L'Occident ne jure plus que par le colonel Kadhafi. Le guide de la Jamahiriya attire désormais tous les éloges, lui qui, il y a peu encore, était voué aux pires gémonies. Il devient aujourd'hui fréquentable et son pays, la Libye, est une étape obligée pour les investisseurs étrangers qui se bousculent au portillon pour enlever de mirifiques contrats. La Libye est, maintenant qu'elle a fait son retour dans le concert des nations, un pays où s'ouvriront les grands chantiers nécessaires aux réformes qu'entend engager le colonel Kadhafi. Le dirigeant libyen bénéficie, dans ce retour en grâce internationale, de concours de circonstances aussi particulièrement favorables que la hausse phénoménale du prix du baril de pétrole qui lui donne encore plus les moyens de sa politique. Ceux aussi de mieux faire entendre sa voix. Les chefs d'Etat et de gouvernement se relaient chez le guide libyen qui, à ce rythme, en viendra à refuser du monde. Car il est désormais sollicité de partout et lui, qui passait il n'y a pas longtemps encore pour un fauteur de troubles, le voilà arbitre des conflits régionaux et, le cas échéant, médiateur à l'efficacité reconnue. Mais est-ce seulement cela qui justifie que le colonel Kadhafi ne fasse plus un pas sans soulever un tonnerre d'acclamations ? A l'évidence, le guide la Révolution libyenne est pressenti par tout ou partie de la communauté internationale pour exercer une action influente sur l'émigration clandestine, le Darfour, les prises d'otages dans les pays musulmans, entre autres urgences de l'heure. Pour sa part, le colonel Kadhafi, qui a payé ce retour en faveur le prix coûtant, réussit le tour de force de tirer son épingle du jeu dans tous les cas de figure. Car beaucoup voient dans la démarche du colonel Kadhafi une démonstration de réalisme politique puisqu'en rentrant dans les rangs, il sert les intérêts de son pays. Mais ce même réalisme politique, n'est pas absent chez les puissants du monde qui ont, eux aussi, le souci de leurs intérêts. Ce n'est pas pour l'élégance du geste que ces grands dirigeants, à l'instar de Blair, Berlusconi ou Schroeder, après Bush, prêtent toutes les vertus à un homme qu'ils ont longtemps accablé de leur agissante vindicte. Mais il est vrai qu'on ne prête qu'aux riches. Il en va de la raison des Etats comme de celle de leurs intérêts.