, résident en biologie au CHU de Bab El Oued. «Nous sommes épuisés par le non- aboutissement de nos requêtes pour le bon fonctionnement de nos structures. Nos hôpitaux ne fonctionnent pas dans les normes», dénonce Khaled Ferdjouk, représentant des résidents de Béjaïa. C'était aussi l'occasion de rendre hommage au docteur Djamel Abache, résident qui exerçait à Oran, décédé jeudi dernier. Le Camra a exprimé son indignation face à l'empêchement des résidents de rejoindre la capitale et dénoncé les agissements des forces de l'ordre «qui ont embarqué des confrères durant la soirée d'hier sans aucune raison alors qu'ils ont tout simplement fait le déplacement de loin pour assister au sit-in national». Des résidents ont été empêchés de prendre le train Annaba-Alger, dénonce le syndicat. Le Camra a eu droit à l'expression par les résidents de leur solidarité et de leur détermination à «poursuivre le mouvement de protestation jusqu'au bout», malgré les menaces de ponctions sur salaire. Les examens continuent d'être boycottés. Le Camra qui appelle à la poursuite de la grève rencontrera aujourd'hui les représentants du ministère de la Santé. Les résidents ont prévu de poursuivre la rassemblement à l'intérieur de l'hôpital durant la nuit.