« Désert culturel » : voilà des mots qui ne font pas bon ménage. Pourtant le désert est empli de culture et, depuis longtemps déjà, il inspire fortement les écrivains et les artistes. On a coutume d'associer le désert à la culture pour décrire une situation d'indigence culturelle. Pourtant, à bien y regarder, le désert est loin de mériter cet usage, étant lui-même un espace qui regorge de traditions culturelles orales ou artistiques. Ainsi, la présence d'un des plus vastes musées à ciel ouvert du monde, avec des peintures et gravures qui remontent à plus de dix mille ans, est déjà un élément important de cette dimension culturelle du désert. On pourrait citer de même toutes les expressions musicales, l'imzad ou encore les musiques targuies ou gnaouies qui nous sont parvenues du ou par le Sahara. Mais outre que le désert est lui-même lieu de cultures et d'art, il en est aussi, pourrait-on dire, l'objet représentant depuis les temps les plus reculés une source d'inspiration d'une puissance aussi forte que les mondes inconnus du cosmos. Il est une des plus grandes attractions de l'esprit humain et tous les créateurs ont, au moins une fois dans leur vie, envisagé la possibilité de traiter du désert. Les écrivains et peintres orientalistes qui recherchaient spécifiquement l'exotisme et qui pensaient l'avoir trouvé sur la rive sud de la Méditerranée se rendirent compte, en poussant plus loin leurs incursions, qu'il existait un autre univers, plus vaste, plus différent, plus propice encore à leurs fantasmes les plus fous. Par la suite, les cinéastes et photographes leur emboîtèrent le pas et donnèrent à cet élan la force de l'image mécanisée et de ses incroyables moyens de diffusion. On aurait pensé que la réalité des lieux diffusée par les reportages limiterait les légendes. Bien au contraire, celles-ci se sont multipliées avec le cinéma de fiction et notamment le succès extraordinaire en 1921 du film L'Atlantide (voir article La ruée vers le sable), tourné en Algérie comme de nombreux autres films relatifs au désert. Décor aux dimensions cosmiques, le désert ainsi que les mystères supposés ou réels de ses habitants n'ont pas cessé à ce jour d'offrir aux écrivains, poètes et peintres, un tremplin à l'imagination. Force est de constater que jusque-là, les étrangers ont plus produit que nous sur notre propre désert et que, de notre côté, à de rares exceptions, nos productions artistiques ou littéraires n'ont pas encore donné à ce lieu magique toute la lumière qu'il mérite.