L'université des sciences humaines et sociales organise en partenariat avec l'Institut Maghreb-Europe son université d'automne à Alger. Plusieurs enseignants en sociologie et chercheurs des pays du Maghreb et d'Europe prennent part à cette université pour la formation des doctorants dont le thème retenu est « Les nouvelles migrations, logiques sociales, circulations réseaux et engagements ». Les objectifs d'une telle manifestation qui se poursuivra en ateliers jusqu'au 8 novembre consistent, notamment, à prendre connaissance de l'état des informations, des théories et des enquêtes sur les migrations internationales, à se confronter à la complexité des approches méthodologiques en matière de recherche sur ce thème et permettre aux doctorants de s'initier à la pratique de la recherche en sciences sociales sur les mobilités transnationales. A l'unanimité, les participants à cette rencontre ont révélé que le phénomène de l'immigration a toujours existé. Seulement, aujourd'hui, il se présente sous d'autres formes. D'où la nécessité de mener des enquêtes dans les pays des deux rives de la Méditerranée afin de déterminer, d'étudier et d'analyser les causes et les raisons objectives de la migration au niveau mondial. Lors de cette première journée, Aïssa Kadri, directeur de l'Institut Maghreb-Europe, où se déroulent les travaux, a suggéré de définir avec exactitude la nature sociologique des populations qui immigrent, faisant remarquer qu'actuellement, les candidats à l'immigration ont plus de capital culturel, comparativement à l'ancienne génération, constituée essentiellement de paysans.Il a également tenu à faire la distinction entre l'exil et l'émigration. Relevant dans ce contexte qu'il est difficile de classifier les migrants, faute de statistiques. Aïssa Kadri citera trois catégories de nouveaux migrants. Il s'agit en premier lieu des diplômés de la première génération post-indépendance sortis des universités nationales ou des instituts supérieurs d'enseignement. La deuxième catégorie prétendant à l'émigration regroupe les diplômés formés à l'étranger dans les décennies de politique de formation à l'étranger dans un moment de fort investissement éducatif des Etats nouvellement indépendants. Ces diplômés, selon l'intervenant, après avoir été certifiés en post-graduation à l'étranger et avoir inscrit dans le pays de formation un ancrage provisoire, ont mal vécu — confrontés à des problèmes d'équivalences, d'installation — leur retour dans leur pays d'origine. Enfin, la troisième composante, explique M. Kadri, comprend les nouveaux diplômés produits de systèmes d'enseignement pléthorique en voie de désinstitutionalisation, sinon voués au chômage, du moins payés en monnaie de « singe » qui s'appuient sur des réseaux familiaux, de solidarités traditionnelles mais aussi sur une partie d'anciennes élites établies dans les pays de destination pour envisager des départs qui sont vécus comme autant de bouées de sauvetage. Dans ces deux groupes, explique l'orateur, une place spécifique peut être faite aux jeunes femmes diplômées qui se retrouvent dans un rapport de distance par rapport aux valeurs et normes locales, assignant à la plus grande partie d'entre elles des places liées à des situations de domination, de violences, de précarité et d'exclusion. Après ce tour d'horizon, M. Kadri n'a pas omis de parler de la situation qui prévaut actuellement à l'échelle mondiale. Il s'agit de la nouvelle forme d'immigration, « les harraga ». Il dira, à cet effet, que l'on voit actuellement se développer une migration de très jeunes enfants déscolarisés et de moins jeunes qui subissent l'exclusion et la répression de systèmes autoritaires qui les a privés de leurs privilèges. De son côté, René Gallissot, de l'université de Paris 8e, a estimé que la migration est un phénomène contemporain, soulignant toutefois que les déplacements des populations ont toujours existé à travers l'histoire de l'humanité.