L'industrie laitière tant à Mila qu'à l'échelle nationale va au devant d'une faillite certaine si l'Etat n'intervient pas en urgence pour réajuster le prix du lait reconstitué pasteurisé. La sonnette d'alarme vient d'être tirée par l'association (en constitution) d'un groupe d'industriels laitiers basé à l'est du pays, à savoir Eurl Grouz de Oued Athmenia, dans la wilaya de Mila, Safilait et la Laiterie Rhummel dans le Constantinois. Cette montée au créneau est vite relayée par l'association nationale des industriels laitiers (elle aussi en constitution) domiciliée à Alger qui vient, par le biais d'une correspondance réquisitoire transmise au chef du gouvernement, s'insurger contre l'ostracisme des « décideurs » face au spectre de la fermeture qui guette leur activité. Selon les termes du document, certaines laiteries, à l'exemple de Stilina et Rhumel dans le Constantinois « auraient sinon déjà déposé leur bilan, du moins envisagé de le faire à court terme ». Le secteur de la transformation industrielle du lait pasteurisé, produit régi par la politique du prix administré conformément aux décrets exécutifs de 1996 et de 2001 fixant à 20 puis à 25 DA/litre risque tout bonnement de mettre la clé sous le paillasson, avec ce que tout cela suppose comme incidences graves sur le consommateur si les pouvoirs publics n'interviennent pas pour ajuster ledit « prix administré ». Et comme si cette disparité de prix ne suffisait pas au désarroi de la corporation, voilà qu'un autre décret exécutif portant le n° 01-50 et daté du 12 février 2005 tombe tel un couperet et, à défaut d'un réajustement rationnel du prix de vente du sachet du lait reconstitué pasteurisé, maintient celui-ci à 25 DA. « Une pure aberration eu égard à l'évolution du prix du lait en poudre sur les marchés internationaux atteignant les 2400 euros/tonne, soit une augmentation de 40% à la tonne à laquelle s'ajoutent, à l'évidence, l'impact induit par le relèvement du Smig, les charges d'exploitation, les intrants etc. », s'offusque le patron de Eurl Grouz, M. Benhacine. Entre 2001 et 2006, période durant laquelle le litre de lait reconstitué a été gelé administrativement, la poudre de lait est passée de 121 000 DA/tonne après dédouanement à 227 604 DA, donc un accroissement du prix à la tonne de 88%. Toujours selon notre interlocuteur, la fabrication d'un litre de lait reconstitué nécessite 85% de poudre de lait, d'où la norme d'utilisation de 112 g de poudre pour reconstituer 1 litre de lait vendu à 23,35 DA (prix de quai), ceci d'une part. D'autre part, martèle-t-on, la prise en compte de tous les inputs : matière première, pochette film, énergie, masse salariale et autres charges, relèverait le prix de revient réel à au moins 32,96 DA le sachet de lait. Plus concrètement, les professionnels de la transformation du lait seraient, d'un avis unanime, « en train de perdre au moins 2 DA par sachet vendu ». Si tel est le cas, jusqu'à quand peuvent-ils tenir le coup ? De là à dire que la filière lait et le consommateur avec, encourent, au plan national, de sérieuses perturbations et de fâcheuses répercussions, il n' y a qu'un pas à franchir.