Les paramédicaux étaient encore une fois au rendez-vous hier, et ce, malgré la pression, les intimidations et l'enclenchement de la machine judiciaire de la part du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. Au deuxième jour de la grève de trois jours, à laquelle a appelé le Syndicat algérien des paramédicaux (SAP), les initiateurs de cette action semblent avoir ratissé large vu le suivi massif du mot d'ordre de débrayage au niveau national et dont le taux de suivi a dépassé les 90%. Dans la matinée d'hier, des piquets de grève, des sit-in et des rassemblements ont été improvisés dans l'enceinte des hôpitaux d'Alger et de toutes les wilayas du pays. Au Chu Mustapha, les infirmiers en blouse blanche discutaient de leurs problèmes et surtout de l'attitude « scandaleuse » de leur tutelle. Une tutelle, selon le SAP, qui tente par tous les moyens de casser ce mouvement pacifique. Une tutelle qui continue en 2008 à tourner le dos à ses fonctionnaires et à se substituer à la justice. « Au lieu d'ouvrir les portes du dialogue, M. Tou innove en la matière. Il qualifie notre grève d'illégale, tout en sommant le personnel paramédical à suspendre son mouvement et avance un taux de participation de 7% en moyenne. Ceci relève de l'aberration dans un pays qui se dit démocrate », a soutenu M. Ghachi. Celui-ci pense par ailleurs que M. Tou doit revoir sa copie en matière de calcul arithmétique. « Les infirmiers qui n'ont pas adhéré au mouvement de débrayage avoisine peut-être les 7% et nous pensons que le représentant du gouvernement parle de ce noyau. Il faut être aveugle et sourd pour réduire le débat à la guerre des chiffres », a déploré notre interlocuteur. Outrés, les paramédicaux ont appris hier, par le biais de l'administration de l'hôpital Mustapha Bacha, l'existence d'un communiqué émanant du ministère de la Santé stipulant l'arrêt de la grève. La chambre administrative aurait ainsi statué en référé suite à une action engagée par M. Tou. Mais officiellement, rien n'a émané de la justice ou de son porte-parole officiel. Nullement étonné, le SAP n'accorde pas d'importance à cette énième manipulation et compte poursuivre la grève et maintenir la pression jusqu'à la satisfaction de ses revendications. « Nous n'allons pas suspendre notre grève, car nous n'avons reçu aucun ordre des services de la justice. Rien ne nous a été notifié », a souligné M. Ghachi en s'interrogeant sur les missions attribuées à M. Tou. « Est-il ministre de la Santé ou de la Justice ? De quel droit se permet-il de se prononcer sur l'illégalité ou pas de la grève ? Est-il le garde des Sceaux ? Il est le seul ministre à brandir, à chaque fois, cette carte... », s'indigne notre interlocuteur en rappelant les agissements de ce dernier lors de la grève des 17, 18 et 19 février dernier qui a mobilisé un grand nombre de paramédicaux. « Ce jour-là, nous avons été fortement déçus par le ministère de tutelle. Il nous a reproché le fait de ne pas avoir prévenu l'inspection du travail. Comme notre syndicat couvre tout le territoire national, nous n'avons donc pas jugé utile de déposer le préavis de grève auprès de l'inspection du travail puisque nous l'avions déjà remis au ministère du Travail et à celui de la Santé dix jours avant la grève », a rappelé M. Ghachi qui estime qu'aujourd'hui le ministère ne peut pas les accuser d'être des « hors-la-loi » d'autant que le syndicat a respecté la procédure légale. Le SAP s'est insurgé contre les mesures visant à intimider les contestataires. « Je ne comprends pas pour quelles raisons les grévistes de la centrale syndicale n'ont jamais eu à subir des ponctions sur salaires. Alors que les syndicats autonomes, dès qu'ils enclenchent une grève, ils font face à ces intimidations. Qu'ils prennent tout le salaire s'ils le souhaitent, notre mouvement ne s'arrêtera pas », assène M. Ghachi. Le cri d'alarme des contestataires s'adresse au gouvernement dans son ensemble. Ils demandent l'amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles, une meilleure formation, une rémunération digne de leur métier et leur garantir la sécurité pendant les heures de travail, notamment la nuit, ainsi qu'un minimum de moyens pour exercer leur activité en mettant à leur disposition des vestiaires et des chambres de garde. « Le SAP ne fait pas grève de gaieté de cœur. Il en a fait recours après épuisement de toutes les voies. Nous n'avons jamais refusé la négociation et nous y invitons d'ailleurs le ministre à la table du dialogue. Toutefois, si les autorités persistent dans leur logique de mépris, nous allons redoubler de férocité », a ajouté le secrétaire général du SAP. Ce dernier revendique également la mise en place du système LMD pour leur permettre d'évoluer dans leur carrière et de grimper des échelons. « Nous voulons un statut qui nous renforce et non qui nous dévalorise et un salaire décent nous permettant de subvenir à nos besoins les plus élémentaires », a souligné le porte-parole du SAP. Par ailleurs, le Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP) apporte son soutien au SAP tout en étant convaincu de la légitimité des revendications du SAP et de l'ensemble des professionnels de la santé ainsi que celles de tous les syndicats autonomes et interpelle à cet effet les pouvoirs publics pour un dialogue franc et sincère avec les véritables représentants des travailleurs. De son côté, le Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP) a exprimé sa solidarité avec le SAP .