De 3,4% en 2007, la croissance économique réelle en Algérie devrait se situer à 4% en 2008 et à 3,8% en 2009, selon le dernier rapport de la Banque mondiale. Côté officiel, les taux de croissance publiés dans le rapport de présentation de la loi de finances 2008 font état de 3,4% en 2007 et d'un taux prévisionnel de 5,8% pour l'année en cours. Au-delà des divergences de chiffres et des méthodes de calculs des différentes parties (officielles ou autres), le taux de croissance réelle de l'Algérie reste, de l'avis d'experts, faible et en deçà de ce qui est attendu d'un pays connaissant une conjoncture des plus favorables. Des recettes en devises considérables avoisinant les 60 milliards de dollars, une dette externe assainie et un matelas de réserves de changes frôlant les 100 milliards de dollars sont là pour en témoigner. Des pays voisins comme le Maroc et la Tunisie, qui ont été ces dernières années fortement handicapés par la facture énergétique et la sécheresse, affichent de plus en plus, d'après le rapport de la Banque mondiale, une solide santé économique grâce à la diversification des investissements et leurs exportations. Pour 2008, nos deux voisins s'attendent à des taux de croissance supérieurs ou égaux à 5,5% pour le Maroc et 6% en Tunisie, autrement dit plus élevés que celui de l'Algérie. Le paradoxe est encore plus frappant en Algérie quand on sait que plus de 150 milliards de dollars sont injectés dans l'économie nationale supportés entièrement par le Trésor public. De vastes chantiers d'infrastructures sont lancés par le gouvernement dans différents secteurs d'activités, notamment dans les travaux publics, le bâtiment, l'hydraulique et le transport. Pour Hachemi Siagh, « le taux de croissance réalisé par l'Algérie demeure faible comparé aux pays en voie de développement connaissant la même conjoncture favorable et engageant le même niveau d'investissement ». Ces pays, fait-il remarquer, enregistrent des taux de croissance de deux chiffres. A quoi peut-on alors imputer la faiblesse du taux de croissance en Algérie ? L'explication, souligne nombre d'analystes, est à chercher dans les détails des projets d'infrastructures lancés par les pouvoirs publics. Au-delà de leur extrême importance pour le pays, les innombrables chantiers d'infrastructures de base profitent avant tout aux entreprises étrangères. En plus des marchés qu'elles raflent, elles ramènent avec elles la main-d'œuvre nécessaire pour la réalisation des projets, et ce, « faute d'une main-d'œuvre locale qualifiée ». Le secteur du bâtiment et des travaux publics sont à ce titre les exemples les plus édifiants. Ils sont près de 35 000 Chinois à travailler sur des chantiers de BTPH en Algérie. C'est le cas également pour d'autres chantiers où des centaines de postes d'emplois sont occupés par la main-d'œuvre étrangère. Le niveau de qualification en Algérie, de l'avis d'experts nationaux et étrangers, constitue un véritable casse-tête au moment où le taux de chômage au milieu des jeunes est fortement élevé. Construire des infrastructures est certes nécessaire, note M. Siagh, mais il faut que cela ne représente pas le seul objectif. « Il faut jouer sur tous les tableaux, à commencer par la promotion de l'investissement productif et la création d'entreprises. » L'amélioration du climat de l'investissement doit aussi, recommande-t-il, constituer une priorité. « Il faut œuvrer pour la création de champions nationaux dans tous les secteurs », indique l'expert en citant comme exemple la Corée du Sud qui, grâce à ses champions industriels nationaux, caracole en tête des nations développées.