L'année 2006 s'achève sur une note plutôt mitigée pour l'Unique qui laissera à ses (fidèles ?) téléspectateurs une impression d'inachevé. C'est bizarre, mais quand on veut bien se donner la peine de meubler ses soirées en regardant, à travers les trois chaînes alternatives, le programme national, on repart toujours avec le sentiment d'avoir cédé quelque part à un caprice qui se traduit inévitablement par une grosse frustration. Soit que les émissions, dans leur grande majorité, sont mal conçues et donc manquent forcément d'attrait, soit elles sont carrément inadaptées au timing dans lequel elles ont été confinées et font office par conséquent d'un simple remplissage de la grille. Il faut à ce propos avoir, par exemple, une sacrée dose de courage pour passer sa soirée avec une émission de jeux de plage d'été (alors que l'hiver bat son plein) destinée à un public exclusivement d'ados, ou une table ronde économico-politique traînant en longueur, qui demande une grande concentration pour les sujets importants qui sont traités et qui, de toute façon, s'adresse à un auditoire averti. Entre une super émission de divertissement version grand spectacle ou un match de coupe d'Europe qui passent sur une chaîne étrangère et le documentaire sorti d'un autre temps proposé sur le même créneau horaire par l'Unique, le choix ne se pose pas. Déjà, d'un point de vue de la simple programmation, c'est un désastre. A y regarder de plus près, il y a comme une négligence coupable à se désintéresser précisément des choix et des goûts que peuvent avoir les téléspectateurs algériens qui persistent encore à accorder leur confiance au petit écran national. Ces choix sont multiples. Ils touchent à la politique, à la culture, au sport... Au même titre que le public européen, asiatique, arabe ou américain, l'Algérien veut être informé avec le maximum d'objectivité sur les événements qui rythment sa société et sa vie ; il veut aussi satisfaire sa curiosité en s'ouvrant sur le monde moderne et se divertir sainement quand, le soir tombé, il se retrouve face à la télé, son principal pourvoyeur de distraction. L'Unique arrive-t-elle à répondre à tous ces impératifs de consommation télévisuelle qui sont énormes et complexes et surtout difficiles à maîtriser ? Rien n'est moins sûr... et il n'y a qu'à se référer aux opinions négatives que sa trop grande morosité ambiante suscite pour s'en convaincre. En fait, les manques sont flagrants. En refusant toujours de faire l'effort de s'ouvrir sur la politique, la vraie, celle qui éveille les consciences à travers le débat contradictoire et que des émissions comme le Forum de l'ENTV essayent grossièrement de pallier, la télé nationale se démarque totalement des exigences de son public dont la mentalité et la vision ont beaucoup évolué depuis ces deux dernières décennies. Le citoyen algérien que l'Unique tente de prendre en otage sait parfaitement faire la part des choses entre le discours de propagande véhiculé par l'information officielle et l'expression libre des idées qui sont nécessaires à la construction d'une société multipartite. La lucarne nationale demeure monopole des sphères du pouvoir et des partis qui sont à leur service, comme le FLN ou le RND, autant dire qu'elle n'est pas près de faire sa mue pour sortir d'un système de communication que les Algériens trouvent aujourd'hui archaïque et non productif. Si on devait faire un bilan même subjectif de l'activité télévisuelle fournie par l'Unique en cette année 2006, on se résoudra à relever en premier l'absence totale d'originalité qui a fini par lui enlever encore une part importante de son public. Ce fut une année plate qui n'a été marquée par aucun fait extraordinaire. Le cinéma et le théâtre restent toujours les parents pauvres du programme. La musique et la chanson, en sombrant dans l'effet répétitif, ne sont pas mieux loties même si elles paraissent constituer des créneaux faciles à investir. Les émissions culturelles de niveau sont rares et ce n'est pas Expression Livre ou Je dis Culture qui pourront sauver la mise. Le coin des ados et des enfants, lui aussi squelettique, n'arrive pas à trouver sa voie. En faisant dans le n'importe quoi, il souffre d'une vision adaptée au message qu'on veut adresser à ces deux catégories d'âge. Le divertissement, tel qu'on le conçoit et tel qu'il est pratiqué ailleurs, s'essouffle à l'image de Saraha Raha qui sombre lamentablement dans la routine. Constat trop dur pour l'Unique ? Peut-être mais ce n'est sûrement pas complaisant. C'est aussi parce qu'on l'aime qu'on se permet de la châtier en espérant un jour que les critiques qui lui sont faites l'aideront à sortir de la médiocrité et de ... l'autosuffisance.