Le journal Le Monde s'enfonce dans la crise l Après le départ forcé de son directeur Jean-Marie Colombani en mai dernier et celui, en 2005, d'Edwy Plenel, directeur de la rédaction, jeudi, c'était au tour du directoire de ce quotidien du soir de remettre le tablier. Paris : De notre bureau Le journal Le Monde s'enfonce dans la crise. Après le départ forcé de son directeur Jean-Marie Colombani en mai dernier et celui, en 2005, d'Edwy Plenel, directeur de la rédaction, jeudi, c'était au tour du directoire de ce quotidien du soir de remettre le tablier. Raison invoquée : la présence trop contraignante de la société des rédacteurs (SRM), premier actionnaire du groupe, dans la prise de décision. Le triumvirat qui dirige le journal depuis juin dernier (Pierre Janet, Eric Fottorino et Bruno Platino) a pris acte « de l'incapacité à pouvoir exercer leurs responsabilités face aux prises de décisions publiques et réitérées de la société des rédacteurs avec laquelle le dialogue est devenu impossible ». Mauvaise raison, selon Michel Dumay, président de ladite société, qui a répondu : « Nous sommes des actionnaires exigeants et cela semble déplaire au triumvirat. » Le même interlocuteur a révélé, fin novembre dernier, l'ampleur des difficultés financières qui fragilise le groupe, après notamment l'acquisition du Midi Libre et de L'Indépendant, deux journaux paraissant dans le Sud-Est. Résultat : le quotidien devrait encore accuser en 2007 une perte sèche de 5 millions d'euros, ce qui ferait porter son déficit global à 150 millions d'euros. Les journalistes accusent Jean-Marie Colombani d'avoir engagé des acquisitions tous azimuts et inappropriée pour l'équilibre financier du journal. Ils lui reprochent également de s'être attribué une indemnité d'un million d'euros lors de son départ, au moment où le quotidien manquait cruellement d'argent. L'autre source du malaise ; le refus par le directeur de la société des rédacteurs d'avaliser les comptes 2007 et le budget prévisionnel 2008 de la filiale Le Monde interactif. Il a considéré que « les flux financiers de la société éditrice du Monde (SEM), maison mère (détenue à 66% par la SEM et à 34% par Lagardère), ne doivent plus s'opérer au détriment de la SEM et qu'ils doivent être revus et corrigés par souci d'équité ». Au total, indique Michel Dumay de la SEM, ce sont 9 millions d'euros qui ont été abandonnés à la filiale (Le Monde.fr) sans qu'ils soient à nos jours remboursés. Avec ces démissions en cascade, Le Monde se retrouve plus que jamais fragilisé. Ses ventes ont chuté ces dernières années, mais son site Internet a gagné de nouvelles parts de marché. La crainte d'un plan de licenciement qui toucherait une centaine de personnes risque d'accentuer la crise. Celle-ci a débuté en mai 2007 lorsque M. Colombani a été poussé vers la sortie. En septembre, c'est Alain Minc, bras droit de l'ancien directeur et membre du conseil de surveillance, qui quitte le journal après avoir été mis en minorité par les salariés. Le 6 décembre, quelque 300 salariés du groupe Monde ont protesté devant le siège du journal contre les hausses des salaires que veulent s'octroyer le triumvirat.