On se souviendra des stars bien roulées sur les marches du palais du Festival de Cannes, applaudies par des milliers de curieux, sponsorisant les marques de haute couture et de joailliers déjà milliardaires. La salle Lumière applaudissait debout l'ardente mise en scène d'Indigènes par Rachid Bouchareb, qui lui a valu une avalanche de prix pour ses acteurs. Une personnalité très forte et qui ne doit rien au style d'Hollywood, Ken Laoch, obtenait la Palme d'Or pour son film Le Vent se lève. On se souviendra de la parfaite tenue de la Mostra vénitienne et de l'euphorie générale après la projection de presse de The Queen de Stephen Frears et The Majic Flute de Kenneth Brannagh. Un Chinois (continental) Jia Zhang avait « accouché » d'une œuvre jugée capitale par le jury et reçut théâtralement le Lion d'Or. Oubliant la vivace polémique (selon laquelle Rome portait malheur à Venise si on y faisait un festival), tout le monde se rua un soir sur le documentaire de Spike Lee sur la Nouvelle-Orléans détruite et abandonnée par les autorités fédérales : A Requiem in four acts. A l'ouverture de la Mostra triomphait David Lynch avec son élégante mise en scène de Irland Empire. Au mois de juin, la Biennale des cinémas arabes (IMA) a attiré l'attention sur l'abondante et excellente production libanaise ; plusieurs films faits à Beyrouth et capables d'affronter les compétitions internationales. Mais par un tour de passe-passe habituel, les grands festivals oublient souvent de mettre le cinéma arabe en avant. Le choix des films maghrébins à l'IMA était aussi de bonne qualité. En mars 2007, l'IMA consacrera un mois entier à une grande r trospective de Lakhdar Hamina. Un événement qui mérite qu'on y revienne. Le Caire à son tour, tout récemment, a hissé les fanions du cinéma international. Cela sautait aux yeux que l'Asie battait les autres continents. Mais au Caire, le plus honnête spectacle se trouvait dans les vieilles adaptations de Naguib Mahfouz. Les critiques misris, cinéphiles purs et durs, ont beaucoup moqué certaines nouvelles productions locales, des sous-produits de télévision égarés sur grand écran. Sans Chahine (aujourd'hui souffrant), le cinéma égyptien a-t-il atteint son crépuscule ? Au mois d'octobre, à Rome, une floraison de films à commencer par La Bataille d'Alger, en hommage à son réalisateur disparu Gillo Pontecorvo. Au Parco Della Musica, un festival venait de naître. Gros budget et organisation impeccable. Un film dur et sombre de Martin Scorsese The Departed faisait courir les foules. Une réflexion sur le pouvoir et la loyauté. Un remake d'un thriller de Hong Kong, avec le « Scorsese Speed Touch » : des plans qui se succèdent à un rythme d'enfer. Jack Nicholson joue un mafiosi qui fait monter la peur sur New York. Il y a des rapports douteux entre lui et la police (Leonardo Di Caprio, Matt Damon, Martin Shean). La morale, selon Scorsese, c'est qu'il ne faut jamais se fier aux apparences. Un autre film sur Napoléon, qui a volé tout ce qu'il a pu voler à Rome et à Venise, y compris les symboles des deux villes, était au programme avec en apothéose, l'alléchante apparition de Monica Bellucci. La perspective de s'approcher de la diva engendrait panique, chaos et bousculades...