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Du parti unique au multipartisme unique
Peut-on encore parler de famille révolutionnaire ?
Publié dans El Watan le 08 - 12 - 2004

Feindre l'étonnement ou s'étonner sérieusement de l'absence d'opposition depuis l'avènement de la dernière élection présidentielle relève d'une naïveté enfantine.
Une opposition réelle, la présence d'un contre-pouvoir permettant une activité politique sérieuse à l'échelle nationale, critiquant le pouvoir en place dans l'exercice de ses fonctions pour le contraindre par des propositions et des suggestions sérieuses à une politique autre, n'a jamais pu fonctionner. Ce contre-pouvoir que l'on pensait exercer à l'avènement du multipartisme et du pluralisme, laissant penser à une ouverture pour l'instauration de la démocratie qui allait mettre fin au système du parti unique était un leurre. Nous sommes toujours sous le diktat du système engendré par le parti unique qui après la révolte du 5 octobre 1988 avait trouvé la parade en adoptant un multipartisme unique lui aussi. Et le voilà par ce fait occupant, en exclusivité, le champ politique avec son rejeton RND et leurs satellites bien connus, disposant de moyens énormes, médiatiques, matériels et immobiliers en monopole de droit acquis à l'échelle du territoire national que tous les partis réunis n'arrivent pas à égaler. Vous lirez ci-dessous quelques paragraphes tirés d'un article paru dans le journal unique de l'époque El-Moudjahid du 18 avril 1989 dénonçant la honteuse et diabolique tricherie dans l'application de la loi sur le multipartisme à travers son article 40. Lisez s'il vous plaît ! Vous constaterez que rien n'a changé de l'attitude du pouvoir tricheur jusqu'à ce jour.
L'exercice de la démocratie, le FLN, les FLN et les autres partis dont l'enjeu de la conjoncture actuelle est la bataille pour le pouvoir politique
L'exercice de la démocratie exige clarté, loyauté et tolérance de la part de tous ceux qui s'en réclament à juste titre. Son instauration est si simple et si facile dès lors qu'on la pratique dans la transparence, elle devient de plus en plus difficile à saisir lorsqu'on la complique à dessein pour n'en garder que les apparences. Le FLN de novembre 1954 a été constitué à l'époque en parti unique par mesure de stratégie pour permettre de rassembler toutes les forces vives du peuple et de combiner leur action dans la lutte contre l'ennemi pour la restauration de la souveraineté nationale usurpée et l'émancipation du peuple algérien à exercer pleinement ses droits politiques. Il avait terminé sa mission principale à l'indépendance. Une crise très grave avait éclaté en son sein, il s'est disloqué et son existence en tant que tel n'avait plus de raison d'être valable ; l'essentiel ayant été atteint : la restauration de la souveraineté nationale. D'autres FLN lui ont succédé en trois périodes : celui de 1962 à 1965, puis de 1965 à 1978 et enfin de 1978 à ce jour. Tous ont essayé depuis de s'organiser, de se réorganiser, de se « sourcer », de se ressourcer, de se structurer, se restructurer sans fin pour se donner l'image du FLN de 1954, dont ils se réclament sans pudeur et dont les résultats de leur action ont conduit le pays à la ruine dans tous les domaines. Tous ont vécu dans les intrigues, les luttes de clans et les règlements de compte bien connus qui ont caractérisé les 26 années de l'histoire de l'Algérie. Aujourd'hui encore, on continue d'agiter, au nom de l'unité nationale qu'on voudrait protéger, la peur de l'anarchie et des règlements de compte pour justifier, sinon le monopole hier du parti unique, du moins une position dominante de l'actuel parti, et la condamnation du multipartisme incriminant la « mésentente » des partis politiques dans le jeu démocratique. Pourtant, les tragiques événements d'octobre 1988 avaient bien sonné le glas du parti unique, donnant un démenti cinglant à la monstrueuse tricherie. Cette explosion de révolte populaire contenue depuis 26 ans n'était en réalité que le résultat d'une très grave crise de confiance populaire due à tant d'espoirs déçus. Qu'a-t-on fait pour regagner la confiance du peuple ? Si l'on en juge d'après la prolifération des promesses dans les discours des responsables et les résultats obtenus, on ne peut qu'être sceptique. Certes, on a habillé tant bien que mal une Constitution (qui était toute à refaire par une Assemblée souveraine librement élue) de la robe « démocratie » par quelques textes lui donnant une belle allure faisant croire à l'Etat de droit, mais sur le plan pratique rien n'a changé concrètement des méthodes habituellement utilisées. En effet, en autorisant les citoyens à l'exercice de leurs droits (art. 40) pour la libre constitution de partis politiques sans leur donner les moyens nécessaires pour les exercer, quelles chances vont avoir ces nouveaux partis pour se mesurer à un FLN avec ses structures et ses organisations satellites, instruments du pouvoir depuis 26 ans, disposant des moyens médiatiques, immobiliers, matériels et financiers à l'échelle nationale que l'Etat a toujours mis à sa disposition ? Le FLN continue de jouir du monopole de droits acquis contraires à la règle démocratique, d'où la désillusion pour les autres partis ; on leur enlève d'une main ce qu'on leur a donné de l'autre. On triche délibérément, comme par le passé, dans le but inavoué de s'assurer le monopole du pouvoir en lui donnant, cette fois, une forme de légitimation par les textes ; d'où la manière de se prévaloir sans cesse, dans les discours, du concept de l'Etat de droit. L'ouverture démocratique est mal partie. Les chances du citoyen d'exercer ses droits ne sont pas égales pour tous. L'article 40 apparaît dans ces conditions comme un os à ronger offert aux autres partis pendant que le FLN se taille la part du lion. Par cette façon de faire, nous éviterons de verser dans l'autre extrémité, aussi négative que celle du parti unique, la grande multiplication de partis qui engendre la confusion et la désorientation des citoyens à établir leur choix conformément à des critères simples et sans embrouille. Dans l'énoncé de ces règles de déontologie, je suggérerai entre autres recommandations qui pourraient être faites de : 1) Bannir à jamais l'usage du mensonge, de la tricherie ou de la force pour régler les problèmes de la société. 2) Nous prémunir contre tous les facteurs de division de quelque idéologie que ce soit à tendance exclusiviste qui ne peuvent nous mener qu'à la guerre civile, à l'anarchie et à la déstabilisation de la nation. Et ainsi de suite pour d'autres recommandations. A cette fin, il nous sera nécessaire de créer un organisme institutionnalisé, composé d'un nombre de personnalités hautement qualifiées par leur savoir et leurs qualités morales incontestées, dévouées et désintéressées ; personnalités qui auront pour seule mission de veiller strictement au respect de la règle de déontologie établie et à l'élaboration de laquelle elles pourront d'ailleurs participer puis l'enrichir en tant que gardiens de cette règle. Et ainsi, par le fonctionnement de cette démocratie, nous montrerons que notre devise : « Par le peuple et pour le peuple » n'est plus un slogan de circonstance, mais un choix délibéré digne de l'Algérie et de ses espérances.En conclusion, nous sommes aujourd'hui à la fin 2004 et les partis-Etat FLN/RND, tout comme hier le parti unique, disposant de privilèges indûment acquis, occupent en maître absolu sans vergogne ni état d'âme le champ politique actuel. Voilà pourquoi, il ne peut y avoir d'opposition contre-pouvoir possible tant que durera le nouveau système du « multipartisme unique et ses satellites actuels bien connus, souvent affublés malhonnêtement du titre élogieux de famille révolutionnaire ».


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