Président du Conseil national de l'ordre des médecins, le docteur Bekkat Berkani Mohamed affirme dans ce bref entretien qu'il nous a accordé qu'il est techniquement impossible de procéder à des vols d'organes sur des enfants enlevés. Pour lui, l'Algérie n'est pas un bagne d'enfants où puisent les trafiquants d'organes. Depuis quelque temps, la rumeur publique fait le lien entre les enlèvements d'enfants et le trafic d'organes. Qu'en pensez-vous en tant que médecin ? D'abord, il faut savoir que pour qu'il y ait une greffe d'un organe, il faut faire des examens de compatibilité aussi bien pour le receveur que pour le donneur. On n'enlève pas un organe pour le mettre dans de la glace et le maintenir en vie. Dans la réalité, cela ne se passe pas ainsi. Il faut savoir que dans les meilleures des conditions techniques, une cornée d'un post-mortem, par exemple, meurt au-delà de 72h, et un rein peut être gardé à peine 12h après son extraction. Il faut des infrastructures habilitées à recevoir le donneur et le receveur, lequel doit subir un traitement pour éviter le rejet. Avec tous les moyens modernes et les techniques de pointe dont ils disposent, certains pays européens n'arrivent pas à maîtriser totalement les prélèvements d'organes sur les accidentés pour les greffer. Je peux vous affirmer que ces rumeurs sont sans fondement. L'Algérie n'a pas de bagnes d'enfants comme cela existe dans certains pays d'Asie. Est-il possible que ces enfants victimes d'enlèvement soient transférés par leurs ravisseurs vers des centres spécialisés pour subir des opérations ? Je vous réponds en vous disant que cela relève de l'impossible. Nous n'avons pas de structures spécialisées dans les greffes. De plus, même si elles existent, cela voudrait dire que toute l'équipe est complice dans ce trafic. C'est impensable. Je suis formel en vous disant que ce sont des rumeurs infondées. De plus, je pense qu'il faut parler en termes de disparition et non pas d'enlèvements. C'est la médiatisation de ces affaires par les familles qui attisent les rumeurs. Vous voulez dire que médicalement, il est pratiquement impossible de procéder au trafic d'organes en Algérie ? Oui, et je suis formel à plus forte raison quand il s'agit d'enfants, les plus sujets aux rejets. Malgré tous les moyens mis en place par certains de nos hôpitaux en matière de greffe, les résultats restent très maigres du fait soit des rejets, d'incompatibilité ou de disponibilité. Les raisons des enlèvements sont donc à chercher ailleurs que dans le trafic d'organes.