Polémique Dans un communiqué envoyé à la presse, le secrétaire général de la Coordination des lycées d'Alger (CLA) a fustigé ceux qui dénoncent les enseignants engagés dans les cours payants. Nous nous sentons interpellés et pour cause, nous n'avons pas cessé de signaler les risques de dérive d'une telle pratique. Nos arguments reposent sur des précédents graves, des cas précis d'entorse à la morale professionnelle. Sans oublier que le bachotage quantitatif est source de perversions pédagogiques. Quel bénéfice retirer d'un cours dispensé dans les mêmes conditions (voire pire) que celles vécues dans la salle de classe ? Le phénomène des cours payants a gangrené le système éducatif égyptien au point où le Président Moubarak est monté au créneau. Dans ce pays, il y a une belle unanimité pour dénoncer les pratiques maffieuses d'une certaine catégorie d'enseignants. La lecture des subterfuges utilisés par ce type d'enseignants pour contraindre ses élèves nous donnent à voir des scènes de violence morale et parfois physique. Quitte à froisser la susceptibilité de nos collègues, rien ne nous empêche de dire que l'importation du triste modèle égyptien ne soit pas une réalité chez nous. Plus particulièrement dans les grandes villes pour des raisons évidentes. Des témoignages édifiants ? Nous les enregistrons au quotidien. (Voir Tribune des parents). Dans le même document, le CLA appelle à un débat. Une bonne chose à condition que soient abordés deux points essentiels : les causes de la prolifération des cours payants et la nécessité d'un code d'éthique et de déontologie pour la profession. Un tel débat ne doit pas être parasité par les conditions matérielles précaires que vit la grande famille de l'éducation – et pas seulement les enseignants. Ce cas précis relève de la responsabilité exclusive des syndicats et il est de notre devoir de les soutenir dans leur noble mission. Témoignage En colère, un parent d'élève est venu nous rendre visite, accompagné de sa fille (nous la nommerons Aldjia), élève en 3e année moyenne dans un collège huppé des hauteurs d'Alger. Cette dernière nous relate le vécu de sa classe soumise au diktat de son professeur de mathématiques. Des élèves parmi les plus faibles dans cette discipline, totalement effacés en cours, le trimestre durant, se retrouvent avec des notes mirobolantes en devoir surveillé et en composition. La solidarité des élèves n'étant pas un vain mot, l'une des camarades de Aldjia accepte de lui livrer le secret de ses résultats. Elle lui apprend une chose inimaginable pour un esprit sain. Les sujets donnés en composition et en devoir ont été déjà abordés et corrigés par leur professeur au cours des leçons de soutien que les élèves achètent. Le père a refusé de mentionner le nom de ce professeur par peur de représailles. Et nous le comprenons. A la virgule près, ce témoignage s'apparente à ceux des parents égyptiens, tels que relatés dans une retentissante enquête publiée par Alhram Hebdo et repris par un confrère algérien (Le Quotidien d'Oran - mai 2006). Et si on offrait une tribune pour les élèves victimes de tels agissements ? Un livre réquisitoire à nous tuer de honte : un discrédit sur notre beau métier.