M Daho Ould Kablia, secrétaire d'Etat chargé des Collectivités locales, persiste et signe à propos de ses révélations faites lors d'une conférence en sa qualité d'ancien du Malg (ministère de l'Armement et de la Guerre) sur l'apport des pays arabes à la Révolution algérienne. Les propos de M. Kablia rétablissant la vérité historique sur le rôle véritable joué par certains pays arabes que l'histoire officielle a toujours présentés comme étant le premier cercle des pays ayant soutenu et fait corps avec la Révolution algérienne réconcilie les Algériens avec leur histoire qui reste encore à écrire. Comme vient de le démontrer le pavé jeté par cet ancien officier du Malg dans la mare de la prétendue fraternité arabe vantée, chantée et enseignée dans nos écoles depuis l'indépendance avec une constante duplicité et hypocrisie dans les manuels d'histoire. Il a fallu attendre près d'un demi-siècle après le recouvrement de l'indépendance nationale pour que l'on sache que des pays comme le Maroc, la Tunisie et l'Egypte dont on pensait qu'ils furent des alliés inconditionnels de la Révolution algérienne monnayaient fermement leur « aide » à l'Algérie soumise à un vil racket pour le partage des armes qui transitaient par leurs ports contre le droit des navires transportant des armes pour les maquis algériens d'accoster dans ces pays voisins. Le procédé est autant inamical qu'inadmissible quand on se replace dans le contexte de l'époque où la Révolution algérienne éprouvait les pires difficultés pour s'approvisionner en armes qui parvenaient aux maquis au compte-gouttes. Ce chantage à la levée de l'impôt obligatoire sous forme de quotas d'armement prélevé sur les maigres quantités d'armement à destination des maquis, la Révolution algérienne l'avait vécu dans la douleur et le silence car elle n'avait pas d'autre choix. Du coup, avec ces révélations qui donnent la juste mesure de ce que fut véritablement l'aide de certains pays arabes durant la guerre de Libération nationale, c'est toute la problématique de l'écriture ou de la réécriture de l'histoire de la guerre de Libération nationale dans ses relations avec ses voisins et d'une manière plus générale avec les pays arabes qui est posée. Les acteurs de la Révolution algérienne qui sont en train de nous quitter les uns après les autres ont à cet égard une lourde responsabilité vis-à-vis de l'histoire et du peuple. La raison d'Etat, les relations politiques et commerciales de l'Algérie avec les pays arabes aussi étroites soient-elles ne doivent pas constituer un quelconque prétexte pour continuer à regarder notre histoire par le petit bout de la lorgnette, en cultivant le mensonge et la mystification de notre histoire pour des considérations de politique politicienne. Les révélations de M. Ould Kablia ont certainement fait l'effet d'une douche froide auprès de l'opinion algérienne qui découvre avec le sentiment douloureux de quelqu'un qui est trahi par les siens que la fraternité arabe n'aura pas été à la hauteur des sacrifices et de la symbolique que véhiculait la Révolution algérienne au-delà de l'Algérie, pour la dignité du monde arabe. Il reste à espérer que la sortie de M. Ould Kablia ne reste pas sans suite, autrement dit ne soit pas uniquement une réponse du berger à la bergère, une riposte politique de l'Algérie par des canaux officieux et un dossier – l'histoire – qui ne s'accommode pas de mensonges pour tailler des croupières, particulièrement à un pays voisin, en l'occurrence le Maroc dont le Premier ministre vient de remettre sur le tapis le vieux rêve des revendications territoriales marocaines sur certaines villes algériennes. Les historiens et les organismes en charge de l'écriture de l'histoire se doivent rapidement de prendre le relais en se rapprochant des témoins vivants et en revisitant les archives de la Révolution algérienne qu'il faudra exploiter de manière objective, loin de toute pression interne ou externe. Car, l'histoire, c'est la mémoire d'un peuple et la Révolution algérienne, le patrimoine commun de tous les Algériens.