Le dernier livre de Bélaïd Abdesselam égrenant les treize mois passés à la tête du gouvernement n'a suscité aucune réaction « en haut lieu », a confié, hier, l'ancien chef du gouvernement. Bélaïd Abdesselam, dont les motivations déclarées en rédigeant son livre sont de « rétablir certaines vérités sur treize mois à la tête du gouvernement », a fait tout le contraire de ce que pouvait laisser suggérer le titre racoleur du livre. Plus que des contre-vérités, sa version de certains événements qui ont tristement marqué le passage de Bélaïd Abdesselam à la tête du gouvernement, dont il est par, ailleurs, le seul à croire qu'il fut couronné de succès, se nourrit de l'idéologie du complot qui a toujours fait partie de sa culture politique. Aux autres institutions et personnalités mises en cause dans le livre de se défendre et d'apporter leur éclairage sur cette période en répondant aux allégations lourdes de sens et aux non-dits tout aussi gravissimes qui se cachent derrière ! Pour bien connaître le fonctionnement du système, Bélaïd Abdesselam sait que ni l'armée ou certains de ses hauts responsables à l'époque rendus responsables de ses déboires, ni les services de sécurité auxquels il a réservé son artillerie lourde en leur demandant de rendre le pouvoir à l'autorité politique, ne réagiront à ces propos, fidèles en cela à leur réputation d'institutions de l'ombre. Bélaïd Abdesselam pense qu'il peut calomnier en toute impunité et que ses vérités, qu'il tient comme il l'a publiquement reconnu dans l'entretien paru dans l'édition d'hier d'El Watan de « déductions personnelles » et non de faits avérés, finiront par s'imposer. C'est ce qu'il a tenté de faire avec sa propre relecture de l'affaire de l'emprisonnement des journalistes d'El Watan avec une affligeante tentation d'écrire l'histoire en trempant sa plume dans le sang des victimes « laïco-assimilationnistes » qu'il continue de pourfendre, aujourd'hui encore, avec la même haine et la même énergie. C'est la seule constance qu'on peut lui concéder dans son parcours d'homme politique. Prenons l'affaire d'El Watan en question ! Ainsi donc, pour Bélaïd Abdesselam, le journal a été odieusement instrumentalisé par le général Nezzar, si on suit bien son imagination débordante, pour faire barrage au patron de la gendarmerie d'alors, le général Abbas Gheziel, qui devait remplacer le général Nezzar au poste de secrétaire général du ministère de la Défense nationale. « C'est une déduction que j'ai faite a posteriori », avoue sans le moindre regret Bélaïd Abdesselam. Voilà comment l'ancien chef du gouvernement gérait les affaires du pays. Sur simple déduction, on pouvait envoyer en prison sans autre forme de procès des journalistes que la justice a, par ailleurs, acquittés plus tard. Quel crédit, alors, peut-on encore accorder à un homme qui, tout en reconnaissant que le véritable pouvoir c'est l'armée, que les services de sécurité fonctionnent comme un pouvoir parallèle qui échappe au pouvoir politique, que le HCE n'était « qu'une caisse de résonance », a accepté, malgré tout, des responsabilités gouvernementales dans de telles conditions ?