Trois cadres et un agent du service de l'armurerie du commissariat central d'Alger ont été mis sous mandat de dépôt, et un autre policier placé sous contrôle judiciaire. Les mis en cause sont poursuivis pour mauvaise gestion, vol et trafic d'armes. Une information judiciaire a été ouverte concernant l'inspecteur général et l'ex- secrétaire général de la Sûreté nationale. Plusieurs policiers et officiers de police ont été présentés cette semaine au parquet de Sidi M'hamed, à Alger, pour une affaire des plus scandaleuses. Les mis en cause, qui exerçaient au service de l'armurerie du commissariat central, subtilisaient des pièces d'armement qu'ils revendaient sur le marché de la contrebande. Selon des sources proches de l'enquête, c'est à la suite d'une dénonciation que le pot aux roses a été découvert et l'agent qui volait les armes arrêté. Trois cadres à la tête de ce service ainsi qu'un agent ont été déférés au parquet, alors qu'un quatrième policier a été placé sous contrôle judiciaire. Cette affaire a suscité de nombreuses interrogations, notamment sur la destination des armes volées. Mais l'enquête menée par la police judiciaire de la sûreté de wilaya d'Alger, nous a-t-on expliqué de source sûre, a permis de mettre le grappin sur l'ensemble des personnes impliquées et surtout de récupérer toutes les pièces volées, que ce soit les pistolets ou les munitions. Il s'agit, ont expliqué nos interlocuteurs, non seulement « de trafic d'armes à feu, mais aussi de mauvaise gestion et de malveillance dont sont responsables les cadres incriminés ». L'instruction, qui est en cours actuellement, pourrait dévoiler d'autres informations ou arriver à d'autres implications. Il est important de signaler que cette affaire intervient au moment où deux hauts responsables au niveau de la Sûreté nationale, en l'occurrence l'inspecteur général et le secrétaire général, viennent de faire l'objet de l'ouverture d'une information judiciaire auprès du parquet de Blida, a-t-on appris de source policière. Les noms des deux responsables, un suspendu récemment de ses fonctions et l'autre fraîchement mis à la retraite, ont été cités dans l'affaire de l'ex-directeur de la cité universitaire de Dergana, et le coordinateur pour la région est d'Alger, M. Brahimi, condamné il y a quelques mois par le tribunal de Chéraga dans une affaire de corruption. Selon nos sources, lors des perquisitions, les policiers auraient trouvé un document officiel falsifié dans lequel la responsabilité des deux cadres de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) pourrait être engagée. Après expertise du laboratoire scientifique de Châteauneuf, à Alger, confirmant le faux, une information judiciaire a été ouverte au sujet de l'implication des deux responsables. L'enquête a été menée et le rapport mis sur le bureau du parquet de Blida, qui aura à désigner le tribunal qui instruira l'affaire. M. Brahimi avait, rappelle-t-on, fait l'objet d'une plainte déposée par un groupe d'étudiantes à son encontre auprès du commissariat de Dar El Beïda pour harcèlement « sexuel et chantage ». A l'époque, le directeur avait nié catégoriquement les faits en déclarant que la plainte a été manigancée par « des groupes de pression composés de hauts responsables d'importants fournisseurs de la cité universitaire (...) ». Quelques années plus tard, à la suite d'une lettre de dénonciation transmise à la police par un fournisseur de la cité universitaire, une souricière a été tendue à l'ex-responsable, lequel a été arrêté pour corruption. Mais l'enquête s'est poursuivie avec l'apparition d'un nouveau élément lié au faux sur un document officiel. Les investigations ont permis de remonter aux deux hauts responsables de la DGSN. Ce n'est pas la première fois que des cadres de cette institution soient mêlés à des affaires liées à la corruption dans les milieux d'affaires. Il y a quelques mois, ce sont des commissaires, l'ex-chef de la sûreté de wilaya de Tipaza, le directeur de la police judiciaire de Tipaza, ainsi que le directeur de la clinique de la sûreté nationale les Glycines qui se sont vu poursuivis pour avoir remis un vrai faux rapport blanchissant Achour Abderrahmane, impliqué dans le scandale du détournement de 32 milliards de dinars de la BNA. Le dossier, qui à ce jour n'a pas livré ses secrets, risque de connaître des rebondissements, même si en cours de route le directeur de la clinique des Glycines a pu s'en sortir. L'affaire a été renvoyée devant le tribunal criminel près la cour d'Alger et le procès est très attendu. De par le rôle qu'elle joue dans la moralisation de la vie publique et la sécurité des biens et des personnes, l'institution policière n'a pas le droit de laisser passer des agissements aussi graves, qui risquent non seulement de porter atteinte à son image et au sacrifice de ses membres, mais aussi d'avoir des conséquences dramatiques sur la vie des citoyens. Voler des armes pour les vendre implique de lourdes conséquences sur les vies humaines dans une situation marquée par un terrorisme aveugle, et participer à la confection de faux sur des documents officiels est également aussi grave, parce qu'il s'agit d'un acte qui participe à la prolifération de la grande criminalité. Celle-là même que les policiers sont censés combattre et qui a coûté la vie à bon nombre de leurs collègues.