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Abdelouahab Ziani. Président de la fédération agroalimentaire de la Confédération des industriels producteurs d'Algérie « Le producteur ne peut pas faire du social à la place de l'Etat »
Il y aurait aujourd'hui, quelque 900 000 vaches laitières en Algérie susceptibles de produire 2 milliards de litres de lait. Pourquoi les agriculteurs ne développent-ils pas l'élevage des génisses alors que cette activité est subventionnée par l'Etat ? D'abord, je ne suis pas d'accord avec ces chiffres. Il n'y a, d'après les professionnels, que 300 000 têtes et elles ne produiraient que 600 millions de litres de lait. Si on en est là aujourd'hui, la raison est simple. Quand une vache arrive de ses verts pâturages européens, elle est capable de produire jusqu'à 48 litres de lait par jour. Une fois en Algérie, nourrie au foin, dans un environnement différent de son environnement d'origine, elle ne produit plus que 20 litres par jour et encore, pas tous les jours. Maintenant, calculons : un sachet de lait cru pasteurisé est vendu 35 DA. Avec les 7 euros de subvention, on arrive à 42 DA. Multipliés par 20 litres, on arrive à 840 DA. Une vache, avec les deux hectares d'herbes vertes et les 150 litres d'eau dont elle a besoin tous les jours, coûte à l'éleveur 2 500 DA par jour ! Vous voyez le manque à gagner ? La subvention est aujourd'hui nettement insuffisante. L'agriculture ne peut, donc, pas vivre sans subvention ? Le marché est tellement déséquilibré que l'Etat doit nous aider. Et pour commencer, libéraliser les prix du lait reconstitué. Tant qu'il y aura des sachets de lait à 25 DA, le lait cru ne pourra pas émerger. D'accord, si le sachet passe à 50 DA, ce sera dur pour le citoyen. Mais c'est l'étape nécessaire pour permettre à l'éleveur de trouver un marché. Sans compter que la production de lait cru génère aussi la production de beurre, de crème et d'autres métiers : les tanneurs et d'autres professionnels spécialisés dans l'élevage des veaux… D'un autre côté, en vendant 25 DA un sachet de lait qui lui coûte 55, le producteur de lait reconstitué ne peut pas s'en sortir. Combien y a-t-il de gens dans le besoin qui ne peuvent pas se payer un sachet à 50 DA ? Trois à cinq millions ? On ne peut pas demander au producteur de faire du social pour 30 millions d'Algériens à la place de l'Etat. Comment renverser la vapeur en passant d'une économie d'importation à une économie de production ? Par transition. On importe aujourd'hui 900 millions de dollars de poudre par an. L'année prochaine, on décide de plafonner à 800 millions et les 100 millions mis de côté sont redistribués aux éleveurs, sous forme de subventions. Et passe à 700 millions l'année d'après et ainsi de suite. Chaque année, on augmente le niveau de production de 10%. Dans 10 ans, on n'aura plus besoin d'importer de poudre. Restera encore à résoudre le problème de la collecte et de la distribution... De nombreux terrains agricoles ne sont pas utilisés. Que l'Etat responsabilise ces producteurs en leur disant : « Je vous laisse créer une ferme pilote avec 50 ou 100 vaches, mais c'est vous qui vous en occupez et qui mettez le lait en sachet et qui vendez les produits dérivés du lait cru. » La distribution pourrait être, ensuite, organisée par des coopératives.