La cour de Bouira jugera aujourd'hui les 30 travailleurs et syndicalistes de la filiale Sidet du complexe du groupe Enad, installée à Sour El Ghozlane. Un précédent unique dans les annales de la justice et surtout du syndicalisme. En effet, cette affaire remonte au 17 avril 2006, à la suite d'une journée de protestation organisée par les syndicalistes sur leur lieu de travail, autour d'une plate-forme de revendications adressée à la direction générale de la filiale. Les négociations sont alors engagées en présence de l'inspection du travail, pour se terminer avec un procès-verbal de conciliation. Les deux parties se sont entendues autour de la nécessité de désamorcer la crise en prenant en charge toutes les doléances des travailleurs. A la surprise générale, le premier responsable de la filiale ainsi que le DG du groupe déposent plainte au tribunal de Sour El Ghozlane « pour injures et insolence » contre 30 travailleurs et syndicalistes (au début 29, puis 30), ceux-là mêmes qui ont participé à l'accord conclu le 17 avril 2006, soit un mois avant seulement. Ils sont alors suspendus de leurs postes et leurs salaires arrêtés quelques semaines plus tard. Le 13 mai 2006, les contestataires sont déférés au tribunal de Sour El Ghozlane. Le procès dure une journée, au cours de laquelle 7 témoins se sont succédé à la barre pour appuyer la plainte des responsables du groupe et de la filiale Sidet sans pour autant qu'ils soient capables de citer les noms précis de ceux qui auraient pu proférer des injures. Les travailleurs plaident tous non coupables, le parquet requiert 6 mois de prison et 5000 DA d'amende. Mais contre toute attente, le tribunal les condamne à 2 mois de prison ferme le 26 mars 2007. Une décision contestée, car selon eux, « elle ouvre la porte à de graves dérives contre le mouvement syndical déjà fortement affaibli du fait de la politique générale du pays ». Ils ont considéré cette décision comme étant « une sanction collective à l'encontre des travailleurs et leurs représentants légitimes ». Un appel a donc été introduit et l'affaire a été programmée pour aujourd'hui à la cour de Bouira. Les travailleurs espèrent que justice sera rendue.