La France doit reconnaître tous ses crimes coloniaux, c'est notre principale revendication », a déclaré hier à l'APS la veuve Audin jointe par téléphone. « Maurice se sentait Algérien et était donc solidaire avec le combat de ses compatriotes pour la liberté », a ajouté Mme Josette Audin qui vit en France. Son neveu, Serge Grau, a assisté hier à l'inauguration de la plaque commémorative qui a eu lieu en présence d'officiels et de représentants de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM). La place, située au cœur d'Alger dans l'actuelle rue Didouche Mourad, jusqu'au 4 juillet 1963 avait porté le nom de triste renommée du maréchal colonialiste Louis Hubert Lyautey. Une année jour pour jour après l'indépendance, elle a été débaptisée pour porter dorénavant le nom d'un héros de la cause algérienne, à savoir Maurice Audin. Ce jeune communiste (il avait 25 ans en 1957), d'un courage légendaire, brillant enseignant de mathématiques à l'université d'Alger, s'engagea sans hésitation dans la résistance algérienne parce que convaincu que la cause était juste. Le 11 juin 1957, une escouade de « bérets bleus », des parachutistes du général Massu auxquels avait été confiée la pacification d'Alger, commandés par un capitaine et un lieutenant, firent irruption, tard dans la nuit à 23h dans le domicile du militant communiste. Maurice Audin ne retrouvera jamais la liberté. Ce n'est que le 22 juin que le Journal d'Alger annonce « l'arrestation de Maurice Audin placé en résidence surveillée ». Quelques heures plus tard, Pierre Maisonneuve, un conseiller du gouverneur d'Algérie Robert Lacoste, informe par courrier Mme Josette Audin que « son mari se trouve sous le coup d'une assignation à résidence et qu'il se trouve en bonne santé ». Maurice Audin était déjà mort, assassiné par strangulation par le lieutenant Charbonnier qui le torturait depuis son arrestation avec la complicité de l'ensemble des autorités militaires et politiques qui prétendra sans convaincre personne que Maurice Audin s'était évadé. Maurice Audin fait partie de ces êtres exceptionnels qui, comme les Yveton, Pechard, Guenassia, Timsit et tant d'autres, ont osé par humanisme et sens aigu de la justice, s'engager dans un combat qu'ils savaient dangereux. Un jour lorsque le conservatisme et le sectarisme se seront atténués, ces militants d'origine européenne devront eux aussi figurer dans les manuels d'histoire d'une Algérie fière de tous ceux qui ont participé avec brio à sa libération.