La réunion, qui a regroupé les chefs de la diplomatie d'une vingtaine de pays à Charm El Cheikh s'est achevée hier par une déclaration finale. Celle-ci réitère son soutien aux élections générales irakiennes qui doivent se tenir le 30 janvier prochain et affirme également que la résolution 1546 du 8 juin dernier demeure la base de tout règlement équitable au conflit en Irak. En fait, les travaux de la conférence internationale sur l'Irak se sont déroulés à l'entière satisfaction du gouvernement intérimaire irakien qui a vu toutes ses doléances prises en charge. Le ministre des Affaires étrangères du gouvernement intérimaire irakien, Shohayr Zebari, a été en quelque sorte le maître d'oeuvre de cette réunion à laquelle assistaient une vingtaine de chefs de la diplomatie dont notamment le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, -qui a fait ses adieux et effectué à Charm El Cheikh son ultime sortie officielle en tant que chef de la diplomatie américaine-, ses homologues russe, Sergueï Lavrov, français, Michel Barnier, britannique, Jack Straw et allemand Joshka Fischer. De fait, tous les intervenants ont mis l'accent sur la résolution 1546 du Conseil de sécurité de juin dernier qui reste à leurs yeux le meilleur instrument de retour à la stabilité pour l'Irak comme le soulignait le ministre égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Abou Gheit à l'ouverture de la conférence lequel a déclaré: «Nous devons oeuvrer ensemble pour appliquer des démarches pratiques politiques globales en Irak définies par la résolution 1546 afin d'arriver à un Irak unifié exerçant ses pleins droits politiques» ajoutant «La sécurité et la stabilité de l'Irak : se reflètent directement sur la sécurité et la stabilité du Proche-Orient, ses répercussions se reflètent sur le monde entier». M.Abou Gheit a également fait le lien entre la situation en Irak et le conflit israélo-palestinien, indiquant qu'«oeuvrer pour un règlement du problème irakien ne peut se faire indépendamment des efforts intensifs déployés pour instaurer la paix au Proche-Orient, ce qui impose d'aboutir sans tarder à un règlement juste et global du problème palestinien». Mais, de toute apparence, il était le seul à penser ainsi et à l'évidence les principaux acteurs des drames irakiens et palestiniens n'étaient pas prêts à faire ce saut qualitatif pour régler globalement les contentieux minant la sécurité et la paix au Moyen-Orient. Aussi, la restauration de la sécurité en Irak reste-t-elle le paramètre incontournable pour permettre aux prochaines élections de se tenir, sinon dans des conditions idéales, du moins en offrant le plus de garanties à une consultation qui soit représentative des diverses opinions politiques en Irak. Pour la crédibilité de cette élection, la conférence de Charm El Cheikh a appelé tous les acteurs politiques irakiens, (partis et hommes politiques) et le peuple irakien à participer massivement au scrutin qui va déterminer le devenir de l'Irak. Or, les partis sunnites, dont la région se trouve depuis plusieurs semaines sous l'action de représailles des forces d'occupation américaines appellent au boycott de la consultation du 30 janvier, ce qui ne va pas sans compliquer la donne électorale. Et ce boycott peut être l'une des conséquences des opérations musclées menées contre les bastions sunnites de Falloujah et de Mossoul, offensives auxquelles le Premier ministre intérimaire irakien Iyad Allaoui avait donné le feu vert permettant à l'armée américaine d'engager de vastes et meurtrières offensives contre ces deux villes. Ce que dit, en filigrane et indirectement, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, lorsqu'il affirme:«Les autorités irakiennes ont le droit, elles ont le devoir, de maintenir l'ordre sur tout le territoire. Mais elles doivent en même temps prendre garde aux conséquences plus larges de leurs interventions sur le processus de transition». La critique est voilée mais elle est bien là. De fait, le secrétaire général de l'ONU réitère l'engagement de l'Organisation internationale à aider les autorités irakiennes à préparer les élections indiquant: «Il est absolument nécessaire qu'elles se déroulent dans un climat favorable». Toutefois, c'est bien ce climat favorable qui fait actuellement défaut et il faut bien relever que le gouvernement intérimaire n'a rien fait pour qu'il en soit autrement, l'offensive ordonnée contre les bastions sunnites, concurremment avec la fixation de la date des élections générales, -trop rapprochées selon les observateurs- sonnent comme un défi, d'une équipe qui veut imposer sa vision de la paix et la sécurité à l'ensemble du peuple irakien et à la communauté internationale. De ce point de vue, la conférence internationale de Charm El Cheikh n'aura pas apporté du nouveau et l'incertitude demeure tant pour ce qui est du retour à la sécurité que sur les conditions d'organisation et de faisabilité de la prochaine consultation électorale.