Pour les visiteurs avertis, cette paisible localité de la banlieue sud d'Alger mérite plus d'estime. A l'instar d'El Biar et de Bouzaréah, elle recèle beaucoup de somptueux palais datant de l'époque ottomane. Citons, entre autres, les résidences de Khaznadar, de Cheikh El Blad, Djenane Safar, Ben Négro et Kaïd El Bab. Selon G. Hamid, un chercheur en histoire, de par sa situation et la richesse de son sol, Birkhadem attirait les dignitaires ottomans. « Cet attrait s'explique par la fertilité de ses terres situées entre le Sahel et la Mitidja », a-t-il indiqué. Toutefois, les mêmes promeneurs sillonnant les différentes artères ne tardent pas à jeter leur opprobre sur l'apathie et l'ineptie des hommes qui ont été et demeurent la cause principale de la dégradation de ces édifices appartenant au patrimoine de tout un peuple. Comme pour nous le prouver, O. Hamza, membre d'une association locale, nous fait conduire au pas de course à l'endroit situé non loin de l'avenue des Frères Djilali. « Quelle horreur ! Haouch Ben Siam est complètement rasé. Sa noria disparue. Abattu, le pin, plus que bicentenaire, gît au sol, gémissant une plainte que seul son congénère, l'araucaria, qui s'élève majestueusement à côté, pourrait entendre », maugrée un ancien habitant qui nous a abordés. Et de s'interroger : « Qui doit-on implorer ? Sidi M'barek, le saint patron de la ville ? Les représentants des pouvoirs publics ? » Un peu plus haut, la résidence Ben Négro appartenait, selon notre accompagnateur, à un diamantaire proche du Dey. Cette superbe habitation, attenant à l'Institut de la formation professionnelle, présente des signes de dégradation, car elle abrite plusieurs familles. Le palais, doté d'un jardin coiffé de grappes de glycines, est entouré d'arbres. Le puits qui l'alimente ainsi qu'un ficus séculaire sont situés au sein de l'IFP. « Le directeur, M. Gacem, ainsi que son prédécesseur méritent des compliments pour avoir préservé ces vestiges », atteste notre guide. A hauteur de la gare routière, le piteux état de la magnifique villa de Kaïd El Bab (préfet de la porte) provoque plus d'écœurement. Des plaques de faïence persanes et hispano-mauresques ainsi que des briques anciennes sont jetées çà et là. Une autre pile d'azulejos authentiques, est posée au pied d'un mur. Bien que sérieusement délabrée, la villa fascine encore l'observateur. La façade extérieure avec ses auvents de bois bistré, ornant l'entrée et les ouvertures, caresse la vue. Les fenêtres comportant deux arceaux. Le motif révèle que le propriétaire fût un haut fonctionnaire. « Sa fonction était très importante. Il contrôlait les entrées des marchandises au niveau des portes de la médina », précise le chercheur G. Hamid. Arrivés à proximité du nouveau marché, nous restâmes un moment à regarder avec amertume, la villa Khaznadar, résidence du trésorier du Dey. Elle a tellement subi de transformations inadéquates par ses occupants qu'elle devient méconnaissable, même pour les initiés. Au terme de notre visite, nous nous rendîmes sur les hauteurs du Chemin romain dans l'espoir d'entendre un chant de noria. Déception ! Une immense bâtisse de deux niveaux, complètement en décrépitude, apparaît comme si elle surgissait du néant. Elle fut construite vers 1797, à l'époque de Hassan Pacha, dans la même période que les autres édifices de Birkhadem. Implantée au milieu d'un vaste domaine envahi par une végétation luxuriante, elle fut la propriété d'un dignitaire turc. Dans un tel état d'effarement, quitter les lieux sans oser tourner la tête, paraît une sage décision.