La 5e édition du "Ramadhan au Palais" du 4 au 26 mars au Palais des expositions    Ghaza: des milliers de Palestiniens descendent dans la rue à l'occasion du cessez-le-feu    Les premiers camions d'aide humanitaire entrent à Ghaza après le cessez-le-feu    Oran : réception de la station de traitement des eaux usées d'Aïn El-Bia au second semestre 2025    Réhabilitation et extension du Barrage vert : des progrès satisfaisants concrétisés depuis la relance du projet    Conservation des forêts d'Oran : recensement des oiseaux migrateurs aquatiques dans huit zones humides    Assises nationales sur le cinéma: le président de la République souligne l'intérêt accordé par l'Etat à la culture et l'activité audiovisuelle    Textile et cuir: les opérateurs appelés à s'organiser en clusters pour répondre aux besoins du marché national    Sport scolaire: création de dix ligues de wilayas dans le sud du pays    Guterres demande le retrait de l'armée sioniste du Liban "dans le délai convenu"    Commerce: intransigeance envers la spéculation et le monopole pour préserver la stabilité du marché    Pétanque/concours national: la triplette de Tlemcen sacrée à El Oued    Plusieurs taxes et redevances instituées    Réunion au Conseil de sécurité, jeudi sur les enfants de Ghaza    La BRI en coordination avec la Sûreté de daïra d'Aïn Madhi : « Deux dealers ont été mis hors d'état de nuire »    Un responsable sioniste annule les détentions administratives des colons illégaux        Coupe de la Confédération (Simba SC- CSC) : Le Mozambicain Celso Armindo au sifflet    Vers la création de grands pôles spécialisés dans la culture de céréales et de maïs en grain    La France cherche des sanctions à imposer à l'Algérie mais n'en trouve pas    Démantèlement d'un atelier clandestin de confection de bijoux en or    Caravane de formation sur les opportunités d'investissement et d'entrepreneuriat au profit des jeunes    Récupération de 8 têtes de cheptel volées    Deux trafiquants arrêtés avec 3.660 capsules de Prégabaline    Ligue des champions : Le MCA arrache la qualification aux quarts dans la douleur    Le handball national face à ses objectifs    Comment faire pour lire plus de livres ?    Journée nationale de la commune: un nouveau système de gestion des collectivités locales en 2025    70e anniversaire de la mort de Didouche Mourad: conférence sur le parcours du chahid    Foot / Ligue des Champions (Gr: A - 6e et dernière journée) : héroïque en Tanzanie, le MC Alger qualifié en quarts de finale    Le Caftan constantinois: un des habits féminins prestigieux incarnant l'authenticité algérienne    Le Président Tebboune a reçu les responsables de médias    Le ministre présente ses condoléances suite au décès du Moudjahid Mohamed Hadj Hamou,    Frédéric Berger n'est plus    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie auprès de la République de Sierra Léone    Batna: la dépouille mortelle du moudjahid Lakhdar Benchaïba inhumée au cimetière d'Arris        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Extraits. Recueil des chroniques de Saïd Mekbel
Ce voleur qui…
Publié dans El Watan le 03 - 05 - 2007

Pour mémoire. Il est vrai que les coupures de ruban et les poseurs de première pierre ne se bousculent plus au portillon de la télévision. Il fut un moment où il était recommandé de ne pas manger en regardant le journal télévisé, on risquait de manger un ministre en avalant sa cuillère de chorba familiale. Mais est-ce rassurant ? Les mauvaises langues peuvent dire qu'il n'y a plus de ruban à couper ni de pierre à poser ou tout simplement que la cagnotte de la télé ne permet plus d'honorer les ardoises des caprices ministériels, ou encore – le rêve étant permis – que le reporter est fatigué de jouer l'auguste de service. Puis le passage à la télé fait-il toujours recette ? Ne vaut-il pas mieux trouver d'autres astuces ; les passages à Transparence c'est bien, les débats au MIA c'est mieux. Faut-il maintenant inviter le journaliste à son petit-déjeuner, à son jogging dominical, ou lui fixer rendez-vous à la mosquée du quartier ? Qu'il est donc difficile, mon Dieu, d'être gouvernant en ce pays ? C'est que le citoyen échaudé est devenu bien méfiant qui doit avoir l'estomac bien accroché pour avoir eu à digérer tour à tour le ministre historique, le ministre colonel, le ministre technocrate, le ministre de terrain, le ministre de dossier. L'un était omniprésent, le suivant envahissant, celui-ci encombrant, cet autre insignifiant, celui-là transparent. Mais qu'il est difficile encore d'être gouverné ! Car tout ce beau monde s'agite de nouveau comme un essaim de moucherons autour d'un fruit mûrissant. Que retrouve-t-on saisi par les fièvres électorales et les appels aux destins nationaux ? Les prestataires. Et vous voir dans leur discours, ils vont vouloir faire valoir leur expérience passée dans les affaires de l'Etat et que, pour paraître plus grand que le voisin, ils vont se présenter debout sur leur ancien piédestal. Pourtant… Pourtant Octobre déjà n'a su gérer son présent, ni su prévenir notre avenir. Il ne leur reste plus qu'une cartouche : tenter de faire fructifier le passé. Citoyen, attention à notre mémoire qui peut être courte, attention au tir aux pigeons. (7 Septembre 1989)
Echange. Notre excellent confrère El Watan a publié mercredi et jeudi une annonce fort savoureuse, dont voici le texte : « Echange grammaire kabyle publiée en 1858 contre Mercedes 1987. » Tout d'abord surpris par la précision et la concision de l'annonce, quelqu'un émit l'hypothèse finale qu'il s'agissait d'un message codé, car il trouvait surprenant que l'on puisse songer troquer un livre contre une voiture. Qu'y aurait-il donc de si étonnant ? Entre le livre et la voiture il y a au moins ce lien commun que le premier véhicule des idées tandis que le second transporte des hommes. Loin d'étonner, l'annonce, au contraire, devrait rassurer : il est encore en ce pays quelqu'un pour croire qu'un livre de grammaire, plus que centenaire, puisse valoir le prix d'une voiture de luxe de moins de cinq ans (soit une trentaine de millions), assez bon connaisseur pour apprécier à sa juste valeur la Mercedes de la cuvée 1987, et tout de même très optimiste pour croire que son offre est capable d'accrocher l'attraction d'un éventuel amateur de livres rares. Reste maintenant à voir si de l'autre côté, parmi les milliers de propriétaires de limousine Mercedes, il se trouve quelqu'un disposé à se laisser convaincre que l'échange voiture-livre n'a rien d'un marché de dupes. En attendant, l'amateur du message codé reste attaché à son idée et prétend même qu'il a réussi à décrypter l'annonce qui, selon lui, signifierait en clair « la grand-mère kabyle pourrait changer d'avis, si pour le mariage qu'elle fixe au 22 (1+8+5+8) il y a au moins 25 (1+9+8+7) voitures Mercedes dans le cortège ». (1er novembre 1991)
La rose et le fumier. Elle n'était pas mal du tout cette série télévisée sur « Les grands dossiers des Accords d'Evian » que l'on suivait avec un intérêt toujours soutenu, parce qu'elle sentait le travail sérieux et le désir sincère d'apporter quelques morceaux de vérités historiques. Et voilà que cette diffusion est interrompue parce que les trois derniers épisodes amenaient des révélations, en particulier sur la dilapidation des fonds de la révolution. Quelqu'un en haut lieu a dû juger que cela commençait à sentir le roussi pour toutes ces vérités usurpées servies depuis trente ans. Quelle bêtise et quelle étroitesse d'esprit. C'était au contraire l'occasion inespérée qu'il fallait saisir pour redonner à cette période importante de notre histoire une dimension humaine, donc son authenticité. Mais qui donc peut encore croire que nous sommes convaincus que ceux qui ont dirigé ou mené la lutte étaient des saints ou des petits dieux ? Qui ? Sommes-nous donc si naïfs ou si sots pour oublier que les chefs les plus valeureux étaient avant tout des hommes avec, à côté de leurs qualités, des défauts faits de faiblesses, de petitesses et de mesquineries ? Tout cela, tout simplement parce que les révolutions sont faites par des hommes et qu'elles ont besoin de leurs petitesses pour prendre et grandir comme les roses ont besoin de fumier pour pousser. (30 juillet 1992)
Pizza et couscous. C'était sans doute l'effet de la pizza napolitaine, ce mélange de câpres et d'anchois, qui a entraîné ces hallucinations. Dans ma pauvre tête, ça n'arrêtait pas de tirer. Cela a commencé à peu près vers minuit. D'abord un tout petit tatata. Puis tout de suite après, comme pour saluer ce petit tatata, il y a eu une véritable envolée de gros TATATA. Et alors là, pendant toutes ces heures paisibles de la nuit, dans ma pauvre tête, il y eut une véritable symphonie héroïque tatata TATATA, tata, TATATATA et même de temps à autre quelques fantaisies joyeuses du type tata, TAta, et tout cela formait par moments comme un refrain fait d'un beau roulement de mitraille. Puis au moment où je m'y attendais le moins, un grand BOUM, une sorte de magistral coup de gong qui a fait exploser ma tête et vibrer vitres, portes et fenêtres. Et encore BOUM. « Ça doit être un lance-rocket BPJ », dit une voix dans le noir. Je me tournai alors vers la direction d'où était venue la voix, et là, après avoir scruté l'obscurité du salon, je découvris dans un coin toute la famille blottie, femme et enfants, qui cherchait à comprendre ce qui se passait. Alors moi je ne compris plus rien : ma famille, elle, n'avait pas goûté à la pizza napolitaine, elle avait préféré le couscous poulet. Et je me suis alors dit qu'il fallait peut-être aussi admettre que le couscous poulet ça donnait des hallucinations comme la pizza napolitaine. Mais je vous assure que quand dans votre tête vous entendez ces TATA tata Boum Boum, vous avez réellement l'impression qu'une véritable bataille a lieu dans la rue, la nuit. (16 décembre 1992)
Nos enfants, c'est pas ... Lui aussi, c'est quelques jours avant l'Aïd, lui aussi un jour de fin de semaine, lui aussi aux premières heures de la matinée parce que l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt. Car nos enfants, n'est-ce pas, c'est pas des petits Japonais, c'est pas des petits Américains, c'est pas des petits Autrichiens... En se levant ce mercredi matin, Tahar Djaout est un homme d'avenir. Mieux, il est un homme de l'avenir. Il est de ceux qui peuvent faire reculer les horizons pour que les enfants puissent vivre et respirer à l'aise dans ce pays. Il a tout Tahar Djaout pour aider à ouvrir toutes grandes les portes qui font les petits paradis terrestres. N'est-ce pas que nos enfants ont aussi droit au bonheur comme tous les petits du Japon, d'Amérique, d'Autriche ou d'ailleurs ? Alors pourquoi ne pas aider à ouvrir toutes grandes les portes ? Lui aussi, c'est quelques jours avant l'Aïd, lui aussi un jour de fin de semaine, lui aussi aux premières heures de la matinée. Lui aussi, les grands ordonnateurs des exécutions sommaires ont décidé qu'il ne fallait pas le laisser pousser avec d'autres les portes sur l'avenir et qui font reculer les horizons... (31 mai 1993)
ça va. L'on vous demande ça va ? Surtout, surtout ne répondez pas ça va. Dites plutôt : ouach ça va ! En aboyant, l'air méchant, comme si on venait de vous triturer l'honneur de tribu, car il n'est tout d'abord pas permis de répondre que malgré tout vous êtes bien dans le costume, que vous vivez - presque - normalement et qu'il vous arrive même de faire des projets. Ensuite, il n'est pas encore permis de prétendre que si ça va mal dans le pays, après tout, votre modeste personne n'y est pour rien et n'y peut pas grand-chose. Surtout ne poussez pas l'insolence et ne blasphémez point, en rappelant qu'il y a des gens, fort importants, qui eux ont le pays en charge et ont le pouvoir d'agir et d'influer sur le cours des choses et des événements. Et que c'est pécisément l'exemple de ces gens importants qui vous a poussé à l'optimisme puisque vous les avez vus sourire, rire ou avoir l'air franchement hilare à la télévision... Donc, en conclusion et en résumé, si l'on vous demande ça va, aboyez ouach, ça va ! et tournez vite le dos à celui qui vient de vous poser cette question saugrenue. Car enfin, il ne faudrait pas qu'on se trompe sur votre compte, qu'on vous prenne pour ces Algériens capables d'être heureux sans et malgré eux. (25 juin 1994)
Ce voleur qui… Ce voleur qui, dans la nuit, rase les murs pour rentrer chez lui, c'est lui. Ce père qui recommande à ses enfants ne de pas dire dehors le méchant métier qu'il fait, c'est lui. Ce mauvais citoyen qui traîne au Palais de justice, attendant de passer devant les juges, c'est lui. Cet individu pris dans une rafle de quartier et qu'un coup de crosse propulse au fond du camion, c'est lui. C'est lui qui, le matin, quitte sa maison sans être sûr d'arriver à son travail. Et lui qui quitte le soir son travail, sans être certain d'arriver à sa maison. Ce vagabond qui ne sait plus chez qui passer la nuit, c'est lui. C'est lui qu'on menace dans le secret d'un cabinet officiel, le témoin qui doit ravaler ce qu'il sait, ce citoyen nu et désemparé... Cet homme qui fait le vœu de ne pas mourir égorgé, c'est lui. Ce cadavre sur lequel on recoud une tête décapitée, c'est lui. C'est lui qui ne sait rien faire de ses mains, rien d'autre que ses petits écrits, lui qui espère contre tout, parce que, n'est-ce pas, les roses poussent bien sur les tas de fumier. Lui qui est tous ceux-là et qui est seulement journaliste. (3 décembre 1994. Dernier billet - jour de son assassinat)


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.