Les plus récentes déclarations d'officiels américains et irakiens avaient toutes tendances à accréditer l'idée d'une amélioration de la situation en Irak. Chiffres à l'appui, on se laissait aller à l'idée que, effectivement, il y avait moins de morts dans ce pays. Mais quelques attentats et des chiffres de l'office des Nations unies pour les réfugiés ont vite fait de rétablir la vérité. Une bien cruelle vérité. Comme les Américains l'ont eux aussi constaté en annonçant que cinq de leurs soldats ont été tués vendredi en Irak dans deux attaques séparées, dont l'une à Baghdad. « Quatre militaires de la Division Baghdad de la Force multinationale ont été tués lorsque leur véhicule a été détruit pas un engin explosif, alors qu'ils étaient engagés dans une opération de combat dans un quartier du nord-ouest de Baghdad », indique un communiqué. Un second communiqué a annoncé « qu'un soldat de la Division Nord de la Force multinationale est mort des suites de ses blessures causées par une explosion près de son véhicule, alors qu'il était en opération dans la province d'At Tamim », au nord de Baghdad. Trois autres militaires ont été blessés dans cette attaque, ajoute le communiqué. Ces décès portent à 3957 le nombre de militaires américains tués en Irak depuis le début de l'invasion américaine, en mars 2003, selon un bilan établi à partir de données du site Internet indépendant www.icasualties.org. Quarante militaires américains ont trouvé la mort en Irak en janvier, contre 23 en décembre. Le rythme des attaques contre les troupes américaines à Baghdad s'est notablement accru au cours des dernières semaines. Depuis le début de l'année, les soldats de la coalition y sont en moyenne la cible d'un engin piégé tous les trois jours, selon le commandement américain. Ces engins piégés, ou IED (improvised explosive devices ou engins explosifs de fabrication artisanale), sont la cause principale de décès des GI's en Irak. Dans le centre-nord et le nord du pays, dans les province de Dyala, Tamim, Salaheddine et Ninive, des confrontations régulières opposent les troupes américaines et les forces de sécurité irakiennes à des groupes présentés comme des affiliés d'Al Qaïda en Irak. Capitale de la province de Ninive, Mossoul (370 km au nord de Baghdad) est devenue ces derniers mois un « dangereux centre de gravité » de la branche irakienne d'Al Qaïda selon la coalition. Le 28 janvier, cinq militaires américains avaient été tués dans une embuscade tendue dans les rues de cette ville. Un engin piégé avait explosé au passage d'une patrouille de véhicules américains, suivi de tirs d'armes légères. Autre signe qui ne trompe pas, l'exode continue. Le HCR enregistre avec satisfaction quelques retours au pays, mais les départs sont encore plus élevés. La raison en est bien simple : fuir la guerre. Une satisfaction toutefois, la menace proférée par le leader radical chiite irakien, Moqtada Sadr, d'exclure les membres de sa milice, l'armée du Mahdi, ne respectant pas son ordre de trêve, après des affrontements jeudi entre ses partisans et l'armée américaine à Baghdad. Mais jusqu'à quand dira-t-on au sujet de ce leader qu'il a décidé de partir en guerre aussi bien contre l'occupant américain que les dirigeants de son pays ? Cette déclaration intervient après la publication d'un communiqué de l'armée américaine, faisant état d'affrontements, jeudi à l'aube, entre militaires américains et irakiens, d'un côté, et « éléments des groupes spéciaux », extrémistes chiites et éléments incontrôlés de l'armée du Mahdi, de l'autre. La trêve du mouvement sadriste concerne toutes les activités de la milice et notamment les opérations menées contre les troupes américaines. Elle avait été annoncée fin août 2007 après des combats meurtriers à Kerbala (centre) entre l'armée du Mahdi et la police, proche d'une faction chiite rivale, à l'occasion d'une célébration chiite. Cette trêve, qui a joué un rôle important dans la baisse des violences constatée depuis six mois en Irak, doit s'achever vers fin février, et le mouvement sadriste avait d'abord laissé entendre qu'elle pourrait être renouvelée. Le 18 janvier, une reprise des activités de l'armée du Mahdi a été évoquée, en raison du « soutien apporté par le gouvernement à des criminels dans les services de sécurité », en référence à une faction chiite rivale proche des autorités. Depuis, plusieurs responsables du mouvement Sadr ont appelé leur chef à ne pas renouveler la trêve. C'est cela le bourbier irakien, où tout le monde se bat contre tout le monde. Ce sont des guerres, et nul ne sait de quelle manière elles pourraient prendre fin.