Les déclarations optimistes du président palestinien Mahmoud Abbas ayant suivi ses entretiens avec la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice en visite au Proche-Orient, qu'il a rencontrée deux fois en 24 heures, contrastent avec l'humeur générale des citoyens palestiniens. Ces derniers ne voient aucune possibilité de créer un Etat palestinien dans un proche avenir. Mahmoud Abbas, qui a sûrement ses raisons, avait déclaré depuis la capitale jordanienne : « J'ai confiance que, si Dieu le veut, nous obtiendrons une paix globale en 2008. Nous, les Israéliens et les Américains, ainsi que toutes les parties concernées dans la région, œuvrons à cet objectif. » Mme Rice l'avait précédé dans cet optimisme inexplicable en déclarant de son côté : « Je dois dire que je trouve très impressionnant le travail qui est accompli et le sérieux du processus et je pense que tout cela va dans la bonne direction », a-t-elle déclaré. Priée de dire si les espoirs des Etats-Unis de voir les deux parties conclure un accord avant le départ de George Bush de la Maison-Blanche, en janvier 2009 étaient justifiés, Mme Rice a répondu : « Je crois vraiment que c'est un objectif que nous pouvons atteindre. » Cela va à l'encontre des données sur le terrain. Israël et le gouvernement d'Ehoud Olmert poursuivent la politique du leurre qu'ils mènent à la perfection. De quel Etat peut-il s'agir, alors que la colonisation dont l'arrêt est une des conditions de la fameuse feuille de route, plan de paix international, qui a vu le jour en 2003, parrainé par le président américain en personne, bat son plein comme jamais auparavant en Cisjordanie occupée. Israël fait tout pour empêcher la création de ce futur Etat palestinien indépendant et viable, non dans les déclarations médiatiques mais sur le terrain. La levée de 50 barrages militaires sur les 580 existants, mesure jugée par la secrétaire d'Etat américaine comme une réelle avancée dans le processus de paix, ne changera rien aux difficultés quotidiennes vécues par plus de 2 millions et demi de Palestiniens vivant en Cisjordanie occupée. « Ce ne sont pas des barrages très importants », a déclaré le chef du département des Affaires civiles de l'Autorité palestinienne, Houssein Al-Cheikh, qui a reçu la liste des points de contrôle que les Israéliens comptent supprimer. « Nous saluons la levée de tout barrage, mais les annonces d'Israël sont fantaisistes et n'aident en rien car les principaux barrages qui nuisent à la vie quotidienne des Palestiniens sont toujours en place », a-t-il ajouté. Ce territoire palestinien sur lequel Israël poursuit la construction du mur de séparation, qualifié de « raciste » par les Palestiniens, finira par se transformer en de multiples bantoustans isolés les uns des autres par le mur et les centaines de colonies israéliennes, au point qu'il sera impossible d'y voir naître cet Etat palestinien indépendant, souhait de tout un peuple depuis plus de 60 ans. Le mouvement anti-colonisation « La Paix Maintenant » a publié un nouveau rapport révélant que près de 500 bâtiments comptant des milliers de logements étaient en chantier depuis janvier dans 101 colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. Alors que Mme Rice est toujours dans la région, la mairie de Jérusalem a annoncé la construction de 600 logements dans la partie orientale de la ville, c'est-à- dire au sein de la ville sainte d'El Qods. La colonisation dans la ville sainte, annexée par Israël après la guerre de 1967, que les Palestiniens veulent prendre comme capitale éternelle de leur futur Etat, vise d'un côté à l'isoler de son entourage palestinien et de l'autre à la judaïser. Enfin, pour ce qui est de la bande de Ghaza, l'autre aile des territoires palestiniens, transformée en une immense prison grâce au blocus israélien inhumain qui prive les citoyens d'en sortir vers d'autres cieux, on ne peut pas dire que la situation est meilleure, bien au contraire. Ce territoire où la pauvreté, le chômage et les conditions de vie précaires font des ravages, se dirige vers une mort lente. Les citoyens palestiniens ont le droit de voir d'un œil négatif tout ce qui se dit à propos de la création d'un Etat palestinien indépendant d'ici la fin de l'année 2008.