Sites Faïzi 1, Faïzi 2, Bateau cassé, les Ondines... A entendre ces noms, cela pourrait faire référence à de belles cités promotionnelles ou résidentielles où les espaces verts et le calme régneraient en maître. Et pourtant, c'est tout à fait le contraire. Le décor est tout autre. Ce sont des noms de sites de chalets situés dans les communes de Bordj El Bahri, Bordj El Kiffan et Aïn Taya entre autres. Par manque de temps et à défaut de logements, les victimes du séisme du 21 mai 2003 y ont été recasées. Une multitude de chalets collés les uns aux autres forment ces sites. A peine de quoi respirer ! Des chalets un peu comme ceux des villages agricoles de la révolution agraire de 1970 mais en plus grand nombre. Les espaces verts sont inexistants, à part quelques endroits bêchés par les locataires en manque de verdure ou pour mieux délimiter leur territoire. Des familles, composées de 8 à 14 personnes pour certaines, sont entassées dans des réduits de 36 m2 ! Difficilement imaginable ! Avec les grosses chaleurs, c'est à peine si l'on arrive à respirer dans ce container. L'un des ménages nous informe qu'il était là « pour quelques mois, voilà maintenant près de 4 ans que nous vivotons dans des conditions des plus déplorables ». Un père de famille dira : « Je ne suis pas une victime du séisme. On m'a recasé dans ce site parce que le projet de l'autoroute traversait l'endroit où j'habitais à Kouba. J'y ai vécu plus de 40 ans. J'attends un éventuel relogement, en vain. » Et à un autre d'ajouter : « Nous avons été oubliés des autorités. Les relogements effectués ont toujours touché les privilégiés, puisqu'à peine arrivées sur le site, ces familles y demeurent 6 à 12 mois seulement pour rejoindre des logements neufs. » Ainsi, les victimes du 21 mai 2003, des personnes qui habitaient des bidonvilles ou maisons vétustes, des expropriés attendant leur relogement... se côtoient dans cet univers cosmopolite. A la nuit tombée, quelques personnes osent s'aventurer à l'extérieur. L'éclairage public est inexistant, accentuant la suspicion dans ces « demeures » de fortune. « L'insécurité est notre lot quotidien. Nous sommes obligés d'accompagner nos enfants à l'école. Nous avons trop peur qu'ils soient la proie de délinquants ou d'un kidnapping. Avec les temps qui courent, on ne sait jamais. On ne peut faire confiance à personne. Et l'affaire du petit Yacine, on n'est pas près de l'oublier », expliquera une mère de famille rencontrée sur les lieux. Par ailleurs, tous les sinistrés ne semblent pas être dans le besoin d'un logement puisque quelques-uns se sucrent en été en louant ces chalets aux vacanciers en quête d'évasion. La location, c'est un secret de Polichinelle. En effet, tout le monde est au courant de ce trafic, et personne ne semble s'en offusquer. Et comme l'eau est disponible H24, c'est plutôt un avantage lorsque l'on sait que même les complexes touristiques et les centres de vacances font face à ce problème épineux. Des personnes louent leur chalet durant la période estivale moyennant 25 000 à 35 000 DA/mois. Une façon de faire du business d'été. D'autres, qui ont où loger, louent ces chalets à l'année pour un pécule variant de 9000 à 12 000 DA, c'est selon la connaissance. « Chaque été, des gens se succèdent dans un des chalets pour des périodes de 15 jours à 1 mois. Une des personnes m'a dit qu'elle avait loué ce chalet pour 15 jours à 15 000 DA. C'est le filon de l'été pour les débrouillards », nous informera un sinistré de Bab El Oued. Cependant, les autorités concernées font la sourde oreille. Chacune se renvoie la balle. Ainsi, l'OPGI ne s'occuperait que de la gestion des chalets, les APC du recensement, la wilaya de l'attribution de décision. Aucun de ces organes n'est concerné par la maintenance. L'acquisition d'un chalet a coûté à l'Etat quelque 80 millions de centimes. Ce qui équivaut à des millions de dinars investis pour l'achat de ces containers seulement. Faute d'une loi claire concernant les sites des chalets pour les réhabiliter en attendant le recasement des sinistrés — ce qui n'est pas pour demain au vu des 4 années déjà entamées, alors qu'il était question de 18 mois maximum —, les chalets se détériorent au vu et au su des autorités.