Le quartette, réuni mercredi dernier à Berlin, a semblé divisé quant à l'attitude à prendre vis-à-vis du gouvernement d'union nationale que les Palestiniens s'attellent à mettre en place suite à l'accord de La Mecque conclu entre le Fatah et le Hamas. Auteur de la feuille de route, dernier plan de paix international pour le Proche-Orient — elle devait se concrétiser par la création d'un Etat palestinien vivable aux côtés d'Israël avant la fin de l'an 2005, mais elle est restée lettre morte durant des années à cause de la violence ininterrompue dans les territoires —, dont c'était la 2e réunion en trois semaines, après celle de Washington, le quartette a tout de même formulé les trois exigences, déjà évoquées, pour toute coopération avec le futur gouvernement palestinien. « Le Quartette a réaffirmé sa déclaration concernant son soutien à un gouvernement palestinien qui s'engage pour la non-violence, la reconnaissance d'Israël et l'acceptation des accords et engagements précédents, y compris la feuille de route », a souligné M. Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, reprenant ainsi les trois principes déjà énoncés lors du précédent sommet, tenu le 2 février. Le quartette avait imposé un embargo international au gouvernement palestinien sortant, formé par le Hamas le 25 mars dernier, suite à sa victoire aux dernières législatives. Cet embargo mené par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël, qui considèrent le mouvement islamiste Hamas comme une organisation terroriste, a privé les Palestiniens des aides directes, octroyées, jadis, par l'Occident, ce qui a plongé les territoires dans une grave crise politico-économique. Cette situation a dégénéré ces derniers mois en combats meurtriers entre partisans des deux mouvements Hamas et Fatah, dont le chef, le président Mahmoud Abbas, qui a toujours prôné les négociations pacifiques et directes avec l'Etat hébreu comme moyen de règlement du conflit israélo-palestinien, restait le principal interlocuteur palestinien acceptable pour la communauté internationale. La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice qui a participé à cette réunion alors qu'elle venait de conclure un périple, qualifié d'échec au Proche-Orient a, en somme, répété les positions américaine et israélienne déjà évoquées suite à la réunion tripartite, tenue lundi passé à Jérusalem Ouest, à laquelle participaient en sa présence le président Abbas et le Premier ministre Ehud Olmert. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, partisan de la levée des actuelles restrictions économiques et financières, a toutefois affirmé lors de la conférence de presse finale commune qu'« il était simplement erroné de parler d'un boycott », insistant par le soutien apporté par le Quartette aux efforts palestiniens. Le Haut Représentant de l'Union européenne pour la politique extérieure Javier Solana, qui participait aussi à la réunion, a une nouvelle fois appelé les Palestiniens à choisir le chemin de la paix. « J'espère beaucoup que le gouvernement d'unité nationale fera partie de la solution et non du problème », a-t-il dit. Le gouvernement palestinien sortant, issu du Hamas, a relevé jeudi un « changement » positif dans la position du Quartette. « Nous considérons avec intérêt les déclarations du Quartette après sa réunion à Berlin et nous estimons qu'un changement, susceptible d'ouvrir des perspectives pour une coopération, est intervenu dans sa position », a affirmé dans un communiqué le porte-parole du gouvernement Ghazi Hamad. « Le soutien du Quartette à la formation d'un gouvernement palestinien d'union et le non-recours au langage du boycott et de l'embargo constituent une évolution de sa position et nous espérons que cela aboutira à une pleine coopération », a-t-il ajouté. Le président Abbas, qui a fait face à d'énormes pressions lors de la réunion trilatérale de Jérusalem Ouest de la part des Israéliens et des Américains qui semblent plutôt mécontents du rapprochement des deux principaux mouvements palestiniens et qui souhaitaient voir les territoires sombrer dans une guerre civile meurtrière sans fin, poursuit sa défense farouche des accords signés le 8 février à La Mecque, qui ont ouvert la voie à la formation d'un cabinet d'union nationale. Le président Abbas a entamé mercredi dernier une tournée européenne qui l'a mené au Royaume-Uni où il a rencontré le Premier ministre Tony Blair et auquel il a demandé de persuader les Américains de soutenir le cabinet d'Union nationale. En Allemagne, qui préside actuellement l'Union européenne, Mahmoud Abbas s'est déclaré optimiste de voir une levée prochaine de l'embargo international. La France, sa dernière destination européenne, a lancé un appel pour le soutien du président Abbas. Si l'Europe, à l'image d'Israël et de son allié américain, poursuit son attachement à exiger du nouveau gouvernement palestinien, une reconnaissance explicite de l'Etat hébreu, que l'accord de La Mecque reconnaît implicitement, il est à craindre que l'embargo et ses retombées désastreuses sur la situation dans les territoires palestiniens durera longtemps encore.