Malgré les brefs accrochages armés d'hier entre des hommes armés appartenant à un clan familial et des hommes de la force exécutive relevant du ministre de l'Intérieur, Saïd Siam, issu du Hamas, dans le quartier de Sabra à Ghaza , de nouveau, les Palestiniens des territoires se remettent à espérer voir les deux mouvements, le Fatah du président Mahmoud Abbas et le Hamas du Premier ministre Ismaïl Haniyeh, arriver à conclure un accord pour la formation d'un gouvernement d'union nationale. Un tel gouvernement est susceptible de leur éviter de revivre le drame de la guerre fratricide dont ils ont eu un aperçu concret avec les affrontements qui ont opposé les partisans des deux camps suite à l'annonce, samedi dernier, de la décision du président Abbas de convoquer des élections présidentielles et législatives anticipées, seul moyen, selon lui, de mettre un terme à la crise politico-économique qui sévit depuis des mois dans les territoires palestiniens. Décision immédiatement et catégoriquement refusée par le mouvement islamiste Hamas, vainqueur des dernières législatives au détriment du Fatah, au mois de janvier dernier, qui a considéré l'appel du Président comme un coup de force. Ce refus s'est concrétisé sur le terrain par des affrontements entre des militants des deux camps dans lesquels 14 personnes ont été tuées et des dizaines d'autres ont été blessées. Les combats dans les rues et les ruelles des villes et des camps de réfugiés de la bande de Ghaza étaient d'une violence et d'une brutalité choquantes. Beaucoup de citoyens, dont des femmes et des enfants, figurent parmi les victimes, ce qui a été qualifié par l'ensemble des citoyens de combats honteux. Un autre aspect de ce chaos sécuritaire a été une série d'enlèvements de militants et de personnalités responsables, par des hommes armés appartenant à l'un ou à l'autre des deux mouvements rivaux. Ils ont tous été remis en liberté après un premier cessez-le-feu intervenu dans la soirée de mardi suite à l'intervention d'une délégation composée de plusieurs factions palestiniennes dont le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), le Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP) et le Djihad islamique. Ce cessez-le-feu a été rompu lorsque deux militants du Fatah ont été tués dans un accrochage avec des forces du Hamas , mercredi, peu avant l'aube. Un 2e cessez-le-feu, proclamé mercredi par le président Abbas d'un côté et le Premier ministre Ismaïl Haniyeh de l'autre, semblait se consolider puisqu'aucun incident sérieux n'a été signalé mercredi et jeudi. A l'issue d'un entretien jeudi à Ramallah, en Cisjordanie occupée, avec le ministre italien des Affaires étrangères, Massimo D'Alema, Mahmoud Abbas a appelé une nouvelle fois les Palestiniens « à faire preuve de responsabilité et à consolider le calme dans la bande de Ghaza et dans le reste des territoires palestiniens ». Il a répété qu'il laissait « la porte ouverte, pour une période limitée, à la mise en place d'un gouvernement de technocrates » en accord avec le Hamas, en dépit de sa décision, rejetée par le mouvement islamiste, de convoquer des élections générales anticipées. « Le dialogue est le seul moyen pour résoudre nos problèmes. Il y a une certaine confusion à cause des récents événements regrettables mais il n'y a pas d'alternative au dialogue pour former un gouvernement d'union », a, pour sa part, déclaré le porte-parole du cabinet issu du Hamas, Ghazi Hamad. Jeudi , dans la ville de Ghaza, une manifestation contre l'insécurité, à l'appel de toutes les factions palestiniennes, a rassemblé des centaines de citoyens devant le siège du conseil législatif (Parlement). Seul le drapeau palestinien était agité, les bannières des différents groupes ayant été laissées de côté. « Assez de luttes, nous voulons vivre en sécurité », scandait la foule. Malheureusement, les accrochages qui se sont renouvelés hier avant l'aube, à Ghaza, entre des membres armés de la famille Doghmoche et des hommes armés du Hamas, ayant provoqué la mort d'un civil âgé de 35 ans et la blessure d'un autre, ainsi que les tirs contre le domicile de Mahmoud Zahar, ministre des Affaires étrangères issu du Hamas, qui n'ont pas fait de victimes, ont montré à quel point la trêve était fragile. Agissant de façon tribale, comme cela se produit souvent dans les territoires, cette puissante famille, dont deux membres ont été tués mercredi matin peu après la proclamation du premier cessez-le-feu, dans des affrontements avec le Hamas, aurait enlevé plusieurs membres du Hamas. De même, des combattants du Hamas se seraient emparé d'au moins 5 membres de ce clan, ont indiqué des témoins. Lorsqu'on connaît la composition tribale de la société, la quantité des armes dont disposent les simples citoyens, ces nouveaux incidents prouvent à quel point la guerre civile peut être destructrice du tissu social dans les territoires, car au-dessus de toute appartenance politique de chacun, les divergences risquent de se répercuter sur les familles, dont certaines sont beaucoup plus puissantes sur le terrain que des factions palestiniennes connues. Ainsi, quelqu'un qui tue au nom d'un mouvement ou d'un autre n'est jamais sûr de ne pas être lui même ciblé, non seulement par le mouvement auquel appartenait sa victime, mais aussi de la part de membres de sa famille. Le problème dépassera, alors, le contexte politique et on verra un chaos sécuritaire général s'installer pour de longues années, bien après la réconciliation des forces politiques qui ont été à l'origine des incidents meurtriers. Dans tout cela, Israël sera le seul vainqueur et pourra poursuivre en toute quiétude ses plans d'hégémonie sur la terre palestinienne. Une réaction consciente de l'ensemble des Palestiniens est impérative pour mettre fin à cette mascarade qui n'a que trop duré, car plus il y aura de morts, plus difficile sera le contrôle de la situation.