A quelques jours de l'ouverture de la saison estivale, notre ministre du Tourisme, Noureddine Moussa, a bien voulu répondre aux question relatives à la préparation de la prochaine saison estivale, aux mesures prises pour développer les segments du tourisme autres que balnéaires, ainsi qu'aux investissements en phase de réalisation ou en voie de l'être, notamment dans le domaine de l'hôtellerie. Si la dynamique de développement du tourisme est à l'évidence largement enclenchée, son souci, nous a-t-il affirmé, est de veiller à ce qu'elle se fasse de manière ordonnée et contrôlée, pas de manière anarchique. Il faut domestiquer l'investissement touristique de manière à ce qu'il s'inscrive dans le développement durable et constitue un réservoir de richesses, non seulement économiques mais également culturelles et humaines. Nous sommes à quelques jours de l'ouverture de la saison estivale 2007, que fait le ministère du Tourisme pour que celle-ci se passe dans les meilleures conditions possibles ? Les préparatifs de la saison estivale 2007 ont en réalité commencé dés que s'est achevée celle de l'année dernière. Dés le mois de septembre 2006 un bilan a, en effet, été établi avec les quatorze directeurs de tourisme des wilayas du littoral. Nous avons depuis beaucoup travaillé, avec les autorités et les élus locaux afin que les choses s'améliorent. Afin d'affiner encore plus les préparatifs nous avons réuni, en janvier dernier à l'hôtel El Riadh, l'ensemble des acteurs du tourisme. Je demeure de ce fait convaincu que la saison estivale prochaine se déroulera, sans doute encore mieux que celle qui l'a précédé, sous de bons auspices. Quels sont les indicateurs qui vous permettent de l'affirmer ? D'année en année nous mettons à la disposition des estivants des plages supplémentaires. La mise en service de stations d'épuration dans un certain nombre de régions (Aïn Bénian, Aïn Turk etc ) et le désenclavement de nombreuses plages permettront de mettre à la disposition des baigneurs plusieurs plages qui leur étaient interdites. Le nombre de plages utilisables était de 293 en 2005, il est passé à 311 en 2006 et cette année il atteindra fort probablement 330. Comme vous l'avez sans doute constaté nous avons engagé avec les autorité locales concernées des actions visant à doter nos plages de certaines commodités comme les cabines de déshabillage, les sanitaires et les douches. A titre d'exemple le nombre de douches installés sur les plages est passé de 510 en 2005 à 698 en 2006. Les sanitaires sont au nombre 72, les cabines de déshabillage et les bornes fontaines sont également plus nombreuses aujourd'hui. Les collectivité locales ont mis d'importants moyens matériels et financiers pour mettre en valeur leurs plages et les espaces environnants. Pas moins de 385 millions de dinars avaient été dépensées à cette fin en 2006 et cette année les budgets seront encore plus importants. Qui se chargera de la gestion des plages et des équipements que vous venez de citer ? En 2007 il y aura une généralisation d'un cahier des charges imposable à l'ensemble des concessionnaires de plages qui sauront ainsi à quoi s'en tenir. Nous feront de la gestion des plages un métier et nous comptons à travers ce cahier des charges professionnaliser personnes dans la gestion des plages. Le cahier des charges prévoie une concession de cinq ans, une durée qui permet au concessionnaire d'investir et d'appréhender avec sérénité l'avenir. Si la loi algérienne a consacré la gratuité de l'accès aux plages, les services (location de parasols, sanitaires, gardiennage) sont par contre payants bien qu'à des prix modiques. Il faut permettre à ces activités de services de se développer car elles créent beaucoup d'emplois. L'activité de nettoyage des plages a, à titre d'exemple, créé pas moins de 4200 emplois en 2006. Les prestations de services en avaient créé pas moins de 18.000, c'est dire l'importance de ce gisement d'emplois. Pour donner d'avantage de rationalité au tourisme balnéaire, un schéma directeur d'aménagement touristique en phase avancée d'élaboration, ambitionne de créer un certain nombre de pôles d'excellence et des pôles complémentaires pour les soutenir. A titre d'exemple Tipaza sera un pôle d'excellence pour ce qui concerne le tourisme culturel. Le patrimoine archéologique qu'elle recèle le justifie largement. Sétif (Djémila) et Batna (Timgad) constitueront des pôles complémentaires. Il est prévu un pôle d'excellence à Jijel et Béjaïa, pour ne citer que ceux là. Le tourisme balnéaire souffre d'un problème d'offre, notamment pour ce qui est de l'hébergement. Pensez-vous que les nombreux hôtels réalisés ces dix dernières années par le privé ont quelque peu amélioré la situation ? Ils auront au moins eu le mérite d'avoir quelque peu amoindri les tensions notamment en période estivale. L'effort d'investissement doit toutefois être maintenu voire même renforcé. C'est dans la région d'Oran qu'ont été réalisé le plus d'hôtels mais la tendance pourrait être renversée en faveur d'autres régions, le nombre d'hôtels en cours de réalisation à travers le territoire national étant de 353. Pas moins de 35.000 lits supplémentaires seront disponibles lorsque que ces hôtels, qui sont à environ 62% de taux d'avancement, seront achevés. Je tiens par ailleurs à vous informer qu'il y a également 25O autres projets à l'arrêt généralement pour des problèmes financiers. Le ministère s'est rapproché des banques pour solutionner le problème qui a trouvé une issue dans le réaménagement du montage financier (allongement de la période de crédit à 1O ans et baisse des taux d'intérêt). Une fois réalisés ces projets augmenteront l'offre d'environ autres 25.000 lits. L'Algérie dispose d'une manne touristique qui lui est presque naturellement acquise, il s'agit de notre communauté émigrée. Une manne que notre industrie touristique n'a jamais su exploiter. Quelles actions compter-vous mener ne serait-ce que pour fidéliser ce flux ? Les chiffres sont en effet éloquents. Nos compatriotes de l'émigration viennent chaque année plus nombreux pour passer les vacances dans leur pays d'origine. Cela nous honore, nous encourage mais nous met également sous pression. Ils étaient 90.000 à venir en 2000, ils sont aujourd'hui plus d'un million et le flux devrait, selon nos prévisions, progresser au cours des prochaines années. La plupart d'entre eux ont des attaches familiales et par conséquent leurs propres lieux d'hébergement. Le reste arrive à trouver où passer leurs séjour en se débrouillant avec les infrastructures existantes, y compris les logements mis en location par des propriétaires durant les vacances d'été. Il faut évidemment agir pour qu'un maximum d'infrastructures nouvelles, disposant des commodités qu'ils cherchent ailleurs, soient construites. Ce n'est qu'ainsi qu'on pourra les fidéliser. On a tendance à se focaliser sur le tourisme balnéaire, alors que l'Algérie recèle d'autres potentialités.. Il est tout à fait certain que nous pouvons développer plusieurs formes de tourisme et cela la particularité de l'Algérie. Il est possible de promouvoir le balnéaire, le tourisme de montagne, le saharien, le culturel, le cultuel et bien d'autres produits touristiques. Il est toutefois reconnu que le balnéaire reste le tourisme le plus prisé. Plus de 75% des estivants choisissent, selon l'Organisation Mondiale du Tourisme, le balnéaire. En Algérie vous constaterez que les plages ont pleines à craquer durant l'été mais c'est aussi le cas pour les stations thermales très prisées par les algériens pour des raisons socioculturelles. Mais pour ce qui est du thermalisme, il est évident qu'il reste beaucoup à faire pour répondre à une demande interne très importante mais également à une demande externe très exigeante. Il faut aller vers le haut de gamme mais pour cela il faut d'abord commencer par actualiser le bilan thermal qui remonte au début des années 80. L'étude que nous avons lancé nous permettra d'avoir un état des lieux précis et d'envisager sur cette base des actions en direction des investisseurs. Là aussi, nous envisageons dans le cadre du schéma d'aménagement touristique auquel nous travaillons de créer des pôles d'excellence là où il y a d'excellentes sources thermales et des pôles complémentaires qui viendraient en soutien. Le tourisme de montagne offre également d'intéressantes perspectives... Vous avez bien raison d'évoquer cet important segment de tourisme qui mérite effectivement qu'on s'y intéresse, tant il dispose de nombreux atouts. Certains promoteurs l'ont du reste vite compris et pour preuve j'ai pu constater avec satisfaction la réalisation par des promoteurs privés de grandes auberges et d'un hôtel qui fonctionnent déjà à Chréa où j'ai effectué tout récemment une visite de travail . La remise en service du téléphérique est sérieusement prise en charge par les autorité locales. Les travaux devraient commencer au mois de juin prochain. Tikjda est également envahie les jours fériés par des visiteurs en provenance de diverses régions du pays. On commence même à y voir quelques étrangers, ce qui est de bonne augure. Il reste à susciter la même dynamique pour Tala Guilef, mais il faut se rendre à l'évidence que pour qu'une station de ski fonctionne il faut que tous les partenaires concernés jouent le jeu. Je pense notamment aux autorités locales concernées (wilaya, APC), aux industriels qui fabriquent et réparent les équipements et bien entendu, les promoteurs immobiliers. Je pense que nous n'avons pas encore donné suffisamment d'importance à ce segment de tourisme, mais aujourd'hui nous sommes déterminé à le faire. La tendance touristique mondiale n'est plus aux vacances de longue durée, mais à de courts séjours en bord de mer, en montagne, dans les stations thermales ou dans les lieux de dépaysement (Sahara). Le ministère du Tourisme a-t-il adapté sa stratégie en fonction de cette nouvelle donne ? Le touriste n'a effectivement plus tendance à rester longtemps dans un même endroit et durant plusieurs jours. Les touristes en provenance des grands pays émetteurs cherchent des vacances courtes. Nous sommes en train de nous organiser en fonction de la spécificité de cette demande en promouvant notamment le tourisme saharien qui y répond parfaitement et d'autres segments, comme les tourismes culturels et cultuels. Vous nous avez fait part d'un certain nombre d'investissements étrangers, notamment dans le domaine de l'hôtellerie. Parmi les grands projets, quels sont ceux qui sont déjà mis en chantier ou sur le point de l'être ? Le Conseil national de l'investissement a donné son accord pour un certain nombre de grands projets. Je pense par exemple à l'ensemble immobilier dont un grand hôtel qui sera réalisé à Birkhadem par Cosider en partenariat avec un fond d'investissement libyen. Il y a également le complexe touristique de Zéralda (Sedar) qui a également reçu l'accord du CNI et qui doit démarrer incessamment les travaux. Je citerai aussi celui de Boumerdès que la même société devrait très prochainement entamer. Avec IMMAR, je pense que les travaux pourront également démarrer cette année pour la réalisation d'un grand complexe touristique au niveau de la ZET Colonel Abbès. Il y a également de fortes chances qu'une société émirati, avec laquelle nous avons pratiquement finalisé le projet d'un complexe touristique à Moretti, ouvre le chantier dans le courant de cette année. J'évoquerai aussi le premier hôtel Marriott dont le dossier est pratiquement prêt pour sa prochaine mis en chantier dans la zone du Club des Pins. Je n'oublierai pas les hôtels qui seront réalisés dans divers endroits du pays par la chaîne internationale Accor en partenariat avec le groupe Mehri, dont trois hôtels sont déjà en construction à Constantine et Alger. Il y a une demande d'investissement très importante mais, en matière d'infrastructures touristiques l'erreur n'est pas du tout permise. Il faut absolument veiller à ce qu'un projet touristique ne soit pas réduit à un projet de promotion immobilière, le tourisme et l'habitat obéissant à des logiques économiques et sociales tout à fait différentes. La dynamique de développement du tourisme est aujourd'hui suffisamment bien enclenchée mais on doit veiller continuellement à ce qu'elle se fasse de manière ordonnée et contrôlée et non pas de manière anarchique et subie. Et c'est précisément pour cela que nous avons institué au niveau du ministère une commission consultative constituée d'universitaires et de compétences avérées pour éclairer nos décisions.