Ayant été pendant un certain temps un créneau porteur et très lucratif, l'ouverture d'un taxiphone constituait en soi une activité qui a intéressé un nombre appréciable de jeunes chômeurs, qui ont pu trouver dans cette voie une échappatoire au chômage qui frappait une catégorie de plus en plus jeune de la population. Cette activité a effectivement connu, lors de ces dix dernières années, un extraordinaire engouement et le nombre de taxiphones n'a cessé de croître d'année en année, jusqu'à devenir un réel phénomène. A Constantine par exemple, le phénomène connaît un accroissement et une anarchie sans pareille. Une anarchie perceptible au niveau de certains quartiers, où l'on peut trouver trois à quatre taxiphones dans un rayon de 200 m. Le cas est encore plus ahurissant au centre-ville où deux taxiphones sont carrément côte à côte. D'autres cas sont en train de se développer au niveau de la nouvelle ville, en passe de devenir « la cour des miracles ». Certains taxiphones vont même jusqu'à se substituer aux cafés avec la mise en vente des boissons fraîches ou encore des produits cosmétiques. Parfois l'on ne peut même pas savoir s'il s'agit d'une librairie ou d'un taxiphone. Un pullulement qui n'en finit pas avec autant d'activités parallèles nouvelles au gré de l'imagination des propriétaires. Un phénomène exacerbé par la mise en vente au niveau de ces mêmes lieux de puces téléphoniques et autres cartes de recharge. Une activité étonnante lorsque l'on sait qu'une simple photocopie est considérée comme un décalage par rapport à l'activité première et unique d'un taxiphone qui reste tout de même celle de téléphoner. Dans un pays où plus de 80 % de la population ne disposent pas de téléphone, un tel commerce (service) ne peut qu'être indispensable, donc lucratif. Un rêve qui n'aura pas duré longtemps car l'activité est en proie à quelques difficultés depuis trois ou deux années. Des difficultés nées au lendemain de l'avènement de la téléphonie mobile et l'augmentation des tarifs d'Algérie Télécoms. Le premier a contribué à diminuer le nombre d'une clientèle devenue de plus en plus autonome avec l'acquisition d'un téléphone mobile, alors que l'augmentation des tarifs a eu comme double conséquence : diminution de la marge bénéficiaire des propriétaires, et plus grave encore la quasi-désertion des taxiphones par la clientèle. Puisqu'en deux années, le prix de l'unité a sextuplé, de quoi décourager les plus bavards. Dans ces cas de figure, les propriétaires comptent sur les activités annexes telles que la photocopie ou encore la vente des sucreries, et plus récemment encore le commerce de puces et cartes de recharge, d'autres nous ont avoué que l'activité n'est plus la mine d'or d'avant.