Insurgé » est la toute dernière exposition de Mustapha Boutadjine, plasticien dont la spécialité est le graphisme-collage. Cette très belle et émouvante exposition est à voir au Centre culturel algérien de Paris (rue de La Croix Nivert (XVe arrondissement de Paris, métro Boucicault) jusqu'au 8 mai. « Insurgé », qui s'ouvre avec un portrait de Kateb Yacine – le visuel de l'exposition – se compose d'une trentaine de tableaux de figures marquantes de l'histoire de la lutte anticolonialiste en Algérie, mais aussi partout dans le monde où des hommes et des femmes luttent contre un ordre injuste, qu'il soit national ou impérialiste. C'est d'ailleurs le fil conducteur de Mustapha Boutadjine, un artiste que nous avons qualifié, il y a plusieurs années déjà, d'artiste en « perpétuelle contestation », contestation de l'oppression, des dictatures, du manque de démocratie, de l'occupation coloniale. C'est ainsi que l'exposition « Insurgé » est un hommage à la Palestine et aux Palestiniens. Une séquence est aussi consacrée à l'Irak, un rappel de la guerre du Vietnam, de la lutte de libération de l'Algérie, un clin d'œil à l'Amérique latine, un sous-continent cher à l'artiste. Cette exposition succède à « Black is toujours beautiful », « America basta », « Poètes et Partisans ». Profondément humaniste et internationaliste, Mustapha Boutadjine ne se connaît pas de frontières, si ce n'est celles de l'étouffement de la liberté et de la dignité humaines, contre lesquelles il s'insurge en rendant hommage à d'autres insurgés. Ses frères sont ceux qui ont porté et portent le combat contre le poids des chaînes qui les entravent, contre les discriminations. C'est ainsi que se côtoient comme de vieilles connaissances complices artistes, intellectuels, sportifs, militants du monde entier réunis par un dénominateur commun. Sacco et Vanzetti, Maurice Audin, l'adolescent palestinien, une pierre à la main face au mur de l'occupation israélienne, Abane Ramdane, Djamila Bouhired, Ali La Pointe, Maurice Laban, Henri Maillot, Guy Moquet, Mehdi Ben Barka, Rosa Parks, Myriam Makeba, James Brown, Louis Amstrong, Martin Luther King, Fédérico Garcia Lorca, Jimi Hendrix, Charlie Chaplin, Hugo Chavez, Emiliano Zapata, Fidel Castro…et Dahmane el Harrachi et M'rizek, un clin d'œil au quartier natal de l'artiste La Glacière et à la musique chaâbi d'Alger, insurgée contre une musique plus conventionnelle, forment la chaîne fraternelle que nourrit l'artiste de son art. Cet art qui permet à Mustapha Boutadjine d'exprimer ses convictions et sa révolte contre les injustices. « Certains le font par la plume, la photo ou les discours politiques, moi c'est avec volupté que je déchire des centaines de couvertures de magazines luxueux que me fournissent amis et relations pour contribuer modestement, à ma manière à l'écriture de l'histoire humaine », nous dit-il. La démarche de l'artiste est celle d'un peintre qui refuse le conventionnel et dont la touche de pinceau est remplacée par un bout de papier. Il travaille par thèmes, ses toiles composent un ensemble cohérent. Mustapha Boutadjine a à son actif une centaine d'expositions en France, en Algérie et dans plusieurs autres pays et plus de 200 toiles ; d'autres encore sont en chantier. La rencontre de Mustapha Boutadjine avec le Centre culturel algérien de Paris s'est faite grâce à Ouahiba Adjali, directrice de la galerie Arts en liberté, d'Alger. Le directeur du Centre culturel algérien a donné « carte blanche » à l'artiste sur le contenu et l'organisation de l'exposition. Pour Mustapha Boutadjine, c'est parce qu'« un artiste a compris un autre artiste ». « America basta » sera prochainement à la galerie « Arts et liberté » à Alger.