Plus de huit millions d'Algériens n'ont jamais mis les pieds dans une vraie salle de cinéma. » Le constat pourtant amer de Yacef El Hocine, homme de cinéma et premier responsable de la boîte audiovisuelle AVI Productions, ne le rend pas pour autant défaitiste. Depuis dix ans, il nourrit l'espoir de réaliser une chaîne de salles multiplexes à travers le pays pour « faire renaître la magie du cinéma », dit-il. L'espoir commence à prendre forme : Yacef lance Cinéplex, une nouvelle société adossée à AVI Productions, en partenariat avec des investisseurs étrangers pour prendre en charge l'étude et la réalisation d'une cinquantaine de multiplexes. Il s'agit de complexes de trois salles de projection en 35 millimètres ou en numérique, pouvant accueillir entre 200 et 450 spectateurs chacune (et 800 pour les salles dans les grandes villes). Salles polyvalentes ouvertes aux spectacles de théâtre, de musique ou aux vidéo-conférences ainsi qu'aux tournées des semaines culturelles nationales ou étrangères. « Des projets intégrés », précise M. Yacef : chaque multiplexe devra contenir une galerie d'art, une librairie, un centre multimédias, des espaces de loisirs pour enfants, des commerces et des parkings d'une capacité de 500 véhicules. « L'ambition est de réaliser deux à trois multiplexes par wilaya. Le désenclavement culturel de l'intérieur du pays est une priorité à mes yeux », explique M. Yacef. Il dévoile que, d'ores et déjà, le ministère de la Culture s'est montré particulièrement bienveillant à l'égard de ce projet dont la réalisation - la construction des unités devra s'initier simultanément - prendrait de deux à trois ans maximum. « Avec l'existence d'un tel réseau de salles respectant les standards internationaux et modernes, soutient-il, les distributeurs algériens de films et leurs partenaires étrangers trouveront des espaces adéquats pour la meilleure exploitation possible des dernières nouveautés du box-office mondial. » M. Yacef rappelle que le tarissement du réseau de distribution de films, à partir des années 1970, avec l'installation du monopole d'Etat, a été une des raisons de la disparition progressive des salles de cinéma. « En 1963, l'Algérie possédait 380 salles. En 2007, il en existe à peine une trentaine. Et dans quel état ! », lance M. Yacef. Son projet veut donc inverser la donne. « Et cela coûtera nettement moins cher que de rénover des salles anciennes », ajoute le promoteur. Le directeur général de Cinéplex propose, d'ailleurs, dans une vision plus globale, que les salles « rescapées » soient transformées en salles de cinéma d'art et d'essai pour les quartiers, sous la supervision des directions de wilaya de la culture. « Il faudrait également booster les cinémathèques, conclut-il, pour créer une dynamique d'éducation cinématographique pour les jeunes en particulier. »