Pendant deux jours, le Premier ministre irakien a occupé les devants de la scène assénant ses vérités sur une guerre, qui ne fait que se prolonger dans le temps et causer des dégâts que l'on juge déjà irréparables pour ce pays. Il a, de ce fait, précédé les Américains soumis, quant à eux, à un déluge d'appréciations sur ce thème en général et sur le Premier ministre irakien incapable d'appliquer intégralement un plan américain. Et encore, d'éminentes personnalités, à commencer par celles qui conduisent cette guerre sur le terrain, ont commencé hier à en parler devant le Congrès de leur pays. Il s'agit du chef de la Force multinationale et de l'ambassadeur des Etats-Unis dans ce pays. Il n'est pas sûr que ces deux responsables disent autre chose que le ministre de la Défense, Robert Gates, qui avait déclaré que les Etats-Unis n'étaient pas en train de gagner la guerre. Les deux hommes devraient subir les feux croisés de nombreux élus démocrates, exigeant que les troupes commencent à se retirer d'un conflit qui a tué plus de 3700 soldats américains, ainsi que des dizaines de milliers d'Irakiens et englouti des centaines de milliards de dollars. Plus de quatre ans après le début de l'offensive américaine, en mars 2003, et huit mois après l'annonce de l'envoi de nouveaux renforts, qui ont porté le nombre de soldats américains en Irak à 168 000, des visions contradictoires de la situation sur le terrain s'affrontent. Dans une lettre aux troupes diffusée vendredi, le général Petraeus a évoqué une « évolution globale encourageante ». Mais le GAO, organisme américain indépendant chargé des audits pour le Congrès, a exprimé des doutes la semaine dernière sur la réalité de la baisse des violences. Sur fond de campagne électorale pour les élections de 2008 et face à une opinion réclamant un début de retour des troupes, les démocrates devraient relancer leur offensive. Mais, faute de majorité assez confortable, ils restent suspendus aux décisions du président Bush, qui doit remettre un rapport au Congrès sur la situation en Irak et s'adresser aux Américains avant la fin de la semaine. Ainsi donc, M. Nouri al-Maliki a affirmé hier, avoir « empêché l'Irak de sombrer dans la guerre civile », dans un discours devant le Parlement irakien sur le bilan de son gouvernement. « Nous avons réussi à empêcher que l'Irak ne sombre dans la guerre civile, malgré toutes les tentatives de déstabilisation des parties locales et internationales », a déclaré M. Maliki. Le Premier ministre s'exprimait devant les députés irakiens. Par ailleurs, dira t-il, « 14 178 membres des groupes armés collaborant avec Al Qaïda nous ont rejoints et s'entraînent actuellement dans des centres de formation des forces de sécurité irakiennes », a annoncé le Premier ministre. M. Maliki faisait référence à une nouvelle stratégie mise en œuvre depuis six mois par l'armée américaine, avec le soutien des autorités irakiennes dans la province d'Al Anbar, ainsi que dans certains quartiers de Baghdad. Les tribus et les chefs locaux collaborent, désormais, avec les troupes irakiennes et américaines. Cette stratégie, couplée à un vaste plan de sécurisation de la capitale irakienne, a nécessité l'envoi de nombreux renforts de l'armée américaine, qui compte aujourd'hui 168 000 hommes dans le pays. « Les actes de violence ont diminué de 75% dans Baghdad et dans la province d'Al Anbar, depuis que l'armée américaine a lancé son opération », a ajouté M. Maliki. Dimanche toutefois, le porte-parole du gouvernement irakien affirmait qu'il est encore trop tôt pour mettre en place un calendrier de retrait des troupes américaines d'Irak, où le gouvernement a toujours besoin du soutien de la coalition internationale. « Ce n'est pas le moment de mettre en place un calendrier de retrait », a-t-il souligné, en référence au très attendu témoignage du commandant de la Force multinationale en Irak, le général David Petraeus, devant le Congrès à Washington. D'autre part et dans le même ordre d'idées, le Royaume-Uni était prêt à retirer ses Forces de la ville de Bassorah, dans le sud de l'Irak, dès avril, mais a décidé de retarder ce départ à la demande des Etats-Unis, a indiqué le commandement britannique en Irak dans une interview publiée lundi. « Les Américains nous ont demandé de rester plus longtemps », a ajouté le responsable au quotidien britannique, en précisant que la décision de rester dans la ville avait été le résultat d'une « stratégie politique décidée au plus haut niveau ». Nul doute qu'il y aura, un jour, le retrait des troupes étrangères d'Irak. Mais comment et quand ? Et que restera-t-il alors de l'Irak ?