Pas de bouleversement majeur au sommet de l'Etat. Ceux qui avaient prestement prêté au président de la République l'intention de provoquer un changement n'ont pas attendu trop longtemps pour s'apercevoir de l'annonce lundi soir de la « nouvelle » composante gouvernementale, presque en tous points pareille à la précédente. Abdelaziz Belkhadem succédera donc à lui-même à la tête du gouvernement et retrouve la quasi-totalité de ses ministres, à quelques têtes près. Trop de bruit pour rien, diront certains. Car, hormis le départ – qu'on dit volontaire – du chef de la diplomatie, Mohamed Bedjaoui, et de celui des ministres de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, et de l'Habitat et de l'Urbanisme, Nadir Hamimid, poliment remerciés, probablement pour des considérations liées à leurs bilans, la physionomie de l'actuel gouvernement n'a pas du tout été altérée par le lifting. Alors que certains ministres réputés « proches » du président de la République ont tout juste été confortés dans leurs postes : le cas du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Nouredine Yazid Zerhouni, de la Justice, Tayeb Belaïz, et Chakib Khelil de l'Energie et des Mines, d'autres en revanche gagneront en prérogatives : Abdelhamid Temmar hérite du département de l'Industrie et de la Promotion des investissements et Mourad Medelci est parachuté aux Affaires étrangères. L'ex-ministre des Finances vient en remplacement à Mohamed Bedjaoui, un poids lourd s'il en est, de la diplomatie algérienne. Sa nomination à ce poste ne laisse aucunement entrevoir si elle avait été précédée d'une quelconque option stratégique en matière de conduite de la diplomatie ou seulement ne s'agit-il là que d'une promotion pour un « fidèle parmi les fidèles ». En remplacement à Mourad Medelci, Karim Djoudi, l'ancien ministre délégué à la Réforme financière. Boubekeur Benbouzid, qu'on disait presque en « fin de cycle », reprend également du service au même titre que Djamel Ould Abbès à la Solidarité nationale. Toujours au chapitre des permutations, Noureddine Moussa, l'ex-ministre du Tourisme atterrit en terrain miné : à l'Habitat et l'Urbanisme avec la lourde charge de faire aboutir le programme du Président : livrer en 2009, 1 million de logements. Cherif Rahmani récupère pour sa part le Tourisme et se retrouve à la tête d'un « super » ministère : l'Aménagement du Territoire, l'Environnement et le Tourisme. Boukerzaza, du défunt ministère délégué à la Ville, est promu au département de la Communication. Hachemi Djiar, l'ex-premier responsable de ce département, est nommé au MJS en remplacement à Yahia Guidoum. Les autres départements ministériels sont restés fidèles à leurs anciens maîtres. Il n'y aura donc pas de changement de cap. La désignation vendredi dernier par le président Bouteflika d'un gouvernement intérimaire pour expédier les affaires courantes, différemment appréciée par les acteurs politiques, ne s'est pas traduite comme certains l'ont souhaité, par un bouleversement politique qui prendrait en charge la nouvelle donne issue des élections législatives du 17 mai. Tout juste une fausse alerte en somme. La reconduction de l'équipe gouvernementale, qui a nourri la controverse par son caractère étrange et biscornu, n'a aucunement perturbé les équilibres politiques existants au sein de l'Exécutif, ni le dosage partisan. L'Alliance présidentielle (FLN, RND, MSP), en dépit du camouflet du 17 mai, a été remise au goût du jour et son hégémonie (méritée ou usurpée) au sein de l'Exécutif, comme à l'APN, a été préservée par le choix actuel du chef de l'Etat. Un choix qui autorise plusieurs lectures politiques. Le temps d'arrêt marqué par le président de la République pour reconduire l'actuel Exécutif ne pouvait témoigner que des tiraillements et de l'indécision qui ont lourdement affecté l'homme. Les résultats des dernières élections législatives marquées par une très forte abstention ont donné lieu à un comportement nouveau chez le chef de l'Etat. Ces récentes visites dans les wilayas d'Annaba, Blida et Chlef sont-elles des tentatives de déconnecter par l'image la bérézina électorale de sa propre personne, de son bilan de chef de l'Exécutif ? Possible. Le charme ne semble pas avoir opéré outre mesure. Dans la peau d'un « candidat à la candidature » pour un 3e mandat, Bouteflika pouvait-il se passer réellement et sans risques des services de l'Alliance présidentielle ? Pas si sûr, ce qui éventuellement pourrait expliquer le statu quo.