Monsieur le Président ; Depuis plus de trente ans, le Sahara occidental est illégalement occupé par le Maroc sur lequel il ne dispose pas de souveraineté. Cette vérité historique a été confirmée par la Cour internationale de justice ainsi que par les multiples résolutions des Nations unies qui préconisent le droit inaliénable du peuple sahraoui à décider librement de son destin. Le Maroc, en envahissant le territoire du Sahara occidental, s'est placé en dehors de la légalité internationale. Après avoir contrarié puis rejeté le référendum d'autodétermination du peuple sahraoui, tel que recommandé par toutes les résolutions et les plans de règlement élaborés à cet effet, le Maroc a franchi une nouvelle étape dans sa politique annexionniste et d'escalade, opérant un nouveau coup de force effronté, en présentant unilatéralement un projet de pseudo solution d'autonomie régionale qui ne vise rien d'autre qu'à maintenir sous son joug le Sahara occidental. Le Maroc s'arroge ainsi le droit même de décider du sort du territoire en lieu et place et de la communauté internationale et surtout du premier concerné, le peuple sahraoui. Le projet que le Maroc promeut et tente, par tous les moyens, de faire endosser par les membres du Conseil de sécurité est non seulement illégal, car violant les résolutions de l'ONU, mais également irresponsable car portant les germes de déstabilisation de l'ensemble de la région. Il s'agit d'une agression caractérisée contre le droit qui engendrerait une situation grave, incontrôlable, qui mettrait en péril la stabilité, les perspectives de paix et de coopération dans la région, et soumet à rude épreuve les relations euro-maghrébines. Le Front Polisario, Monsieur le Président, rejette ce projet d'« autonomie » et le considère comme nul et non avenu, car il ne vise, en fait, qu'à perpétuer le fait accompli colonial ; au moment où la communauté internationale, et son émanation, l'ONU, ne cesse de faire valoir le droit a l'autodétermination et à la liberté des peuples. Monsieur le Président, c'est avec étonnement que nous avons pris connaissance de la déclaration par laquelle vous avez qualifié ce projet de « constructif » alors qu'il bafoue le droit à l'autodétermination, piétine la légalité internationale. Une telle prise de position ne peut être perçue que comme une caution à la politique d'occupation illégale marocaine, et met ainsi la France dans une situation paradoxale. On ne peut en effet comprendre, et avec nous la communauté internationale, qu'un pays membre permanent du Conseil de sécurité, garant de la légalité internationale et de la paix dans le monde, puisse apporter son soutien à une manœuvre qui consacre l'occupation et le déni de justice fait au peuple sahraoui, faisant prévaloir ainsi le droit de la force au détriment de la force du droit. Monsieur le Président, le peuple sahraoui se fait une grande idée de la France, pays de la déclaration universelle des droits de l'homme. Il a suivi, ces dernières années, les positions affichées par la France dans les forums internationaux en faveur d'un monde plus juste, plus équitable. Nous sommes conscients du rôle de votre pays dans le règlement des conflits qui déchirent de nombreuses régions du monde, comme nous croyons aux actions de la France pour faire de l'ONU l'instrument de régulation dans les relations internationales. Mais, nous ne pouvons comprendre que cette France là dénie à un peuple en lutte l'exercice de ses droits légitimes. Cette France porteuse de valeurs universelles, qui se veut attachée à la légalité internationale, ne peut se renier. Monsieur le Président ; Votre expérience des affaires internationales et votre grand intérêt pour le Maghreb auraient dû vous conduire à jouer un rôle constructif dans le règlement juste et définitif du problème du Sahara occidental en agissant pour le droit à l'autodétermination de son peuple. Vous ne saurez ignorer que dans sa politique de fuite en avant, le Maroc porte un coup sévère aux efforts déployés par la communauté internationale, notamment les Nations unies dans sa recherche d'une solution pacifique à l'un des plus vieux problèmes de décolonisation de la planète. En soutenant les desseins du Maroc au Sahara occidental, sachez Monsieur le Président que vous faites porter à votre pays une lourde responsabilité dans l'exacerbation des tensions dans la région. Là où on attendait que la France contribue à faire cesser les exactions contre des populations civiles désarmées qui manifestent sur leur territoire, le Sahara occidental, leur aspiration à être libres, voilà que vous risquez d'associer le nom de la France à une opération de dépossession et de spoliation de tout un peuple. Nous voudrions croire, Monsieur le Président, que la sagesse et le sens de la justice prévaudront, et que la France prenne conscience de la nécessité d'agir autrement au Sahara occidental. Elle peut, si telle est sa volonté, se ranger du côté de la légalité en incitant au respect du droit du peuple sahraoui à l'autodétermination ; ce qui permettra à celui-ci, n'en doutons pas, de vivre en bonne intelligence avec ses voisins, à commencer par le Maroc. En agissant comme tel, sachez Monsieur le Président que l'Histoire vous retiendra d'avoir apporté une contribution inestimable à l'avènement d'une nouvelle ère de paix, de stabilité et de coopération dans notre région, et à la dynamique des relations entre l'Europe et le Maghreb. Les peuples d'Afrique et du monde vous en sauraient gré. En attendant, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Président, l'expression de notre haute considération. Birlehlou le 11 février 2007 Mohamed Abdelaziz, Président de la RASD