Le dépôt de carburants de la société Naftal, qui date de la période coloniale, se trouve aujourd'hui au centre d'une controverse entre l'administration locale et cette entreprise publique. A l'époque de sa construction, le site était totalement enclavé dans un espace à la lisière du tissu urbain, loin de toute habitation ; il n'en est plus de même depuis plusieurs années. En effet, avec l'extension de la ville et l'érection de plusieurs cités, ce dépôt de carburants est actuellement cerné de partout par des groupements urbains. Dans un rayon de 500 mètres, il est loisible de recenser plus d'une trentaine de tours et autant d'immeubles. Agissant dans le cadre de ses prérogatives, la Direction de l'environnement demandera sa délocalisation. S'ensuivra une série de visites de la commission de surveillance et de contrôle des installations classées et autant de correspondances pour lever les réserves jugées dangereuses pour l'environnement. Devant le silence de Naftal, la Direction des mines adresse une correspondance, le 25 février 2001, dont une copie au ministre de l'Energie et à la Direction régionale d'Oran. Après avoir rappelé à Naftal l'urgence de lever les réserves qui caractérisent son dépôt, il est proposé l'octroi d'un terrain de 3 hectares situé dans la zone industrielle de Ouled El Bachir. Du côté de Naftal, on fait miroiter des projets qui seraient à l'étude jusqu'au 27 novembre 2002, date à laquelle le wali de Mostaganem adresse une correspondance à la direction générale de l'entreprise, à Alger. Le bras de fer Dans le courrier en question, il est rappelé les termes d'un PV de réunion datant du 26 mai 2001, dans lequel la menace sur la sécurité publique et la levée des réserves sont à nouveau soulignées. Accompagnée de deux représentants du ministère de l'Environnement venus spécialement d'Alger, la commission de suivi se rend sur le site et décide de suspendre le stockage de l'essence et du super ; parce que moins inflammable, seul le gasoil sera admis en stock. Avec des capacités de seulement 600 m3, soit la consommation d'une journée moyenne. Naftal, qui projetait d'ériger une station service dite de prestige pour garder le terrain, fait craindre le pire aux responsables locaux qui, à la veille de la visite présidentielle les 10 et 11 février 2003, décident encore une fois d'attirer l'attention des responsables de l'entreprise sur les dangers qu'ils font courir à l'environnement et au voisinage. Pour mieux étayer leur requête, ils n'omettent pas de signaler l'état de dégradation avancée dans lequel se trouvait le dépôt, notamment la présence de fissures sur certains réservoirs, des fuites de carburants et la défectuosité du système incendie. Depuis, il y eut l'élection présidentielle, la visite dans la wilaya du ministre de tutelle et l'arrivée d'un nouveau wali, sans que rien ne vienne perturber la sérénité des responsables de Naftal. Des élus ont bien l'intention de se saisir du problème, mais sans conviction ni expertise. Car, nous dira un membre de l'APW, si les autorités n'ont rien pu faire à ce jour pour déplacer ce dépôt vieux de plus d'un demi-siècle, quelque part il y a comme une volonté de laisser pourrir la situation. La santé publique objet de controverse Alors qu'un projet de délocalisation avait été susurré - on parlera d'un dépôt alimenté directement par pipeline à partir de Fornaka - et que la wilaya maintenait son offre d'un terrain d'assiette, l'approvisionnement en essence et en super s'organisait directement par camions-citernes à partir d'Arzew. Mais, depuis l'arrivée de deux opérateurs privés, l'espoir de voir s'ériger un dépôt Naftal répondant aux normes et permettant un approvisionnement régulier en carburants et en lubrifiants, commence à s'amenuiser. Naftal, après avoir abandonné l'idée d'ériger un autre dépôt, ira-t-elle jusqu'à remiser son projet de station ? Les départs à la retraite parmi les 79 travailleurs ne seraient plus remplacés. C'est ce que redoutent nos interlocuteurs - au niveau de la wilaya et de l'entreprise - qui craignent qu'avec le retour sur le marché des grandes firmes multinationales et la rude concurrence qui s'annonce, l'entreprise publique va élaguer certaines activités et réduire ses ambitions. Le vieux et encombrant dépôt de Mostaganem n'aura plus sa raison d'être. Comme le soulignera un fonctionnaire, c'est aussi une part non négligeable de recettes fiscales et d'emplois qui feront défaut à la région. Cette alternative est étayée par les propos qu'un travailleur impute au DG de Naftal en visite sur site, qui trouvait que la raffinerie d'Arzew n'est qu'à un jet de pierre de Mostaganem. Ce qui permettait le recours à un service en droiture. Ainsi, en renforçant sensiblement le parc de l'entreprise et en faisant appel au privé, les besoins quotidiens en carburants qu'un responsable situe à 500 m3 seront acheminés par camions. La face cachée de l'iceberg En effet, comme le soulignera ce syndicaliste, à la moindre perturbation, la région sera en situation de pénurie ou de forte tension, comme constaté lors de notre visite intervenue le lendemain de la grève des transporteurs et qui a mis à rude épreuve les différents intervenants ainsi que les consommateurs. Rencontré dans le bureau du DMI, le directeur de la pêche fera remarquer que 600 tonnes de gasoil pouvaient être embarquées en une seule journée par la flotte. Il semble, sauf avis contraire de la part de Naftal dont le directeur intérimaire s'excusera de ne pouvoir se prononcer sur cette question, qu'en réalité, les atermoiements successifs préparaient une fermeture du dépôt que l'on tenterait de justifier en s'abritant derrière les réserves des services de l'environnement et des mines. Qui se souciera de faire parvenir les carburants dans les zones enclavées du Dahra et à quels prix ? L'APW, qui vient enfin d'ouvrir sa session d'automne avec deux mois de retard sur le calendrier, serait bien inspirée, à l'instar de quelques élus, de poser la question à qui de droit.