Après la pollution de l'air, la pollution des eaux de surface et des eaux souterraines est un autre motif d'inquiétude. La direction de l'environnement à la wilaya se veut rassurante. « Le cabinet libanais chargé de l'étude d'impact a procédé à l'intérieur de la décharge à 10 forages à 30 m et 32 sondages à 5 m. A l'extérieur, l'eau a été analysée grâce à 3 forages. La nappe n'est pas polluée, assure Souhila Ladjerem, ingénieur chargé du dossier de la gestion des déchets solides urbains à la wilaya. Parce que la topographie du site, en plaine, a permis de garder les lixiviats (jus des déchets) dans leur périmètre. Et parce que le sol, argileux, a protégé la nappe. » Malheureusement, plusieurs éléments conduisent à en douter fortement. A commencer par le manque de transparence sur ces fameuses analyses. Aussi rassurants que soient les résultats, personne ne tient à nous les communiquer. Autre motif de doute : les conclusions des mémoires de fin d'études trouvés à la bibliothèque de l'Ecole polytechnique d'Alger. « Le nouveau site de Oued Smar, choisi suite à la fermeture de la décharge saturée de Baraki, n'a pas fait l'objet d'une étude géologique et hydrologique détaillée du site, et on s'est contenté du fait que le sol soit argileux, peut-on lire dans un des rapports. Or d'après les caractéristiques des coupes lithologiques des forages et les mesures de perméabilité réalisées, on peut dire que le sol de la décharge de Oued Smar est semi-perméable. » La nappe souterraine pourrait être naturellement protégée, mais du fait que la décharge soit ouverte depuis 1978 et qu'elle reçoive toutes sortes de déchets sans aucun contrôle, les risques de pollution augmentent en permanence. D'autant que le pouvoir épurateur de la nappe est sûrement limité dans le temps. Une autre étude, réalisée à l'université des sciences et de la technologie Houari Boumediène en 2002, a démontré la pollution des eaux situées dans les décharges publiques de Oued Smar et Ouled Fayet grâce à la technique de la chromatographie en phase gazeuse (CPG). « Les riverains qui habitent à presque 1 km des décharges et qui utilisent les eaux des puits boivent une eau fortement polluée et très dangereuse pour leur santé, est-il rapporté. Et les agriculteurs arrosent leurs terres avec une eau suspecte. » Ce qui signifie certainement contaminée. Enfin, d'après André Picot, toutes les études de sol menées aux abords des décharges révèlent quasi systématiquement « la présence de métaux dits ‘'lourds'' — mercure, plomb, cadmium...— que l'on considère maintenant comme des métaux traces toxiques, c'est-à-dire très toxiques à faibles doses pour tous les organismes vivants. Le sol a beau être argileux, il ne peut pas tout retenir, et surtout neutraliser leur forte activité toxique. On trouve aussi de l'arsenic et des sels de chrome hexavalent. Tous sont cancérogènes pour l'homme à faibles concentrations. Ce serait bien étonnant que cette décharge, compte tenu de la nature des déchets stockés, fasse exception... »