Long, long est le spectacle El Achiq, Aouicha ouel Harraz, mais il est en conformité avec cette chanson d'écoute qui lui sert de prétexte qui appelle forcément à la « gaâda ». D'ailleurs, l'écriture scénique respire à son rythme mais surtout en épouse les contours de la mélodie, se déployant en « qsida » théâtrale déclamant un hymne à notre patrimoine culturel et artistique qu'il soit lyrique, poétique, musical et chorégraphique. Longues, longues ont été les acclamations du public témouchentois, un public en majorité jeune, parce qu'il a eu du plaisir plein les yeux, les oreilles et l'esprit. Fouzia a réhabilité pour lui un imaginaire « périmé » selon l'expéditif lexique juvénile. Et pour réussir la magie, elle s'est appuyée sur un prétexte rien de plus classique et le mieux partagé universellement : la folie de l'amour. L'histoire est puisée du poème lyrique de cheikh El Mekki Ben El Korchi. Pour la déployer pour la scène, elle a mis à contribution, les talents avérés d'auteur de Mohamed Charchal. Elle s'est entourée de Mohamed Boulifa pour la musique, ce qui constitue sa troisième collaboration avec elle en matière de théâtre musical. Pour les danses, Nouara Idami a chorégraphié rien moins que la grâce. Enfin. Pour ce qui est de la scénographie, Fouzia a fait appel à un complice de toutes ses créations : Noureddine Zidouni. Et au sein de la trentaine de comédiens, danseurs et chanteurs, dirigés magistralement, elle a mis un seul nom connu des scènes théâtrales : Hamid Gouri. Celui-ci a composé un « harraz » plutôt pathétique que cruel même s'il reste diabolique. C'est un Don Juan doublé d'un démiurge, victime d'un amour aussi exclusif qu'impossible pour Aouicha, elle éprise d'El Achiq. El Harraz qu'on devrait plutôt détester nous est rendu plutôt aimable, Gouri lui prête de la grâce, de l'élégance et une bonne dose d'humanité. Tout gravite autour de son personnage que l'on se prend à penser que la pièce aurait dû être intitulée El Harraz, Aouicha ouel Achiq. Autour de lui, une pléiade de talents lui donne et se donnent la réplique : Ahmed Merzougui en achiq, Abdelkrim Beber en Touhami, l'ami, Nadjia Laâraf en Jazia, Abdelaziz Charef en maître de la cité et père de Aouicha, campée par Nesrine Serghini, Karima belbaz est Mahdjouba qui partage un tendre amour avec Touhami. Il y a également Saliha Idja en Houria, incarnant une houri et qui fait le désespoir de Taous, sa mère, campée par Sinia Goulala. Enfin et pour clore la liste, il y a Helali Nesma en mère éplorée de Aouicha. Décidément, le théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou qui va voir le jour incessamment et dont El achiq, Aouicha ouel Harraz est sa première production, va naître sous une rutilante auspice.