La conférence internationale sur l'Irak s'est achevée hier avec un communiqué final dans lequel les participants appellent en substance à appuyer les forces irakiennes et à leur permettre d'assumer l'entière responsabilité de la sécurité et de la défense du territoire. Tenue jeudi et vendredi dans la station balnéaire égyptienne de Charm El Cheikh, cette conférence internationale se voulait une initiative fort nécessaire pour ouvrir des perspectives de stabilité et de retour à la paix civile à un Irak en proie à l'implosion. Les observateurs n'ont pas manqué d'y relever la présence significative de l'Iran et de la Syrie, deux voisins de l'Irak, sur lesquels l'Administration Bush n'a cessé de lancer des accusations quant à leur rôle ambigu dans la région. Mais en rencontrant à Charm El Cheikh ses homologues syrien et iranien, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleeza Rice, montre à l'évidence que le retour à la normale en Irak ne peut abstraire ses deux voisins les plus déterminants. Mais cette rencontre, tout comme la conférence internationale sur l'Irak, n'aura de sens que s'il n'y a plus d'arrière-pensée de part et d'autre. Il n'est pas apparu en effet à Charm El Cheikh que les Etats-Unis, puissance occupante en Irak, envisagent de se retirer pour laisser aux Irakiens la responsabilité de trouver les solutions à des problèmes essentiellement nés de l'invasion militaire étrangère. La crainte est que cette conférence internationale, dont la communauté internationale toute entière ne peut que soutenir l'objectif de retour à la paix et à la stabilité en Irak, ne puisse servir à l'Administration Bush qu'à gagner du temps. Le président américain, dont la marge de manœuvre est désormais extrêmement réduite face à ses adversaires démocrates, n'a plus la maîtrise du dossier irakien, surtout sur les volets sécuritaire et militaire. Il table sur une redistribution qui impliquerait davantage les pays voisins de l'Irak, particulièrement la Syrie et l'Iran, à un processus qui sécuriserait les frontières et limiterait les mouvements d'armes et de personnes à l'œuvre dans la situation explosive que connaît l'Irak. Signataires du communiqué final de la conférence internationale de Charm El Cheikh sur l'Irak, la Syrie et l'Iran semblent ainsi faire acte de bonne foi, car ni l'un ni l'autre n'allaient publiquement accepter la thèse américaine selon laquelle les malheurs de l'Irak viennent de voisins mal intentionnés. Et c'est à ce niveau que le poids des arrière-pensées s'avère pesant. Les contentieux avec l'Iran, notamment sur son programme nucléaire, restent entiers et on ne voit pas comment l'Administration Bush pourrait attendre de Téhéran sur le front irakien tout en envisageant contre lui des mesures qui pourraient aller jusqu'à la frappe chirurgicale. Nul ne peut croire qu'à Charm El Cheikh, Américains et Iraniens ont pu être un seul instant dupes les uns des autres. La question qui se pose est alors de savoir quel tournant sera pris après cette conférence internationale, dont le monde entier peut nourrir l'espoir qu'elle était vraiment fondée sur la volonté de sortir enfin l'Irak de la tourmente. Il ne faudrait pourtant pas avoir la candeur de croire que ce vœu fervent se matérialise du jour au lendemain. Consultation au demeurant bien tardive, la conférence internationale de Charm El Cheikh sur l'Irak devra, au titre de ses résultats les plus attendus, faire en sorte que la médication prescrite ne tue pas le malade.