La dernière sortie du chef du gouvernement a attisé la colère des syndicats autonomes. En effet, les douze syndicats formant la Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique sont plus que déterminés à faire pression pour revendiquer non pas l'application de la nouvelle grille des salaires, mais plutôt sa révision de fond en comble. Ils envisagent, par un débrayage de trois jours, les 24, 25 et 26 février, de paralyser à partir de demain plusieurs secteurs et l'administration publique. « Abdelaziz Belkhadem, chef du gouvernement, vient de bafouer les lois de la République », a déclaré hier M. Mériane, porte-parole de la coordination, lors d'une conférence de presse animée à Alger. L'accusation est grave et le syndicaliste assume pleinement ses déclarations en confirmant que l'application de la nouvelle grille des salaires, « contestée » par tous les fonctionnaires, avant la promulgation des statuts particuliers, est une violation flagrante des lois du pays et le non-respect de la Constitution. Toutefois, les représentants de ces organisations syndicales se sont tous interrogés sur les raisons d'une telle précipitation. Une précipitation qui discrédite davantage l'Etat algérien. M. Mériane a tenté d'apporter une réponse à cette interrogation en liant cette démarche irréfléchie et cette manière aléatoire de gérer une crise au mouvement de débrayage de trois jours prévu à partir de demain et aussi au congrès de l'UGTA annoncé pour le mois de mars prochain. « Le gouvernement cherche à museler les syndicats autonomes, il espère casser la dynamique née au lendemain de l'annonce des nouvelles augmentations des salaires qui sont insignifiantes. L'Etat veut aussi conforter l'UGTA qui trouve des difficultés à tenir son congrès », a soutenu M. Mériane en rappelant que la grève de trois jours arrêtée il y a deux semaines par la coordination aura bel et bien lieu à partir du 24 février. « Ni la panique, ni le jeu trouble du gouvernement, ni les menaces des responsables des différents départements n'infléchiront notre politique et notre action. Le formidable mouvement de protestation déclenché par les véritables représentants des fonctionnaires ne s'arrêtera pas là », a plaidé le conférencier, en précisant que de nouveaux syndicats se sont manifestés pour adhérer à leur mouvement. Convergence avec l'intersyndicale Il s'agit entre autres de celui des adjoints de l'éducation nationale et des conseillers d'orientation et probablement celui du corps des intendants qui « espèrent nous rejoindre ». « Nous essayons de trouver une convergence avec l'intersyndicale afin d'unifier nos rangs et constituer ainsi une force qui pourra peser de son poids sur la scène syndicale », a déclaré le conférencier qui regrette la fuite en avant du gouvernement dans le règlement des affaires qui touche de plus près la colonne vertébrale du pays et sa cheville ouvrière. « Ce n'est pas l'application de cette grille qui pose problème, mais son existence même, car le fonctionnaire algérien ne se reconnaît pas dans cette grille qui a omis le régime indemnitaire. Nos dirigeants travaillent dans l'opacité la plus totale, et les sous-dirigeants obéissent aux injonctions », a soutenu M. Mériane. Les syndicats estiment qu'ils n'ont pas besoin de leçon de nationalisme de quiconque et encore moins de l'UGTA « qui ne se soucie guère des problèmes des fonctionnaires, mais se préoccupe beaucoup plus de la gestion des privilèges que lui procure le dossier des œuvres sociales ». Par ailleurs, la coordination très peinée par le silence alarmant et pesant de la classe politique s'interroge sur l'effacement des partis politiques, y compris ceux de l'opposition, des députés, des sénateurs, en somme de toutes les institutions. « Que font nos élus ? », s'est demandé Dr Yousfi du SNPSSP. « Sont-ils de simples spectateurs au lieu d'être des acteurs ? » Les syndicats interpellent par la même occasion les politiciens, représentants du peuple sur la situation dramatique et le marasme que vivent les citoyens algériens pour qu'ils jouent leur rôle de complémentarité avec celui qu'effectuent les syndicats. « Nous sommes en train de défendre le droit des fonctionnaires. Les doléances des syndicats ne sont pas prises en considération dans les débats de la classe politique. Une classe politique qui regarde en spectateur », a observé Dr Yousfi, qui déplore l'absence de projection par rapport aux problèmes des fonctionnaires algériens. La coordination appelle l'ensemble des fonctionnaires à observer, sans aucune crainte de représailles, car la contestation est un droit, trois journées de protestation les 24, 25 et 26 février, et ce, afin de concrétiser les revendications portant sur la préservation du pouvoir d'achat, l'ouverture des portes du dialogue avec les syndicats autonomes, la révision de la grille des salaires et l'amélioration des conditions de travail.