Quelque 450 chefs d'entreprises du secteur public économique ont assisté à la rencontre nationale sur la stratégie industrielle, organisée samedi dernier à l'hôtel El Aurassi par l'Union nationale des entrepreneurs publics (UNEP). Ils étaient venus nombreux à cette rencontre dans l'espoir que le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements dévoile le plan de redéploiement des entreprises publiques économiques concocté par ses services pour donner un contenu concret aux pôles régionaux de compétitivité prévus dans le plan stratégique. Ils sont repartis quelque peu déçus de n'avoir entendu de la communication de Abdelhamid Temmar et de ses collaborateurs aucune information nouvelle sur la nature des redéploiements proposés par son département au chef du gouvernement. Aucune information ne saurait être divulguée tant que la proposition à peine au stade d'avant-projet ne reçoive l'aval du conseil du gouvernement. On a tout de même pu savoir que ce dernier se tiendra aujourd'hui, l'intervention du ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements se résume à une simple communication sur le contenu de cet avant-projet qui pourrait à ce stade déjà susciter le désaccord de certains membres du gouvernement. Car, dit-on, le consensus est loin d'être fait sur le contenu et la portée de cette énième restructuration du secteur public économique, certains ministres allant jusqu'à préconiser un retour au système de tutelle qu'exerceront, comme par le passé, certains ministères sur les entreprises de leurs secteurs. Un responsable du ministère de l'Industrie semble même être séduit par cette formule, en citant l'exemple des entreprises des secteurs de l'énergie et des finances (Sonatrach, Sonelgaz, banques) qui sont sous la tutelle de leurs ministères respectifs et qui semblent éprouver beaucoup moins de difficultés que celles qui ne le sont pas. C'est dire qu'on est encore loin de l'adoption de l'avant- projet à ce stade qui ne sera, de surcroît, pas le dernier, puisqu'il faudra également le faire adopter par le Conseil des ministres, présidé par le chef de l'Etat qui aura certainement son mot à dire. Le processus d'adoption pourrait prendre aisément une année au minimum, si on se réfère au temps moyen pris par les trois restructurations précédentes. L'attentisme, qui est déjà de mise au sein des entreprises et institutions publiques (SGP et groupes) qui seront touchées par les redéploiements en projet, risque d'affecter les résultats déjà peu reluisants de ces unités économiques. Les nombreuses questions, qui ont fusé à l'occasion des débats, ont mis en évidence l'inquiétude et quelquefois même le désarroi des chefs d'entreprises qui, pour bon nombre, ont déjà subi quatre restructurations, chacune ayant été présentée comme la panacée pour relancer le secteur public économique dans un contexte d'économie de marché de plus en plus globalisée. On s'est plaint, à juste titre, des retards dans la mise en place des outils essentiels de l'économie de marché, comme le marché foncier, le marché immobilier, le marché des changes, le marché des valeurs mobilières et autres, de même qu'ils étaient nombreux à se plaindre de l'archaïsme persistant du système bancaire algérien. Le PDG d'une entreprise de production de minerais a fait part de l'inquiétude de ses futurs partenaires qui craignent que la restructuration organique de cette entreprise prévue dans le schéma de redéploiement du ministère de l'Industrie ne remette en cause le projet de partenariat pourtant bien avancé au plan des négociations. Le responsable d'une association de transporteurs, parfait connaisseur des problèmes de la SNVI, ne comprend pas pourquoi le gouvernement algérien, parfaitement au courant de la situation qui prévaut dans cette entreprise, qui fut un des fleurons de l'industrie algérienne, tarde à prendre les décisions énergiques qui s'imposent pour la remettre à flot. A l'issue de la rencontre, un chef d'entreprise nous a affirmé, quelque peu désabusé, que les problèmes soulevés sont pratiquement les mêmes que ceux portés à la connaissance des autorités concernées depuis pratiquement le lancement des réformes économiques en 1988. C'est dire l'effort qui reste à faire pour que nos entreprises publiques fonctionnent comme d'authentiques firmes dans une tout aussi authentique économie de marché.