Décédé le 28 novembre dernier à Constantine, Mohamed-Salah Touache est parti dans l'indifférence totale. L'artiste, qui vivait dans la solitude depuis son retour d'Alger après une carrière de 24 ans au TNA, souffrait d'une ingratitude qu'il lui arrivait d'évoquer avec une profonde amertume. L'enfant de Souika où il est né le 31 décembre 1919, dans la rue Benzegouta (ex-Morland), à quelques pas de la mosquée de Sidi Afane, a montré un engouement particulier pour le théâtre grâce à un menuisier qui avait été son parrain. Un certain Hocine Bellal, l'un des premiers militants de l'Etoile nord-africaine à Constantine. En 1936, alors qu'il n'avait que 17 ans, Mohamed-Salah Touache intègre la troupe d'El Hilel El Fenni El Qacentini, dirigée par El Guermi Kholassi puis par Belokki, avec pour directeur artistique le regretté Mohammed-Salah Khebchache. Une année plus tard, il fondera sa propre troupe où il fit jouer pour la première fois une femme sur scène, Cherifa Widad, dont il fit la connaissance à Alger lors d'une visite à son ami Khelifi Ahmed. La troupe a donné son premier spectacle la même année au cinéma Cirta avec pour invité Rachid Ksentini qui présenta pour sa première visite à Constantine sa pièce Bouberma. La première pièce écrite et réalisée par Mohamed-Salah Touache est intitulée El guezane ouel oum Saâdia. Suivront des pièces qui naîtront dans la douleur, Le calvaire de l'aveugle en 1943, Justice faite, L'embrouilleur embrouillé et les aventures de Kaci El Houari en 1946, Raouhia l'orpheline en 1947, La Fontaine verte en 1949 et Moulet Eddar en 1952. En 1955, année de la fermeture du théâtre municipal de Constantine, Touache, apprenant qu'il était recherché par la police, part pour Alger chez Abdelhamid Ababsa. C'est le chanteur Slimane Azem qui l'hébergera chez lui à Boghni avant de l'emmener en France pour des tournées artistiques. Dénoncés à la police, Azem et Touache seront incarcérés pour propagande au profit de la Révolution. Après la prison, Touache exercera divers métiers pour vivre. La date du 13 août 1962 marqua son retour sur scène avec la présentation au théâtre municipal de Constantine de la première pièce théâtrale après l'indépendance, Prise de conscience, qui a été jouée en trois actes et 25 rôles. Ce sera sa dernière apparition avant son départ pour le TNA en 1963 à la demande du regretté Mustapha Kateb où il intègre la troupe pour une carrière de 24 ans. Après sa retraite en 1987, il vivra dans la solitude jusqu'à ses derniers jours.