L'Afrique est sans nul doute un continent qui fascine, attire et fait rêver et, qui, dans le même temps, repousse, irrite et fait désespérer parfois. Dans tous les cas, il ne laisse pas indifférent. L'Afrique possède une longue histoire, en dépit de ceux qui avaient déclaré de manière éhontée au XIXe siècle qu'il s'agissait d'un continent « tabula rasa » (table rase). Faut-il rappeler qu'elle est le berceau de l'humanité et le lieu d'une des impressionnantes civilisations au monde, celle des Pharaons d'Egypte, sans parler de celle du Ghana, du Mali, etc. Elle est aussi le continent qui a subi l'esclavage et ses ignobles déportations humaines, forcées et massives. L'Afrique a ainsi fait l'Amérique. Aujourd'hui, force est de constater qu'elle est devenue un continent bien complexe, sinon compliqué, sur lequel on peut dire une chose et son contraire, exprimer un avis et le contredire aussitôt. Pour tenter de comprendre, pallier ce manque d'informations précises, apporter des réponses à des questionnements légitimes, les éditions Hachette Littératures viennent tout juste de publier un ouvrage, véritable mine d'or intéressant aussi bien les néophytes que les spécialistes. Les 100 clés pour l'Afrique est le résultat d'un travail de fourmi de Philippe Leymarie et Thierry Perret : un ouvrage ressources avec une liste d'entrée impressionnante et une postface pertinente sur une Afrique en devenir, celle du XXIe siècle. Les annexes, qui indiquent et expliquent les dates clés de son histoire, enrichissent considérablement l'ouvrage. En sus de la bibliographie, des sites Internet sont inclus aux références. Les informations fournies par pays sont utiles et récentes. Il est rappelé ainsi que l'Algérie a toujours inspiré la diplomatie africaine et qu'Alger était dans les années 1980 une plaque tournante du mouvement tiers-mondiste. De même, le poids de l'Algérie au sein de l'Organisation de l'Unité africaine est mis en évidence et le Président Bouteflika est signalé comme ayant « apporté son empreinte à la politique africaine de l'Algérie en se signalant comme l'un des fondateurs, avec Thabo Mbeki et Olusegun Obasanjo du projet Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) ». Il y est, par ailleurs, indiqué que l'Algérie apparaît comme un rempart contre le terrorisme islamique sur le continent en nouant « une alliance stratégique avec les Etats-Unis ». Pour l'Algérie comme pour l'ensemble des autres pays, le lecteur dispose des faits historiques les plus significatifs dans un ouvrage en rupture avec la vision raciale de séparation d'une Afrique noire et d'une Afrique blanche. Les auteurs rappellent ainsi la route transsaharienne qui existait depuis l'an 1000 avant notre ère pour le commerce du sel, des cauris, de l'or, de l'ivoire, des tissus, des noix de cola, des plumes d'Autruche mais aussi des esclaves. Cette route reliait aussi les ports méditerranéens et les royaumes du Ghana et du Mali. Tamanrasset a toujours été un lieu d'échange entre le nord et le sud du Sahara. Les données fournies sur les produits exploités et presque toujours exportés comme le cacao, le café, le coton, l'or, le diamant, le pétrole montrent l'étendue des richesses continentales, tristes chiffres, quand la majorité de la population africaine vit sous le seuil de pauvreté. D'autres entrées sont instructives comme celles de la lettre « c » avec les mots conflits et corruption. Tout y passe : drogue, énergie, dette, migrations, sida, terrorisme, femmes, réfugiés, francophonie, médias, tourisme… avec des analyses sur chaque thème. A propos de la culture, il est intéressant de noter la référence à la polémique née suite à la création du musée des Arts Premiers à Paris en 2006. En effet, de nombreux ethnologues ont soulevé alors la question du pillage massif des œuvres d'art africaines. Nous apprenons par ailleurs que l'Egypte est le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique (70,5 millions d'habitants) après le Nigeria et que, contrairement à une idée reçue, les litiges frontaliers sont rares en Afrique. En littérature, les auteurs accordent une place honorable à la littérature algérienne et, côté média, le lourd tribut payé par les journalistes algériens durant la décennie noire est souligné. Des discours majeurs de chefs d'Etat africains sont inclus, comme celui prononcé par Nelson Mandela le 10 mai 1994 à Pretoria, où il livre son espoir d'un Etat arc-en-ciel. Le continent est montré ainsi dans ses aspects les plus attachants, avec des peuples généreux et ouverts au monde et une capacité à surprendre comme le dit Elikia Mbokolo, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales et spécialiste de l'histoire contemporaine de l'Afrique, dans la postface. En somme, un ouvrage clair, simple et didactique qui permet de se convaincre que la notion d'indépendance est encore celle qui fait avancer les choses. P. Leymarie et T. Perret, Les 100 clés de l'Afrique, Coll. Grand Pluriel. Hachette Littératures, Paris, 2006. 712 p.