Dans un entretien accordé au quotidien français Le Monde, daté de jeudi, le fils du leader libyen Muammar al-Kadhafi révèle deux éléments qui seraient, selon lui, intervenus dans les négociations pour la libération des infirmières et du médecin bulgares : un contrat d'armement avec la France et la possible extradition d'un Libyen condamné en Ecosse pour son implication dans l'attentat de Lockerbie. Après la libération des cinq infirmières et du médecin d'origine palestinienne, extradés la semaine dernière après huit ans passés dans les prisons libyennes, la présidence française avait fait état d'un accord sur la livraison d'une centrale nucléaire à la Libye. Mais le fils du dirigeant libyen, Saïf al Islam Kadhafi, président de la fondation Kadhafi, affirme au Monde que cette installation « n'est pas essentielle pour la Libye ». En revanche, il détaille la conclusion d'un accord d'armement avec Paris. Le palais de l'Elysée, sollicité pour réagir à cet entretien, n'avait pas répondu dans un premier temps. « D'abord, l'accord recouvre des exercices militaires conjoints, bien sûr. Puis, nous allons acheter à la France des missiles antichars Milan, à hauteur de 100 millions d'euros. Je pense, affirme Saïf al Islam, ensuite, qu'il y aura un projet de manufacture d'armes, pour l'entretien et la production d'équipements militaires. » Argent « dépersonnalisé » Le fils de Kadhafi se félicite de ce qu'il qualifie de « premier accord de fournitures d'armes par un pays occidental à la Libye » depuis la fin de l'embargo en 2004, après les accords de dédommagement aux victimes des attentats de Lockerbie et du DC-10 d'UTA en 1988 et 1989, qui avaient fait respectivement 270 et 170 morts. Justement, Saïf al Islam Kadhafi affirme également au Monde qu'un ressortissant libyen, Abdel Basset Ali al Megrahi, condamné en Ecosse en 2001 à la prison à vie pour sa participation à l'attentat de Lockerbie, pourrait prochainement être extradé vers la Libye. En juin, peu après une visite de l'ancien Premier Ministre britannique Tony Blair à Tripoli, il avait été autorisé à faire appel pour la deuxième fois de sa condamnation. « Nous allons bientôt avoir un accord d'extradition avec le Royaume-Uni », assure Saïf al Islam. Enfin, le fils du colonel Kadhafi convient, avec « grande tranquillité », selon la journaliste du Monde, que les personnels soignants bulgares, condamnés à mort deux fois pour avoir inoculé le virus du VIH à des enfants d'un hôpital de Benghazi, étaient innocents : « Ils ont malheureusement servi de boucs émissaires », déclare-t-il, estimant que la Libye a réalisé dans cette affaire « un bon deal ». A leur retour en Bulgarie, les six ont été immédiatement graciés par le président Georgi Parvanov, ce qui a suscité des réactions officielles d'indignation à Tripoli. Le fils de Kadhafi affirme « qu'aucun argent libyen » n'a été versé aux familles d'enfants libyens malades du sida. « Ce que je peux dire, c'est que les Français ont arrangé le coup. Les Français ont trouvé l'argent pour les familles. Mais je ne sais pas où ils l'ont trouvé », en refusant de confirmer une intervention du Qatar. Selon un analyste de l'agence d'information russe Ria Novosti, la libération des Bulgares, décidée par Tripoli, a été largement influencée par « d'énigmatiques compensations financières ». « Enigmatiques, car l'UE et la France n'ont pas révélé qu'elles avaient versé aux familles un million de dollars pour chaque enfant malade. Reconnaître la provenance de cet argent aurait été reconnaître la culpabilité des condamnés. Alors, cet argent a été dépersonnalisé en passant par la fondation Kadhafi, dirigée par Saïf al Islam Kadhafi », précise l'analyste russe.