Benamar Yahia, dit Godot, 36 ans, vit depuis plus de dix ans à Berlin (Allemagne) où il a exercé pendant six ans au théâtre de Freiburg en tant que technicien de la scène. Avant de quitter le pays, ce comédien de formation a enseigné l'art de la comédie à l'université d'Oran. Il a obtenu le meilleur rôle masculin au festival national du théâtre professionnel d'Oran en 1996, avec la pièce 4 en 1. La rage, une pièce de théâtre que vous avez monté en 20 jours, un coup de gueule où une autre façon de faire du théâtre ? C'est une adaptation d'un film américain à petit budget, Réservoir dogs, de Quentin Tarantino. Avec le temps, l'oeuvre est devenue culte. C'est l'histoire de gangsters et d'un hold-up qui tourne court. Les acteurs jouent les durs. Comme ces durs qui imitent les acteurs pour se donner de l'importance. Pour la pièce « la Rage », l'espace choisi traduit cette ambiance qu'on retrouve dans le film : le cinéma, l'emprise avec sa scène délabrée et ses murs abîmés. Neuf jeunes comédiens interprètent des rôles de durs : Lakroun, Lamir Bensaid, Djeghdou, Djouzi, Lakrout, Bouroumana, Aidouni, Benaissa et Lamir Bensaid Abdelkader. Ce sont pour la plupart des jeunes dont les parents, comédiens eux aussi, ont fait partie de la troupe de Kateb Yacine. Si on a opté pour le cinéma l'empire et un budget de 15 000 dinars c'est que malheureusement on nous refuse toujours de nous produire dans les espaces publics. Pour vous, travailler en dehors des espaces classiques est-il seulement une façon de faire du théâtre ou un autre choix prémédité ? C'est plutôt prémédité quand on voit les sommes énormes injectées dans des productions théâtrales généralement médiocres. Une pièce de théâtre en Allemagne, selon les normes établies, ne coûte pas plus de 20 000 euros et ne prend pas plus de 40 jours pour être présentée en général. Le travaille que j'ai fait avec les comédiens de la troupe masrah el wakt pour monter La Rage, s'inscrit dans cette logique. D'ailleurs, cela ne nous a pas coûté plus de 15 000 dinars pour deux représentations. Ce n'est pas une question d'argent seulement, mais un problème d'espace et de gestion de ces mêmes espaces. Ce que j'espère, c'est d'arriver à imposer des méthodes contemporaines dans l'art dramatique. On peut avoir un espace scénique signifiant et plus esthétique que la boite à l'italienne. Vos projets à l'avenir ? J'ai déjà interprété des rôles dans Destination cratère de Chicago avec Abbar et Ballade en enfer et j'espère à l'avenir pouvoir mettre en scène « Les trois soeurs d'Anton Tchekhov », avec cette fois-ci des hommes dans l'interprétation et avec peu de moyens.