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Mondher Mahdjoubi. Président des affaires médicales oncologie du groupe Roche « Un traitement qui permet une augmentation des chances de survie de 33% »
Avastin, traitement révolutionnaire du cancer, s'avère aussi pouvoir prolonger la vie des patients souffrant d'un cancer du poumon au-delà d'une année. Quel est le mécanisme d'action de ce médicament sur la tumeur ? Les cellules cancéreuses ont besoin d'aliments. Elles ont la capacité de produire des produits qui l'aident à créer de nouveaux vaisseaux. L'un des produits identifié est le VEGF, facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (Vascular Endothelial Growth Factor), responsable de la création de ces nouveaux vaisseaux. Ce processus s'appelle l'angiogénèse. Avastin est un produit qui neutralise justement cette VEGF. A court de vaisseaux, la tumeur se trouve privée de sa source d'énergie et d'aliments, et par conséquent, elle meure et se nécrose. C'est en cela qu'Avastin est révolutionnaire. En combinaison avec la chimiothérapie, on double l'effet thérapeutique, et la tumeur se retrouve isolée et affamée... La première démonstration spectaculaire a été présentée en 2003 où on a observé, pour la première fois, une amélioration chez des malades qui ont des cancers du colon métastasiques qui normalement après chimiothérapie ont une médiane de survie de 12 à14 mois, et, à ce stade, 50% des malades décèdent. L'addition d'Avastine à la même chimiothérapie a montré que l'autre groupe de malades avait une médiane de survie de presque 22 mois ; une augmentation de près de 33% de réduction de risque de mort. Ce qui est sûr est que la combinaison d'Avastin à une chimiothérapie double le taux de réponse. Des études sont en cours pour développer le traitement dans les phases précoces pour d'autres formes de cancers, tels la prostate, le rein, etc. Est-ce que tous les malades atteints du cancer du poumon peuvent bénéficier de ce traitement ? Ce serait faux de vous dire que cela marche à 100% pour tous les cas. Mais, l'addition d'Avastin à une chimiothérapie double le taux de réponse. Il y a un bénéfice pour deux fois plus de malades par rapport à ceux qui sont traités par chimiothérapie seulement. Dans le cas du cancer du sein, nous avons deux fois plus de réponse lorsque les malades sont traitées avec la chimiothérapie en combinaison avec Avastin. Il y a eu des réponses complètes de tumeurs résistantes à la chimiothérapie et avec Avastin seulement, nous avons constaté la disparition des mérastases. Il faut savoir qu'aujourd'hui, il y a un besoin d'utiliser plus d'un moyen thérapeutique. Les malades qui ne répondent pas sont une minorité. Existe-t-il un médicament qui a la même action thérapeutique sur les différentes formes du cancer ? Non. C'est le premier traitement antiangiogénique. Il est le premier traitement de cette nouvelle classe thérapeutique. Il est mondialement disponible. Il a son autorisation de mise sur le marché (AMM) aux Etats-Unis et dans toute l'Europe. A-t-il des effets secondaires ? Avastin a des effets secondaires comme tout autre médicament. Ce qui est sûr, est que le malade ne souffre pas comme ce que nous avons l'habitude voir, à savoir nausées, chute de cheveux, vomissements, chute de globules blancs. Par contre, il y a des cas où l'on peut constater une hypertension artérielle mais qui est très bien contrôlée dans des proportions qui varient entre 5 et 9% selon les doses. Il y a eu quelques cas rares de phlébite ou de thrombose. Quelles sont les perspectives du groupe Roche en matière de recherche pour la lutte contre le cancer ? La stratégie de développement du groupe se base sur trois volets. Il est question d'abord de continuer à évaluer les produits qui sont déjà en phase II et III à des stades moins avancés. Puis, développer de nouvelles molécules. On est en train de travailler sur un certain nombre de molécules dont celles qui sont déjà évaluées chez l'homme en phase 1 ou 2. Nous avons déjà les premiers signaux sur leurs bénéfices, leurs intérêts et leur tolérance. D'autres sont en phase préclinique, c'est-à-dire chez l'animal. Ils vont bientôt passer chez l'homme. Le troisième volet qui est un axe de recherche fort pour nous est la partie marqueur biologique pour justement continuer à affiner la sélection des malades et les cancers. Parce que le traitement de demain est un traitement à la carte qui d'un malade à un autre, pour la même tumeur, va impliquer deux ou trois agents biologiques. De par son investissement dans le domaine du diagnostic et son engagement dans le domaine de cancérologie, Roche accorde une grande importance dans sa stratégie au développement de ce qu'on appelle le biomarqueur. Qu'en est-il des programmes des essais cliniques au Maghreb ? Au Maghreb comme partout dans le monde, nous avons des études cliniques en phase d'enregistrement auxquelles des centres d'investigation peuvent participer pour répondre à un besoin local. Il y a un programme très vaste qui comporte 35 études cliniques et des milliers de malades, rien que pour les cinq produits que j'ai cités lors de mon intervention Au rythme où va la recherche, pensez-vous qu'on arrivera un jour à vaincre certaines formes du cancer ? On a rêvé un jour d'un traitement miracle. Mais il faut savoir que le cancer est une maladie très complexe, et c'est grâce au développement de la biologie et de la génétique qu'on est en train de comprendre le processus cancéreux pour adapter notre approche thérapeutique. Je pense que nous avons encore du chemin à faire pour vaincre cette maladie. Ce sera peut-être dans 20 à 30 ans.