L'Algérie met officiellement un terme aux informations colportées, ces derniers temps, par les médias faisant état d'un projet de création d'un commandement ou parfois d'existence même de bases militaires américaines sur son territoire. « L'Algérie n'acceptera pas l'installation sur son territoire de bases militaires quel que soit le pays auquel elles appartiennent », a déclaré, hier, le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui. Le ministre, qui était l'invité de « La Rédaction », l'émission de Souhila El Hachemi, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, a souligné qu'« aucun pays n'a formulé une demande dans ce sens auprès des autorités algériennes ». Interrogé sur la décision des Etats-Unis d'implanter un commandement régional spécifique pour l'Afrique dans le cadre de la lutte antiterroriste, le ministre a indiqué : « Je n'ai pas été saisi à ce sujet. » Il ajoute que si cela était le cas, « la réponse aurait été négative parce que nous considérons que la présence de telles bases sur notre sol est incompatible avec notre souveraineté nationale et notre indépendance ». M. Bedjaoui a noté que la décision des Etats-Unis d'implanter un commandement régional en Afrique est « une décision propre aux Etats-Unis », non sans omettre de rappeler que l'Algérie mène avec ce pays une « coopération tout à fait féconde en matière de lutte antiterroriste ». En visite la semaine dernière en Algérie, la sous-secrétaire d'Etat américaine pour la diplomatie publique, Mme Karen Hughes, a indiqué que « l'Afrique et l'Afrique du Nord sont des régions très importantes et cette section d'Afrique nous permet de nous rapprocher et d'avoir une meilleure interactivité avec les populations de ces régions ». Mme Hughes a qualifié d'« excellente » la coopération algéro-américaine, précisant qu'elle concernait les domaine de la sécurité, de l'éducation et l'économie. Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, avait, rappelons-le, annoncé le 6 février dernier devant la commission sénatoriale des forces armées que le président Bush a ordonné la création d'un centre de commandement militaire spécial pour l'Afrique, d'ici septembre 2007, afin de prévenir l'implantation de groupes terroristes au Sahara et au Maghreb. Si, officiellement, ce commandement spécial sera chargé de développer la coopération militaire américaine avec les pays africains et de mener des opérations militaires si nécessaires, l'endroit de sa mise en place n'est pas encore connu. « L'Algérie n'acceptera pas en tout cas de bases américaines sur son territoire », insistera M. Bedjaoui, démentant les informations répercutées à chaque fois par les médias quant à la présence de ce type d'installations américaines au sud du pays. De telles informations, pour rappel, ont été déjà démenties, en mars 2004, aussi bien par les autorités algériennes que par l'ambassade américaine à Alger. Or, le déploiement US à caractère sécuritaire en Afrique n'est plus, aujourd'hui, une simple vue de l'esprit. En juillet 2005, l'hebdomadaire satirique français Le Canard enchaîné révélait que « quelque 400 hommes des forces spéciales américaines se trouvent dans une base militaire US installée près de Tamanrasset pour combattre le terrorisme ». La même source rapportait que « les militaires américains ont installé sur leur base en Algérie une station d'écoute qui leur permet de capter toutes les communications par téléphones fixe et portable, par satellite et par fax en Afrique subsaharienne ». En novembre de la même année, une délégation de gardes-côtes américains avait visité l'Algérie et s'est rendue aux ports d'Alger, d'Oran et de Skikda dans le cadre d'une mission d'observation et d'échanges sur la sécurité portuaire, le transport et la sécurité maritime. Le 21 mars 2005, des manœuvres ont été organisées en haute mer entre la marine algérienne et une unité navale de l'OTAN dans le cadre de l'opération d'interdiction maritime (Active Endeavour). Les Etats-Unis sont officiellement intéressés par un partenariat militaire avec l'Algérie, avait indiqué le secrétaire américain adjoint à la Défense pour la sécurité internationale, Peter W. Rodman, au terme d'une visite à Alger, en novembre 2006. Il avait évoqué le dialogue militaire, les relations stratégiques et la coopération de haut rang entre les deux armées. Sur un autre registre, à propos de l'édification de l'Union du Maghreb arabe (UMA), M. Bedjaoui, pour qui cette question « constitue un choix stratégique pour l'Algérie », a soutenu que l'Algérie « n'est nullement responsable de son blocage ». « On tente de faire accréditer l'idée que c'est peut-être le problème du Sahara occidental qui entrave ce processus d'édification maghrébine, mais nous avons une preuve que ce n'est pas le cas, car nul n'ignore que le problème sahraoui existait déjà avant la création effective de l'UMA », a-t-il expliqué. « Notre pays a toujours inscrit sa position sur cette question dans le cadre des efforts de la communauté internationale et espère qu'on lui trouvera une solution conforme à légalité internationale, c'est-à-dire conformément au droit du peuple sahraoui à l'autodétermination », a-t-il encore insisté. Interrogé sur l'évaluation de l'accord d'association avec l'Union européenne, ratifié en septembre 2005, le ministre des Affaires étrangères a indiqué qu'un bilan a été fait avec l'UE et qu'une première session du conseil d'association s'est également tenue. Cela a permis à chacune des deux parties d'exposer son évaluation et d'exprimer ses priorités. « Cela se passe très bien. Un procédé à tous les ajustements nécessaires est en cours de route », a-t-il affirmé, indiquant qu'aujourd'hui, « l'accord sur le plan commercial concerne plus de 2000 produits ayant trait au démantèlement des barrières douanières ». Quant au sujet de la circulation des personnes, le ministre a fait état d'une « certaine amélioration ». M. Bedjaoui estime que son département continuera à travailler pour « convaincre les Européens à procéder à l'assouplissement des formalités relatives au visa Schengen ou autre ».