Les transferts de fonds en provenance de l'étranger affichent une formidable courbe ascendante. Lors d'un colloque sur la communauté algérienne établie à l'étranger, organisé hier à la résidence Djenane El Mithak, le sociologue Mohamed Saïb Musette a expliqué que la somme qu'envoient chaque année les émigrés algériens vers leur pays d'origine est nettement plus élevée que les investissements directs algériens (malgré tous les efforts du gouvernement algérien pour encourager les investissements) ainsi que l'aide au développement. « Si l'aide a été nettement en deçà du niveau des transferts, les IDE ont dépassé les transferts seulement en 2001. Les récentes estimations de la Banque mondiale (2006) révèlent que les pays de l'Afrique de Nord sont les plus captifs des transferts, avec le Maroc en tête pour le continent africain, suivi de l'Egypte. L'Algérie occupe la quatrième place et la Tunisie, la cinquième en Afrique », estime Mohamed Saïb Musette. Il enchaîne : « En 2006, les transferts ont accusé une légère baisse, mais une reprise à la hausse est observée en 2007 (selon la dernière estimation de la Banque d'Algérie en mars 2008). » Les transferts d'argent effectués par les Algériens résidant en France ont atteint 283 millions d'euros en 2004, contre 282 millions en 2003 et en 2002 et 287 millions en 2001, selon une estimation de la Banque européenne d'investissement (BEI). Les nationaux installés en Europe ont transféré, en 2003, 1,35 milliard d'euros par les circuits officiels et presque autant de manière informelle. Au total, les Algériens de l'UE auront transmis à leur pays d'origine près de 2,8 milliards de dollars, selon la même source. Le problème du transfert de devises en Algérie réside essentiellement dans le fait que l'argent emprunte le plus souvent les voies de l'informel. « Les émigrés ne font pas confiance aux banques », a constaté M. Musette. En marge de la rencontre d'hier, des représentants de la communauté algérienne en Belgique ont regretté le fait qu'il n'y ait pas de banques algériennes dans le pays wallon. « Ceci aiderait à la circulation des fonds. L'on serait également mieux informé sur l'accès aux informations, notamment en ce qui concerne l'accès au terrain et au logement en Algérie », nous a confié M. Meslem. Selon les données de la Banque mondiale (2007), la tendance des transferts des migrants maghrébins obéit aux mêmes rythmes : faible et stable de 1976 jusqu'en 1986, puis une légère hausse entre 1987 et 2000, puis une hausse accélérée à compter de 2001. « L'argent transféré est destiné aux ménages principalement pour cinq utilisations : la consommation quotidienne de la famille, pour acheter d'autres biens et équipements pour le ménage, pour payer la scolarité des enfants. Il est à relever que les transferts vont très peu dans l'achat d'une maison, d'un terrain à bâtir, dans l'investissement ou l'ouverture de compte d'épargne en Algérie », est-il indiqué dans le rapport du Middle East Research Competition (Merc) chapeauté par M. Musette. « Le canal informel reste la voie privilégiée des migrants algériens avant le retour, avec plus de 75% par des amis et 35% lors des visites à la famille au pays. » Le sociologue a également mis l'accent sur les « particularités » de la migration maghrébine. Il a ainsi signalé que 86% des cinq millions de Maghrébins sont en Europe, avec 50% en France. L'émigration maghrébine se distingue par une forte féminisation. Selon les trois recensements français, les femmes constituent quelque 45% de la population maghrébine migrante en France. Entre 1982 et 1999, les Algériennes ont gagné plus de 10 points. Il est à signaler, par ailleurs, que les travailleurs maghrébins en France sont généralement des ouvriers et des employés. Au Canada, en revanche, il y a surtout des cadres et des universitaires.