Située sur les hauteurs de Frais-Vallon, Beau-Fraisier, une localité dépendant de l'APC de Bouzaréah, semble mise à l'index. En effet, lors des intempéries du 10 novembre 2001, elle a été sérieusement endommagée. Dès lors, des travaux de réaménagement de la route principale ont été entamés. Des murs de soutènement ont été édifiés à certains endroits pour arrêter les amas de boue qui dévalent en cas de pluie. Depuis, presque quatre années, cette localité n'a pas connu de progrès notable. Sur la route menant à Scafino ou à Mont-Plaisant, longeant Beau-Fraisier, le spectacle qui s'offre à nos yeux est des plus déplaisant : des décharges sauvages sont créées un peu partout, au grand dam des riverains. L'accès difficile à cette voie ne facilite pas la tâche des camions de ramassage des ordures. Les ruelles sinueuses et non bitumées sont parsemées de trous. Il suffit de quelques averses pour les transformer en un véritable bourbier. Les allées menant aux différentes habitations, écoles et autres sont défoncées et impraticables. Des tas de pierres et de gravats sont déposés en plusieurs endroits. Arbres arrachés, l'éclairage est médiocre. En hiver, les habitants de ce quartier ont toutes les peines du monde à rallier Bouzaréah, Triolley ou Bab El Oued. La gadoue qui envahit la chaussée la rend glissante et dangereuse. Les commerçants se comptent sur les doigts d'une seule main et n'offrent pas un grand choix de marchandises à leurs clients. Ces derniers sont obligés de se déplacer vers les localités avoisinantes pour s'approvisionner. Les habitations sont pour la majorité dans un état précaire. En contrebas de la route, les baraques et les constructions illicites foisonnent. En parpaing, au toit en zinc ou en éternit, elles ont été bâties sur des terrains non viabilisés, dans respect des normes de sécurité en matière de construction. Les dizaines de familles qui y ont élu domicile, par nécessité ou par inconscience, ne semblent pas inquiétées outre mesure par le danger qu'elles encourent. L'état des lieux laisse à désirer : manque d'hygiène, d'eau potable, de gaz, de sanitaires pour beaucoup d'entre elles. Pour avoir l'électricité, les habitants de ces logements de fortune ont procédé à des branchements illicites avec tous les risques qui en découlent. Un père de famille rencontré ne cache pas son inquiétude et son désarroi : « Nous ne savons plus à quel saint se vouer. Nous souffrons le martyre. Après el hamla, les responsables locaux sont venus d'eux-mêmes constater l'ampleur des dégâts. Sur le vif, beaucoup de choses nous ont été promises. » Et d'ajouter : « Au début, les travaux battaient leur plein, puis ont ralenti au fur et à mesure, pour enfin s'arrêter. Cela dure depuis des mois. » Un autre citoyen intervient : « Ici nous sommes coupés du reste du monde. Nul ne se soucie de notre sort. Avec les averses, nous craignons énormément pour nos vies. Quand il pleut, nous passons la nuit à évacuer l'eau qui s'infiltre dans nos taudis. Nos enfants sont atteints d'asthme ou de rhumatisme articulaire. Sans oublier la peur d'un nouveau séisme. Au moindre bruit provoqué par un camion qui passe, nous prenons aussitôt la fuite, quelle que soit l'heure, croyant que c'est une secousse tellurique. » A Beau-Fraisier, dont il ne reste de beau que le nom, le temps semble suspendu. On aurait du mal à croire que ce patelin perdu existe bel et bien en plein cœur de la capitale. Ces habitants espèrent un jour voir le bout du tunnel et qu'un écho favorable sera donné à leurs nombreuses doléances.