Le ficus est gigantesque. De hauteur, de largeur, l'homme ne possède pas assez de champ visuel pour observer ce ficus. Il faut en faire le tour à pied pour se rendre compte de toute sa superficie mais surtout, de sa curiosité. En effet, le ficus est un arbre dont les racines sont aériennes. Il s'épanouit en hauteur mais également en largeur, en distançant ses racines les unes des autre de manière à occuper de l'espace. Chaque racine peut prendre du volume et ressemble à un petit tronc. Mais là, ce qui importe, c'est qu'en fait d'un ficus, il y en a deux. Il y a deux ficus placés à une distance respectable l'un de l'autre et la curiosité consiste dans le fait qu'il existe un lien entre chacun des deux individus. Un lien horizontal à environ 1m 50 de hauteur et qui va d'un arbre à l'autre comme une poignée de main ou un dard lancinant qui pénètre l'autre. Epanchement amoureux ou accolade amicale ? Nul ne peut le dire. Tout comme il n'est pas possible de dire si le lien est constitué de chacun des deux individus ou s'il provient entièrement de l'un pour pénétrer l'autre. Mystère. L'allée des platanes est dépourvue de tout feuillage en cette saison hivernale, mais l'arbre ne semble pas avoir honte de cette nudité exposée. Les branches levées droites vers le ciel semblent applaudir un quelconque événement. Au centre de l'allée, une intersection traverse le jardin d'est en ouest. Et pour marquer le croisement, une rotonde de platanes. L'un d'entre eux, situé sur le versant ouest, se distingue par un branchage quelque peu original. En effet, parmi les branches végétales, une branche en fer. Ou plutôt un bras. A mieux y regarder, une sorte d'extension ferreuse se moulant au décor comme un caméléon à son rocher. En fait, il s'agit d'un reste de lampadaire que le platane, dans son extension, a laissé le transpercer pour l'accueillir ou l'adopter comme s'il s'agissait d'une de ses branches. Le lampadaire a disparu, seul le haut du tube s'est mêlé aux branches. Heureuse revanche du végétal ou adoption intermatière.A la sortie du jardin vers le nord, comme pour rejoindre la rue Belouizdad, un ficus s'est imposé en maître des lieux. L'allée qui mène vers la sortie ou l'entrée, selon le sens de la promenade, est bordée de végétaux protégés par une clôture d'environ deux mètres. C'est là qu'un ficus tape du poing et cravache les malheureuses plantations alentour pour montrer qui est le chef. Dans sa périphérie, en effet, se trouve un malheureux palmier, California. Le ficus qui a, semble-t-il, trouvé trop étroit l'espace accordé à sa majesté, a d'abord encadré le palmier de différentes racines aériennes, comme pour l'avertir du danger qui le guette. Puis progressivement, des racines sont venues enlacer puis étrangler le palmier, dont il ne ressort de cette étreinte machiavélique qu'une partie. Comme le serpent qui s'enroule autour de sa proie, l'étouffe et la tue.