La fronde dure depuis près de 15 jours. Plusieurs dizaines d'étrangers sans papiers placés dans les centres de rétention administrative du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) et de Vincennes (Val-de-Marne) tentent d'alerter l'administration et l'opinion sur les conditions de leur arrestation et de leur détention « indignes et arbitraires ». Les retenus du Mesnil-Amelot, situé près de l'aéroport de Roissy, avaient rédigé une liste de doléances : manque d'hygiène, sentiment d'être « traités comme du bétail ». Ils décident de la grève de la faim. Les autorités réagissent rapidement à la veille du nouvel an. L'un des porte-parole du mouvement est transféré à Vincennes pour être libéré finalement. Quelques personnes observeraient toujours la grève de la faim. Quelques personnalités ont rejoint le mouvement des sans-papiers. « On est là pour montrer qu'en France il y a des citoyens qui n'ont pas envie que les étrangers soient traités comme ça », clame Josiane Balasko. La comédienne a manifesté mardi avec d'autres personnalités, comme Charles Berling ou la fille de Jack Lang, et quelque 80 militants de RESF (Réseau éducation sans frontières), devant le centre de rétention administratif (CRA) de Vincennes pour dénoncer la situation faite aux sans-papiers. La police est intervenue contre les retenus qui ont refusé de rejoindre leurs chambres pour protester contre leurs conditions. La préfecture évoque « un mouvement d'humeur pour des raisons multiples et confuses ». Pour les associations, cette dégradation est due à la politique du chiffre. Le ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale n'a pas pu atteindre son objectif de 25 000 expulsions pour l'année dernière. En 2010, ce chiffre est revu à la hausse avec 28 000 expulsions. Le ministre Brice Hortefeux muscle son arsenal. Le gouvernement a créé, par décret publié au Journal officiel, dimanche 30 décembre, un fichier informatisé destiné à faciliter l'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Baptisé ELOI, ce nouveau fichier permet d'enregistrer des données personnelles sur l'étranger frappé d'une mesure de reconduite à la frontière ou d'expulsion mais aussi sur l'hébergeant, en cas d'assignation à résidence. Ce fichier permet aux autorités de collecter les données concernant l'état civil de l'étranger (nom et prénoms, sexe et nationalité), sa photo, l'identité de ses parents et enfants, la langue parlée, l'état de la procédure d'éloignement et toute mesure de surveillance policière mise en œuvre. Ces données, accessibles aux agents des préfectures, de la police et de la gendarmerie, devraient être effacées au bout de trois mois, sauf celles concernant l'identité et la filiation, conservées jusqu'à trois ans. Approuvé par la CNIL, le texte du ministère de l'Intérieur serait aujourd'hui « inattaquable », selon la Place Beauvau. Le ministère de l'Intérieur avait tenté une première fois de créer ce fichier par arrêté, en août 2006. Un projet qui a été retoqué à l'époque. Sur les forums internet, une grande polémique se développe avec quelquefois des dérapages dangereux. Sur le site du Figaro, quotidien de droite très proche de Nicolas Sarkozy, les internautes s'adonnent à une surenchère dangereuse. Un lecteur au pseudonyme très courageux (DéDéDu) appelle au meurtre. Dans son message (joliment intitulé « Les liquider »), il confirme son intention : « Oui, les liquider discrètement les clandestins, du moins quelques centaines, et les autres fuiront la France ! (sic) ». Posté à 11h41, il est toujours en ligne à 14h40, sans susciter aucune réaction du journal.